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CJUE, 13/09/2016, aff. C-165/14, Alfredo Rendón Marín contre Administración del Estado

 

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

13 septembre 2016 (*)

 

« Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union – Articles 20 et 21 TFUE – Directive 2004/38/CE – Droit de séjour dans un État membre d’un ressortissant d’un État tiers ayant des antécédents pénaux – Parent ayant la garde exclusive de deux enfants mineurs, citoyens de l’Union – Premier enfant ayant la nationalité de l’État membre de résidence – Second enfant ayant la nationalité d’un autre État membre – Législation nationale excluant l’octroi d’un titre de séjour à cet ascendant en raison de ses antécédents pénaux – Refus de séjour pouvant entraîner l’obligation pour les enfants de quitter le territoire de l’Union »

Dans l’affaire C‑165/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), par décision du 20 mars 2014, parvenue à la Cour le 7 avril 2014, dans la procédure

Alfredo Rendón Marín

contre

Administración del Estado,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. M. Ilešič, L. Bay Larsen, Mme C. Toader, MM. D. Šváby, F. Biltgen et C. Lycourgos, présidents de chambre, MM. A. Rosas (rapporteur), E. Juhász, A. Borg Barthet, M. Safjan, Mmes M. Berger, A. Prechal et K. Jürimäe, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 30 juin 2015,

considérant les observations présentées :

–        pour M. Rendón Marín, par Mes I. Aránzazu Triguero Hernández et L. De Rossi, abogadas,

–        pour le gouvernement espagnol, par MM. A. Rubio González et L. Banciella Rodríguez-Miñón, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement danois, par M. C. Thorning et Mme M. Wolff, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement hellénique, par Mme T. Papadopoulou, en qualité d’agent,

–        pour le gouvernement français, par MM. D. Colas et R. Coesme, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. L. D’Ascia, avvocato dello Stato,

–        pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. Bulterman et B. Koopman, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, Mmes K. Pawłowska et M. Pawlicka, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. M. Holt et Mme J. Beeko, en qualité d’agents, assistés de M. D. Blundell, barrister,

–        pour la Commission européenne, par Mmes I. Martínez del Peral et C. Tufvesson, ainsi que par MM. F. Castillo de la Torre et M. Wilderspin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 février 2016,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 20 TFUE.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Alfredo Rendón Marín, ressortissant d’un État tiers et père de citoyens de l’Union mineurs, dont il a la garde exclusive et qui résident depuis leur naissance en Espagne, à l’Administración del Estado (Administration de l’État, Espagne), au sujet du refus du Director General de Inmigración del Ministerio de Trabajo e Inmigración (directeur général de l’immigration du ministère du Travail et de l’Immigration, Espagne) de lui octroyer un permis de séjour au titre de circonstances exceptionnelles, en raison d’antécédents pénaux.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Aux termes des considérants 23 et 24 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, et rectificatifs JO 2004, L 229, p. 35, et JO 2005, L 197, p. 34) :

« (23) L’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leur famille pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique constitue une mesure pouvant nuire gravement aux personnes qui, ayant fait usage des droits et libertés conférés par le traité [CE], se sont véritablement intégrées dans l’État membre d’accueil. Il convient dès lors de limiter la portée de ces mesures, sur la base du principe de proportionnalité, afin de tenir compte du degré d’intégration des personnes concernées, de la durée de leur séjour dans l’État membre d’accueil, de leur âge, de leur état de santé, de leur situation familiale et économique et de leurs liens avec leur pays d’origine.

(24)      En conséquence, plus l’intégration des citoyens de l’Union et des membres de leur famille est forte dans l’État membre d’accueil et plus forte devrait être la protection contre l’éloignement. C’est uniquement dans des circonstances exceptionnelles, pour des motifs impérieux de sécurité publique, qu’une mesure d’éloignement peut être prise contre des citoyens de l’Union ayant séjourné pendant de longues années sur le territoire de l’État membre d’accueil, notamment lorsqu’ils y sont nés et y ont séjourné toute leur vie. En outre, de telles circonstances exceptionnelles devraient également s’appliquer aux mesures d’éloignement prises à l’encontre de mineurs, afin de protéger leurs liens avec leur famille, conformément à la convention des Nations unies sur les droits de l’enfant, du 20 novembre 1989. »

4        L’article 2 de la directive 2004/38, intitulé « Définitions », énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

1)      “citoyen de l’Union” : toute personne ayant la nationalité d’un État membre ;

2)      “membre de la famille” :

[...]

d)      les ascendants directs à charge et ceux du conjoint ou du partenaire tel que visé au point b) ;

3)      “État membre d’accueil” : l’État membre dans lequel se rend un citoyen de l’Union en vue d’exercer son droit de circuler et de séjourner librement. »

5        L’article 3 de cette directive, intitulé « Bénéficiaires », dispose :

« 1.      La présente directive s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2, qui l’accompagnent ou le rejoignent.

2.      Sans préjudice d’un droit personnel à la libre circulation et au séjour de l’intéressé, l’État membre d’accueil favorise, conformément à sa législation nationale, l’entrée et le séjour des personnes suivantes :

a)      tout autre membre de la famille, quelle que soit sa nationalité, qui n’est pas couvert par la définition figurant à l’article 2, point 2), si, dans le pays de provenance, il est à charge ou fait partie du ménage du citoyen de l’Union bénéficiaire du droit de séjour à titre principal [...] ;

[...]

L’État membre d’accueil entreprend un examen approfondi de la situation personnelle et motive tout refus d’entrée ou de séjour visant ces personnes. »

6        L’article 7 de ladite directive, intitulé « Droit de séjour de plus de trois mois », prévoit, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.      Tout citoyen de l’Union a le droit de séjourner sur le territoire d’un autre État membre pour une durée de plus de trois mois :

a)      s’il est un travailleur salarié ou non salarié dans l’État membre d’accueil, ou

b)      s’il dispose, pour lui et pour les membres de sa famille, de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil au cours de son séjour, et d’une assurance maladie complète dans l’État membre d’accueil, ou

[...]

d)      si c’est un membre de la famille accompagnant ou rejoignant un citoyen de l’Union qui lui-même satisfait aux conditions énoncées aux points a), b) ou c).

2.      Le droit de séjour prévu au paragraphe 1 s’étend aux membres de la famille n’ayant pas la nationalité d’un État membre lorsqu’ils accompagnent ou rejoignent dans l’État membre d’accueil le citoyen de l’Union, pour autant que ce dernier satisfasse aux conditions énoncées au paragraphe 1, points a), b) ou c). »

7        Au chapitre IV de la directive 2004/38, intitulé « Droit de séjour permanent », l’article 16 de celle-ci, lui-même intitulé « Règle générale pour les citoyens de l’Union et les membres de leur famille », énonce, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.      Les citoyens de l’Union ayant séjourné légalement pendant une période ininterrompue de cinq ans sur le territoire de l’État membre d’accueil acquièrent le droit de séjour permanent sur son territoire. Ce droit n’est pas soumis aux conditions prévues au chapitre III.

2.      Le paragraphe 1 s’applique également aux membres de la famille qui n’ont pas la nationalité d’un État membre et qui ont séjourné légalement pendant une période ininterrompue de cinq ans avec le citoyen de l’Union dans l’État membre d’accueil. »

8        Figurant au chapitre VI de la directive 2004/38, intitulé « Limitation du droit d’entrée et du droit de séjour pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique », l’article 27, paragraphes 1 et 2, de cette directive dispose :

« 1.      Sous réserve des dispositions du présent chapitre, les États membres peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, quelle que soit sa nationalité, pour des raisons d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Ces raisons ne peuvent être invoquées à des fins économiques.

2.      Les mesures d’ordre public ou de sécurité publique doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné. L’existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.

Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues. »

9        L’article 28 de ladite directive, intitulé « Protection contre l’éloignement », dispose :

« 1.      Avant de prendre une décision d’éloignement du territoire pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique, l’État membre d’accueil tient compte notamment de la durée du séjour de l’intéressé sur son territoire, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans l’État membre d’accueil et de l’intensité de ses liens avec son pays d’origine.

2.      L’État membre d’accueil ne peut pas prendre une décision d’éloignement du territoire à l’encontre d’un citoyen de l’Union ou des membres de sa famille, quelle que soit leur nationalité, qui ont acquis un droit de séjour permanent sur son territoire sauf pour des motifs graves d’ordre public ou de sécurité publique.

3.      Une décision d’éloignement ne peut être prise à l’encontre des citoyens de l’Union, quelle que soit leur nationalité, à moins que la décision ne se fonde sur des raisons impérieuses de sécurité publique définies par les États membres, si ceux-ci :

a)      ont séjourné dans l’État membre d’accueil pendant les dix années précédentes, ou

b)      sont mineurs, sauf si l’éloignement est nécessaire dans l’intérêt de l’enfant, comme prévu dans la convention des Nations unies sur les droits de l’enfant du 20 novembre 1989. »

 Le droit espagnol

10      L’article 31, paragraphe 3, de la Ley Orgánica 4/2000 sobre derechos y libertades de los extranjeros en España y su integración social (loi organique 4/2000 sur les droits et les libertés des étrangers en Espagne et leur intégration sociale), du 11 janvier 2000 (BOE n° 10, du 12 janvier 2000, p. 1139), prévoit la possibilité d’octroyer un titre de séjour temporaire pour des raisons exceptionnelles, sans qu’il soit nécessaire que le ressortissant d’un État tiers soit préalablement muni d’un visa.

11      L’article 31, paragraphes 5 et 7, de cette loi dispose :

« 5.      Pour autoriser le séjour temporaire d’un étranger, il faut que ce dernier n’ait pas d’antécédents pénaux en Espagne ou dans les pays dans lesquels il a précédemment séjourné, pour des délits existant dans l’ordre juridique espagnol, et ne soit pas interdit de territoire dans les États avec lesquels l’Espagne a conclu un accord en ce sens.

[...]

7.      Pour le renouvellement du permis de séjour temporaire, le cas échéant, seront examinés :

a)      les antécédents pénaux, compte tenu de l’existence de remises de peine ou les situations de remise conditionnelle de la peine ou de sursis de la peine privative de liberté ;

b)      le non-respect des obligations de l’individu en matière fiscale et de sécurité sociale.

En vue de ce renouvellement, il sera tenu tout particulièrement compte de l’effort d’intégration manifesté par le ressortissant étranger et militant en faveur du renouvellement, lequel devra être prouvé au moyen d’un rapport positif de la communauté autonome attestant que l’individu a assisté aux formations prévues à l’article 2 ter de la présente loi. »

12      Le Real Decreto 2393/2004 por el que se aprueba el Reglamento de la Ley Orgánica 4/2000 (décret royal 2393/2004 portant approbation du règlement de la loi organique 4/2000), du 30 décembre 2004 (BOE n° 6, du 7 janvier 2005, p. 485), prévoyait, au paragraphe 4 de sa première disposition additionnelle :

« [...] [L]e secrétariat d’État à l’Immigration et à l’Émigration, sur rapport préalable du secrétariat d’État à l’Intérieur, peut délivrer des permis de séjour temporaire en cas de circonstances exceptionnelles non prévues dans le règlement de la loi [4/2000]. »

13      Les articles 124 et 128 du Real Decreto 557/2011 por el que se aprueba el Reglamento de la Ley Orgánica 4/2000, tras su reforma por Ley Orgánica 2/2009 (décret royal 557/2011 portant approbation du règlement de la loi organique 4/2000, après sa réformation par la loi organique 2/2009), du 20 avril 2011 (BOE n° 103, du 30 avril 2011, p. 43821), prévoient la possibilité de demander un permis de séjour temporaire à titre de circonstances exceptionnelles pour enracinement familial (arraigo familiar) à condition que le demandeur n’ait pas d’antécédents pénaux en Espagne ou dans les pays dans lesquels il a précédemment séjourné, pour des délits existant dans l’ordre juridique espagnol.

 Le litige au principal et la question préjudicielle

14      M. Rendón Marín, ressortissant colombien, est père de deux enfants mineurs nés à Málaga (Espagne), à savoir un garçon, de nationalité espagnole, et une fille, de nationalité polonaise. Ces enfants ont toujours séjourné en Espagne.

15      Il ressort du dossier dont dispose la Cour que M. Rendón Marín s’est vu confier, par une décision du Juzgado de Primera Instancia de Málaga (tribunal de première instance de Málaga, Espagne), du 13 mai 2009, les droits exclusifs de garde et d’hébergement de ses enfants. Le domicile de la mère de ces derniers, ressortissante polonaise, est inconnu. Ces deux enfants reçoivent, selon la décision de renvoi, des soins et une éducation scolaire adéquats.

16      M. Rendón Marín a des antécédents pénaux. Il a notamment été condamné en Espagne à une peine de neuf mois d’emprisonnement. Cependant, une suspension provisoire de deux ans de cette peine lui a été accordée à compter du 13 février 2009. À la date de la décision de renvoi, à savoir le 20 mars 2014, l’intéressé était dans l’attente d’une décision sur une demande de retrait de la mention de ses antécédents pénaux dans son casier judiciaire (cancelación).

17      Le 18 février 2010, M. Rendόn Marín a déposé, auprès du directeur général de l’immigration du ministère du Travail et de l’Immigration, une demande de permis de séjour temporaire au titre de circonstances exceptionnelles, en vertu du paragraphe 4 de la première disposition additionnelle du décret royal 2393/2004.

18      Par une décision du 13 juillet 2010, la demande de M. Rendόn Marín a, en application des dispositions de l’article 31, paragraphe 5, de la loi 4/2000, été rejetée en raison de l’existence d’antécédents pénaux.

19      Le recours formé par M. Rendón Marín contre cette décision ayant été rejeté par un arrêt de l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne) du 21 mars 2012, celui-ci a formé un pourvoi contre cet arrêt devant le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne).

20      M. Rendón Marín a fondé son pourvoi sur un moyen de droit unique, tiré, d’une part, de l’interprétation erronée des arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen (C‑200/02, EU:C:2004:639), et du 8 mars 2011, Ruiz Zambrano (C‑34/09, EU:C:2011:124), dès lors que la jurisprudence résultant de ces arrêts aurait dû conduire, selon lui, à lui accorder le permis de séjour sollicité, ainsi que, d’autre part, de la violation de l’article 31, paragraphes 3 et 7, de la loi 4/2000.

21      La juridiction de renvoi indique que, indépendamment des circonstances concrètes de l’affaire au principal, dans celle-ci, comme dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen (C‑200/02, EU:C:2004:639), et du 8 mars 2011, Ruiz Zambrano (C‑34/09, EU:C:2011:124), le refus de permis de séjour opposé à M. Rendόn Marín en Espagne impliquerait pour ce dernier un départ forcé du territoire espagnol et, partant, de celui de l’Union européenne avec, par voie de conséquence, une sortie de ce territoire pour les deux enfants mineurs, dépendant de l’intéressé. Cette juridiction relève toutefois que, à la différence des situations examinées dans les arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen (C‑200/02, EU:C:2004:639), et du 8 mars 2011, Ruiz Zambrano (C‑34/09, EU:C:2011:124), la législation nationale applicable prévoit une interdiction d’octroyer un permis de séjour lorsque le demandeur a des antécédents pénaux en Espagne.

22      En conséquence, la juridiction de renvoi se demande si le droit national, qui interdit, sans aucune possibilité de dérogation, l’octroi d’un permis de séjour en cas d’antécédents pénaux dans le pays où le permis est demandé, bien qu’il en résulte inéluctablement la privation pour un mineur, ressortissant de l’Union et dépendant du demandeur dudit permis, de son droit de séjourner dans l&rrsquo;Union, est conforme à la jurisprudence de la Cour relative à l’article 20 TFUE, invoquée en l’occurrence.

23      C’est dans ces conditions que le Tribunal Supremo (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Une réglementation nationale qui exclut la possibilité d’accorder un permis de séjour au parent d’un ressortissant de l’Union, mineur et dépendant de celui-ci, en raison d’antécédents pénaux dans le pays dans lequel il formule sa demande, bien que cela entraîne le départ forcé du territoire de l’Union pour le mineur, compte tenu du fait qu’il doit accompagner son parent, est-elle compatible avec l’article 20 TFUE, interprété à la lumière des arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen (C‑200/02, EU:C:2004:639), et du 8 mars 2011, Ruiz Zambrano (C‑34/09, EU:C:2011:124) ? »

 Sur la persistance du litige au principal

24      Il ressort à la fois des termes et de l’économie de l’article 267 TFUE que la procédure préjudicielle présuppose qu’un litige soit effectivement pendant devant les juridictions nationales, dans le cadre duquel elles sont appelées à rendre une décision susceptible de prendre en considération l’arrêt de la Cour rendu à titre préjudiciel (arrêt du 11 septembre 2008, UGT-Rioja e.a., C‑428/06 à C‑434/06, EU:C:2008:488, point 39 et jurisprudence citée). Partant, la Cour est susceptible de vérifier d’office la persistance du litige au principal.

25      En l’occurrence, le litige porte sur le refus d’octroyer à M. Rendón Marín un permis de séjour temporaire en Espagne, le Tribunal Supremo (Cour suprême) ayant été saisi d’un pourvoi contre l’arrêt de l’Audiencia Nacional (Cour centrale) du 21 mars 2012, qui avait rejeté le recours formé contre la décision de rejet de la demande de permis de séjour introduite par l’intéressé.

26      Or, il ressort du dossier dont dispose la Cour ainsi que des observations formulées lors de l’audience par M. Rendón Marín et le gouvernement espagnol que, après que le Tribunal Supremo (Cour suprême) a introduit la présente demande de décision préjudicielle, le requérant au principal a déposé, auprès de la représentation du gouvernement à Málaga, deux nouvelles demandes de permis de séjour temporaire pour cause de circonstances exceptionnelles, dont la seconde a été accueillie.

27      Lors de l’audience, le gouvernement espagnol a, en effet, indiqué que, le 18 février 2015, un permis de séjour temporaire avait été octroyé à M. Rendón Marín par la Subdelegación del Gobierno en Málaga (représentation du gouvernement dans la province de Málaga, Espagne). À cet égard, il ressort des observations orales de M. Rendón Marín qu’il a obtenu ce permis de séjour temporaire au titre de circonstances exceptionnelles fondées sur l’enracinement familial, en vertu des articles 124 et 128 du décret royal 557/2011, en raison du retrait de la mention des antécédents pénaux dans son casier judiciaire (cancelación), par l’autorité espagnole compétente.

28      Dans ces conditions, la juridiction de renvoi a été invitée à indiquer à la Cour si elle considérait qu’une réponse de la Cour lui était encore nécessaire pour statuer.

29      Par une lettre du 9 mars 2016, la juridiction de renvoi a constaté que la demande formulée dans le recours contentieux administratif visant à l’obtention d’un permis de séjour temporaire avait été satisfaite par la décision rendue, le 18 février 2015, par la représentation du gouvernement dans la province de Málaga, mais elle a indiqué qu’elle souhaitait maintenir sa demande de décision préjudicielle.

30      En effet, selon la juridiction de renvoi, l’octroi à M. Rendón Marín d’un permis de séjour au mois de février 2015 n’équivaut pas à une pleine satisfaction des demandes formulées dans le cadre du recours au principal. Elle estime, en effet, que, si ledit recours contentieux administratif avait été accueilli, la décision attaquée du 13 juillet 2010, rejetant la demande de permis de séjour de l’intéressé, aurait été déclarée illégale et l’octroi d’un tel permis en résultant aurait produit des effets à compter de cette date. Or, la nullité de cette décision et l’octroi d’un permis de séjour à ladite date pourraient avoir, pour le requérant au principal, des conséquences dépassant cet octroi lui-même, telles qu’une indemnisation en raison de la perte de contrats de travail, de prestations sociales ou de cotisations à la sécurité sociale voire, le cas échéant, le droit d’acquérir la nationalité espagnole.

31      Il y a donc lieu de constater que le litige au principal est toujours pendant devant la juridiction de renvoi et qu’une réponse de la Cour à la question posée demeure utile pour la solution de ce litige.

32      Partant, il y a lieu de statuer sur la demande de décision préjudicielle.

 Sur la question préjudicielle

33      Dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises. En effet, la Cour a pour mission d’interpréter toutes les dispositions du droit de l’Union dont les juridictions nationales ont besoin afin de statuer sur les litiges qui leur sont soumis, même si ces dispositions ne sont pas indiquées expressément dans les questions qui lui sont adressées par ces juridictions (voir, notamment, arrêts du 14 octobre 2010, Fuß, C‑243/09, EU:C:2010:609, point 39 ; du 30 mai 2013, Worten, C‑342/12, EU:C:2013:355, point 30, et du 19 septembre 2013, Betriu Montull, C‑5/12, EU:C:2013:571, point 40).

34      En conséquence, même si la juridiction de renvoi a limité sa question à l’interprétation de l’article 20 TFUE, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la Cour lui fournisse tous les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui peuvent être utiles au jugement de l’affaire dont elle est saisie, que cette juridiction y ait fait référence ou non dans l’énoncé de sa question. Il appartient, à cet égard, à la Cour d’extraire de l’ensemble des éléments fournis par la juridiction nationale, et notamment de la motivation de la décision de renvoi, les éléments dudit droit qui appellent une interprétation compte tenu de l’objet du litige (voir, notamment, arrêts du 14 octobre 2010, Fuß, C‑243/09, EU:C:2010:609, point 40 ; du 30 mai 2013, Worten, C‑342/12, EU:C:2013:355, point 31, et du 19 septembre 2013, Betriu Montull, C‑5/12, EU:C:2013:571, point 41).

35      À la lumière de cette jurisprudence et compte tenu des éléments figurant dans la décision de renvoi, il y a lieu de reformuler la question posée en ce sens que, par celle-ci, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 21 TFUE et la directive 2004/38, d’une part, ainsi que l’article 20 TFUE, d’autre part, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique à un ressortissant d’un État tiers l’octroi d’un permis de séjour sur le territoire de l’État membre concerné lorsque ce ressortissant a des antécédents pénaux, alors même que l’intéressé a à sa charge exclusive deux enfants mineurs, citoyens de l’Union, qui séjournent avec lui dans cet État membre depuis leur naissance, sans avoir exercé leur droit de libre circulation, et que ce refus a pour conséquence d’imposer à ces enfants de quitter le territoire de l’Union.

36      À cet égard, il importe d’emblée de rappeler que les éventuels droits qui sont accordés aux ressortissants d’États tiers par les dispositions du droit de l’Union concernant la citoyenneté de l’Union sont, non pas des droits propres, mais des droits dérivés de l’exercice de la liberté de circulation et de séjour par un citoyen de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2013, Ymeraga e.a., C‑87/12, EU:C:2013:291, point 35 ; du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 22, et du 12 mars 2014, O. et B., C‑456/12, EU:C:2014:135, point 36 ainsi que jurisprudence citée). Ainsi, un droit de séjour dérivé en faveur d’un ressortissant d’un État tiers n’existe, en principe, que lorsqu’il est nécessaire pour assurer l’exercice effectif par un citoyen de l’Union de ses droits de circuler et de séjourner librement dans celle-ci.

37      Dans ce contexte, il convient d’examiner le point de savoir si un ressortissant d’un État tiers, tel que M. Rendón Marín, est susceptible de jouir d’un droit de séjour dérivé, fondé, soit sur l’article 21 TFUE et la directive 2004/38, soit sur l’article 20 TFUE, et, le cas échéant, si ses antécédents pénaux sont susceptibles de justifier une limitation de ce droit.

 Sur l’article 21 TFUE et la directive 2004/38

 Sur l’existence d’un droit de séjour dérivé, fondé sur l’article 21 TFUE et la directive 2004/38

38      L’article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38 définit comme « bénéficiaires » des droits conférés par celle-ci « tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi [que les] membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent ».

39      En l’occurrence, M. Rendón Marín est un ressortissant d’un État tiers, père de citoyens de l’Union mineurs, dont il a la garde exclusive et qui ont toujours séjourné dans le même État membre, à savoir le Royaume d’Espagne.

40      Le fils de M. Rendón Marín, qui est un enfant mineur, n’ayant jamais fait usage de son droit de libre circulation et ayant toujours séjourné dans l’État membre dont il possède la nationalité, il y a lieu de constater que cet enfant ne relève pas de la notion de « bénéficiaire », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38, de telle sorte que cette dernière ne lui est pas applicable (arrêts du 15 novembre 2011, Dereci e.a., C‑256/11, EU:C:2011:734, point 57, et du 6 décembre 2012, O e.a., C‑356/11 et C‑357/11, EU:C:2012:776, point 42).

41      En revanche, comme l’ont fait valoir les gouvernements espagnol, grec, italien et polonais ainsi que la Commission, la fille de M. Rendón Marín, enfant mineure de nationalité polonaise qui séjourne depuis sa naissance en Espagne, relève de la notion de « bénéficiaire », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38.

42      En effet, la Cour a souligné que la situation, dans l’État membre d’accueil, du ressortissant d’un autre État membre qui est né dans l’État membre d’accueil et qui n’a pas fait usage du droit à la libre circulation ne saurait, de ce seul fait, être assimilée à une situation purement interne privant ledit ressortissant du bénéfice, dans l’État membre d’accueil, des dispositions du droit de l’Union en matière de libre circulation et de séjour des personnes (voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 19).

43      Il s’ensuit que la fille de M. Rendón Marín est en droit de se prévaloir de l’article 21, paragraphe 1, TFUE et des dispositions prises pour son application (voir, en ce sens, arrêt du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 26).

44      Dans ces circonstances, l’article 21, paragraphe 1, TFUE et la directive 2004/38 confèrent, en principe, un droit de séjour en Espagne à la fille de M. Rendón Marín.

45      Toutefois, selon la Cour, ce droit de séjour des citoyens de l’Union sur le territoire d’un État membre autre que celui dont ils possèdent la nationalité est reconnu sous réserve des limitations et des conditions prévues par le traité FUE ainsi que par les dispositions prises pour son application (arrêt du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 26), l’application de ces limitations et conditions devant être faite dans le respect des limites imposées par le droit de l’Union et conformément aux principes généraux de ce droit, notamment, au principe de proportionnalité (voir en ce sens, notamment, arrêts du 17 septembre 2002, Baumbast et R, C‑413/99, EU:C:2002:493, point 91, et du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 32).

46      En ce qui concerne ces conditions, il convient de préciser que tout citoyen de l’Union a le droit de séjourner sur le territoire d’un État membre autre que celui dont il possède la nationalité pour une durée de plus de trois mois si, en particulier, il dispose, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 2004/38, pour lui et pour les membres de sa famille, de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil au cours de son séjour et d’une assurance maladie complète dans l’État membre d’accueil.

47      À moins que la fille de M. Rendón Marín n’ait acquis un droit de séjour permanent en Espagne, en vertu de l’article 16, paragraphe 1, de la directive 2004/38, auquel cas son droit de séjour ne serait pas soumis aux conditions prévues au chapitre III de cette directive et, notamment, à celles énoncées à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de celle-ci, un droit de séjour ne peut lui être accordé que si elle remplit les conditions fixées à cet article 7, paragraphe 1, sous b).

48      À cet égard, la Cour a déjà jugé que, si le citoyen de l’Union doit disposer de ressources suffisantes, le droit de l’Union ne comporte toutefois pas la moindre exigence quant à la provenance de celles-ci, ces dernières pouvant être fournies, notamment, par le ressortissant d’un État tiers, parent des citoyens mineurs concernés (voir, en ce sens, arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 30, ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 27).

49      En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que les enfants de M. Rendón Marín reçoivent des soins et une éducation scolaire adéquats. Le gouvernement espagnol a en outre précisé lors de l’audience que, en vertu de la législation espagnole, M. Rendón Marín bénéficie d’une assurance maladie pour lui et ses enfants. Cela étant, il incombe à la juridiction de renvoi d’établir si la fille de M. Rendón Marín dispose, par elle-même ou par l’intermédiaire de son père, de ressources suffisantes et d’une assurance maladie complète, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 2004/38.

50      S’agissant de la question de savoir si M. Rendón Marín, ressortissant d’un État tiers, peut, en tant qu’ascendant direct d’une citoyenne de l’Union qui bénéficierait d’un droit de séjour en vertu de la directive 2004/38, se prévaloir d’un droit de séjour dérivé, il ressort de la jurisprudence de la Cour que la qualité de membre de la famille « à charge » du citoyen de l’Union titulaire du droit de séjour résulte d’une situation de fait caractérisée par la circonstance que le soutien matériel du membre de la famille est assuré par le titulaire du droit de séjour, de telle sorte que, quand c’est la situation inverse qui, comme en l’occurrence, se présente, à savoir que le titulaire du droit de séjour est à la charge du ressortissant d’un État tiers, ce dernier ne saurait se prévaloir de la qualité d’ascendant « à charge » dudit titulaire, au sens de la directive 2004/38, en vue de bénéficier d’un droit de séjour dans l’État membre d’accueil (voir, en ce sens, arrêt du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 25).

51      Cependant, le refus de permettre au parent, ressortissant d’un État tiers, qui a effectivement la garde d’un citoyen de l’Union mineur, de séjourner avec ce citoyen dans l’État membre d’accueil priverait de tout effet utile le droit de séjour de celui-ci, étant donné que la jouissance du droit de séjour par un enfant mineur implique nécessairement que cet enfant ait le droit d’être accompagné par la personne assurant effectivement sa garde et, dès lors, que cette personne soit en mesure de résider avec lui dans l’État membre d’accueil pendant ce séjour (voir arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 45, ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 28).

52      Ainsi, si l’article 21 TFUE et la directive 2004/38 confèrent un droit de séjour dans l’État membre d’accueil au ressortissant mineur d’un autre État membre qui remplit les conditions fixées à l’article 7, paragraphe 1, sous b), de cette directive, ces mêmes dispositions permettent au parent qui a effectivement la garde de ce ressortissant de séjourner avec celui-ci dans l’État membre d’accueil (arrêts du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, points 46 et 47, ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 29).

53      Abstraction faite de l’hypothèse envisagée au point 47 du présent arrêt, si, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ainsi qu’il a été souligné au point 49 du même arrêt, la fille de M. Rendón Marín remplit les conditions fixées à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2004/38 pour pouvoir bénéficier d’un droit de séjour en Espagne sur le fondement de l’article 21 TFUE et de cette directive, ces derniers doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent, en principe, à ce qu’un droit de séjour dérivé sur le territoire de cet État membre soit refusé à M. Rendón Marín.

 Sur l’incidence d’antécédents pénaux sur la reconnaissance d’un droit de séjour dérivé compte tenu des articles 27 et 28 de la directive 2004/38

54      Il convient à présent d’examiner le point de savoir si l’éventuel droit de séjour dérivé de M. Rendón Marín peut être limité par une réglementation nationale telle que celle en cause au principal.

55      À cet égard, il importe de rappeler que le droit de séjour dans l’Union des citoyens de l’Union et des membres de leur famille n’est pas inconditionnel, mais peut être assorti des limitations et des conditions prévues par le traité ainsi que par les dispositions prises pour son application (voir, notamment, arrêt du 10 juillet 2008, Jipa, C‑33/07, EU:C:2008:396, point 21 et jurisprudence citée).

56      Il convient également de relever que, selon le considérant 23 de la directive 2004/38, l’éloignement des citoyens de l’Union et des membres de leur famille pour des raisons d’ordre public ou de sécurité publique constitue une mesure pouvant nuire gravement aux personnes qui, ayant fait usage des droits et des libertés conférés par le traité, se sont véritablement intégrées dans l’État membre d’accueil. Pour cette raison, ainsi qu’il ressort du considérant 24 de la directive 2004/38, celle-ci met en place un régime de protection à l’encontre des mesures d’éloignement, qui est fondé sur le degré d’intégration des personnes concernées dans l’État membre d’accueil, de telle sorte que plus l’intégration des citoyens de l’Union et des membres de leur famille est forte dans l’État membre d’accueil et plus forte devrait être la protection de ceux-ci contre l’éloignement (arrêt du 23 novembre 2010, Tsakouridis, C‑145/09, EU:C:2010:708, points 24 et 25).

57      En ce qui concerne l’affaire au principal, les limitations au droit de séjour découlent, en particulier, de l’article 27, paragraphe 1, de la directive 2004/38, disposition qui permet aux États membres de restreindre le droit de séjour des citoyens de l’Union ou des membres de leurs familles, quelle que soit leur nationalité, pour des raisons, notamment, d’ordre public ou de sécurité publique (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2008, Jipa, C‑33/07, EU:C:2008:396, point 22).

58      Il est de jurisprudence constante que l’exception d’ordre public constitue une dérogation au droit de séjour des citoyens de l’Union ou des membres de leurs familles, devant être entendue strictement et dont la portée ne saurait être déterminée unilatéralement par les États membres (voir, en ce sens, arrêts du 4 décembre 1974, van Duyn, 41/74, EU:C:1974:133, point 18 ; du 27 octobre 1977, Bouchereau, 30/77, EU:C:1977:172, point 33 ; du 29 avril 2004, Orfanopoulos et Oliveri, C‑482/01 et C‑493/01, EU:C:2004:262, point 65 ; du 27 avril 2006, Commission/Allemagne, C‑441/02, EU:C:2006:253, point 34, ainsi que du 7 juin 2007, Commission/Pays-Bas, C‑50/06, EU:C:2007:325, point 42).

59      Ainsi qu’il ressort de l’article 27, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 2004/38, pour être justifiées, les mesures de restriction du droit de séjour d’un citoyen de l’Union ou d’un membre de sa famille, notamment celles d’ordre public, doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l’individu concerné.

60      Il y a lieu d’ajouter que l’article 27, paragraphe 2, de cette directive souligne que l’existence de condamnations péacute;nales antérieures ne peut à elle seule motiver des mesures d’ordre public ou de sécurité publique, que le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle et actuelle pour un intérêt fondamental de la société ou de l’État membre concerné, et que des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Jipa, C‑33/07, EU:C:2008:396, points 23 et 24, ainsi que du 23 novembre 2010, Tsakouridis, C‑145/09, EU:C:2010:708, point 48).

61      Il s’ensuit que le droit de l’Union s’oppose à une limitation du droit de séjour fondée sur des motifs de prévention générale et décidée dans un but de dissuasion à l’égard d’autres étrangers, en particulier lorsque cette mesure a été prononcée d’une manière automatique à la suite d’une condamnation pénale, sans tenir compte du comportement personnel de l’auteur de l’infraction ni du danger qu’il représente pour l’ordre public (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2006, Commission/Allemagne, C‑441/02, EU:C:2006:253, point 93 et jurisprudence citée).

62      Ainsi, pour apprécier si une mesure d’éloignement est proportionnée au but légitime poursuivi, en l’occurrence la protection de l’ordre public ou de la sécurité publique, il convient de prendre en compte les critères énoncés à l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2004/38, à savoir la durée du séjour de l’intéressé sur le territoire de l’État membre d’accueil, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle dans l’État membre d’accueil et l’intensité de ses liens avec son pays d’origine. Il importe que le degré de gravité de l’infraction soit également pris en considération dans le cadre du principe de proportionnalité.

63      Or, il convient de relever que la réglementation en cause au principal subordonne de manière automatique, et sans aucune possibilité de dérogation, l’obtention d’un permis de séjour initial à l’absence d’antécédents pénaux en Espagne ou dans les pays dans lesquels la personne concernée a précédemment séjourné.

64      En l’occurrence, la décision de renvoi indique que, en application de cette réglementation, la demande de permis de séjour temporaire au titre de circonstances exceptionnelles présentée par M. Rendón Marín le 18 février 2010 a été rejetée en raison de l’existence d’antécédents pénaux. Le permis de séjour demandé a ainsi été refusé de manière automatique, sans prise en compte de la situation particulière du requérant au principal, c’est-à-dire sans évaluation de son comportement personnel ni de l’éventuel danger actuel que l’intéressé pouvait représenter pour l’ordre public ou la sécurité publique.

65      S’agissant de l’appréciation des circonstances pertinentes en l’occurrence, il ressort du dossier dont dispose la Cour que M. Rendón Marín a été condamné pour un délit commis pendant l’année 2005. Cette condamnation pénale antérieure ne saurait, à elle seule, motiver un refus de permis de séjour. Alors que le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société et que la Cour a souligné que la condition relative à l’existence d’une menace actuelle doit, en principe, être remplie au moment où intervient la mesure en cause (voir, notamment, arrêt du 27 octobre 1977, Bouchereau, 30/77, EU:C:1977:172, point 28), tel ne semble pas être le cas en l’occurrence, dès lors que la peine d’emprisonnement à laquelle M. Rendón Marín a été condamné a été suspendue et ne semble pas avoir été exécutée.

66      En ce qui concerne, par ailleurs, l’éventuel éloignement de M. Rendón Marín, il importe, d’une part, de tenir compte des droits fondamentaux dont la Cour assure le respect, en particulier le droit au respect de la vie privée et familiale, tel qu’il est énoncé à l’article 7 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») (voir, en ce sens, arrêt du 23 novembre 2010, Tsakouridis, C‑145/09, EU:C:2010:708, point 52) et, d’autre part, de respecter le principe de proportionnalité. Cet article 7 de la Charte doit être lu en corrélation avec l’obligation de prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant, reconnu à l’article 24, paragraphe 2, de la Charte (voir, en ce sens, arrêt du 23 décembre 2009, Detiček, C‑403/09 PPU, EU:C:2009:810, points 53 et 54).

67      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, l’article 21 TFUE et la directive 2004/38 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique l’octroi d’un permis de séjour au ressortissant d’un État tiers, parent d’un enfant mineur citoyen de l’Union qui est à sa charge et qui réside avec lui dans l’État membre d’accueil, au seul motif qu’il a des antécédents pénaux.

 Sur l’article 20 TFUE

 Sur l’existence d’un droit de séjour dérivé au titre de l’article 20 TFUE

68      Dans l’hypothèse où la juridiction de renvoi parviendrait, lors du contrôle des conditions énoncées à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2004/38, à la conclusion que ces conditions ne sont pas remplies, et, en tout état de cause, pour ce qui est du fils de M. Rendón Marín, enfant mineur, qui a toujours résidé dans l’État membre dont il a la nationalité, il convient d’examiner le point de savoir si un droit de séjour dérivé en faveur de M. Rendón Marín peut, le cas échéant, être fondé sur l’article 20 TFUE.

69      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence constante de la Cour, l’article 20 TFUE confère à toute personne ayant la nationalité d’un État membre le statut de citoyen de l’Union, lequel a vocation à être le statut fondamental des ressortissants des États membres (voir arrêt du 30 juin 2016, NA, C‑115/15, EU:C:2016:487, point 70 et jurisprudence citée).

70      La citoyenneté de l’Union confère à chaque citoyen de l’Union un droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et des restrictions fixées par le traité et des mesures adoptées en vue de leur application (voir, en ce sens, arrêts du 7 octobre 2010, Lassal, C‑162/09, EU:C:2010:592, point 29, et du 16 octobre 2012, Hongrie/Slovaquie, C‑364/10, EU:C:2012:630, point 43).

71      Ainsi que la Cour l’a jugé au point 42 de l’arrêt du 8 mars 2011, Ruiz Zambrano (C‑34/09, EU:C:2011:124), l’article 20 TFUE s’oppose à des mesures nationales ayant pour effet de priver les citoyens de l’Union de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par leur statut de citoyen de l’Union.

72      En revanche, les dispositions du traité concernant la citoyenneté de l’Union ne confèrent aucun droit autonome aux ressortissants d’États tiers (arrêts du 8 novembre 2012, Iida, C‑40/11, EU:C:2012:691, point 66, et du 8 mai 2013, Ymeraga e.a., C‑87/12, EU:C:2013:291, point 34).

73      En effet, ainsi qu’il a été rappelé au point 36 du présent arrêt, les éventuels droits conférés aux ressortissants d’États tiers par les dispositions du traité concernant la citoyenneté de l’Union sont non pas des droits propres auxdits ressortissants, mais des droits dérivés de ceux dont jouit le citoyen de l’Union. La finalité et la justification desdits droits dérivés se fondent sur la constatation que le refus de leur reconnaissance est de nature à porter atteinte, notamment, à la liberté de circulation du citoyen de l’Union (arrêts du 8 novembre 2012, Iida, C‑40/11, EU:C:2012:691, points 67 et 68, ainsi que du 8 mai 2013, Ymeraga e.a., C‑87/12, EU:C:2013:291, point 35).

74      À cet égard, la Cour a déjà constaté qu’il existe des situations très particulières dans lesquelles, en dépit du fait que le droit secondaire relatif au droit de séjour des ressortissants d’États tiers n’est pas applicable et que le citoyen de l’Union concerné n’a pas fait usage de sa liberté de circulation, un droit de séjour doit néanmoins être accordé à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille dudit citoyen, sous peine de méconnaître l’effet utile de la citoyenneté de l’Union, si, comme conséquence du refus d’un tel droit, ce citoyen se voyait obligé, en fait, de quitter le territoire de l’Union pris dans son ensemble, en le privant ainsi de la jouissance effective de l’essentiel des droits conférés par ce statut (voir, en ce sens, arrêts du 8 mars 2011, Ruiz Zambrano, C‑34/09, EU:C:2011:124, points 43 et 44 ; du 15 novembre 2011, Dereci e.a., C‑256/11, EU:C:2011:734, points 66 et 67 ; du 8 novembre 2012, Iida, C‑40/11, EU:C:2012:691, point 71 ; du 8 mai 2013, Ymeraga e.a., C‑87/12, EU:C:2013:291, point 36, ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 32).

75      Les situations susmentionnées sont caractérisées par le fait que, même si elles sont régies par des réglementations relevant a priori de la compétence des États membres, à savoir celles concernant le droit d’entrée et de séjour des ressortissants d’États tiers en dehors du champ d’application des dispositions du droit dérivé, qui, sous certaines conditions, prévoient l’attribution d’un tel droit, ces situations ont toutefois un rapport intrinsèque avec la liberté de circulation et de séjour d’un citoyen de l’Union, qui s’oppose à ce que ce droit d’entrée et de séjour soit refusé auxdits ressortissants dans l’État membre où réside ce citoyen, afin de ne pas porter atteinte à cette liberté (voir, en ce sens, arrêts du 8 novembre 2012, Iida, C‑40/11, EU:C:2012:691, point 72, et du 8 mai 2013, Ymeraga e.a., C‑87/12, EU:C:2013:291, point 37).

76      En l’occurrence, les enfants de M. Rendón Marín, possédant la nationalité d’un État membre, à savoir, respectivement, les nationalités espagnole et polonaise, bénéficient du statut de citoyen de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 2 octobre 2003, Garcia Avello, C‑148/02, EU:C:2003:539, point 21, ainsi que du 19 octobre 2004, Zhu et Chen, C‑200/02, EU:C:2004:639, point 25).

77      Partant, en tant que citoyens de l’Union, les enfants de M. Rendón Marín ont le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire de l’Union, et toute limitation de ce droit relève du champ d’application du droit de l’Union.

78      Ainsi, si, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, le refus de séjour opposé à M. Rendón Marín, ressortissant d’un État tiers, à la garde exclusive duquel ces enfants ont été confiés, conduisait l’intéressé à devoir quitter le territoire de l’Union, il pourrait en résulter une restriction dudit droit, en particulier du droit de séjour, lesdits enfants pouvant être contraints d’accompagner M. Rendón Marín et donc de quitter le territoire de l’Union pris dans son ensemble. L’obligation éventuelle, pour leur père, de quitter le territoire de l’Union les priverait ainsi de la jouissance effective de l’essentiel des droits que leur confère pourtant leur statut de citoyen de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2011, Dereci e.a., C‑256/11, EU:C:2011:734, point 67 ; du 8 novembre 2012, Iida, C‑40/11, EU:C:2012:691, point 71 ; du 8 mai 2013, Ymeraga e.a., C‑87/12, EU:C:2013:291, point 36, ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, point 32).

79      Plusieurs États membres ayant présenté des observations ont soutenu que M. Rendón Marín et ses enfants pourraient se rendre en Pologne, État membre de la nationalité de sa fille. De son côté, M. Rendón Marín a affirmé, à l’audience, qu’il n’entretient aucun lien avec la famille de la mère de sa fille, qui, selon lui, ne réside pas en Pologne, et que ni lui ni ses enfants ne connaissent la langue polonaise. À cet égard, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si, eu égard à l’ensemble des circonstances de l’affaire au principal, M. Rendón Marín, en tant que parent exerçant seul la garde effective de ses enfants, est susceptible, le cas échéant, de bénéficier effectivement du droit dérivé de les accompagner et de séjourner avec eux en Pologne, de sorte qu’un refus des autorités espagnoles de lui accorder un droit de séjour n’aurait pas pour conséquence d’obliger les enfants de l’intéressé à quitter le territoire de l’Union pris dans son ensemble (voir, en ce sens, arrêt du 10 octobre 2013, Alokpa et Moudoulou, C‑86/12, EU:C:2013:645, points 34 et 35).

80      Sous réserve des vérifications mentionnées aux points 78 et 79 du présent arrêt, il apparaît ressortir des informations dont dispose la Cour que la situation en cause au principal est susceptible d’entraîner, pour les enfants de M. Rendón Marin, la privation de la jouissance effective de l’essentiel des droits que leur confère le statut de citoyen de l’Union, et que, partant, elle relève du champ d’application du droit de l’Union.

 Sur la possibilité d’introduire des limitations à un droit de séjour dérivé découlant de l’article 20 TFUE

81      Il convient de souligner que l’article 20 TFUE n’affecte pas la possibilité pour les États membres d’invoquer une exception liée, notamment, au maintien de l’ordre public et à la sauvegarde de la sécurité publique. Cela étant, dans la mesure où la situation de M. Rendón Marín relève du champ d’application du droit de l’Union, l’appréciation de celle-ci doit tenir compte du droit au respect de la vie privée et familiale, tel qu’il est énoncé à l’article 7 de la Charte, cet article devant être lu, ainsi qu’il a été rappelé au point 66 du présent arrêt, en corrélation avec l’obligation de prendre en considération l’intérêt supérieur de l’enfant, reconnu à l’article 24, paragraphe 2, de la Charte.

82      De plus, ainsi qu’il a été rappelé au point 58 du présent arrêt, en tant que justification d’une dérogation au droit de séjour des citoyens de l’Union ou des membres de leurs familles, les notions d’« ordre public » et de « sécurité publique » doivent être entendues strictement, de telle sorte que leur portée ne saurait être déterminée unilatéralement par les États membres sans contrôle des institutions de l’Union.

83      La Cour a ainsi jugé que la notion d’« ordre public » suppose, en tout état de cause, l’existence, en dehors du trouble pour l’ordre social que constitue toute infraction à la loi, d’une menace réelle, actuelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société. Quant à la notion de « sécurité publique », il ressort de la jurisprudence de la Cour que cette notion couvre la sécurité intérieure d’un État membre et sa sécurité extérieure et que, partant, l’atteinte au fonctionnement des institutions et des services publics essentiels ainsi que la survie de la population, de même que le risque d’une perturbation grave des relations extérieures ou de la coexistence pacifique des peuples, ou encore l’atteinte aux intérêts militaires, peuvent affecter la sécurité publique (voir, en ce sens, arrêts du 23 novembre 2010, Tsakouridis, C‑145/09, EU:C:2010:708, points 43 et 44, ainsi que du 15 février 2016, N., C‑601/15 PPU, EU:C:2016:84, points 65 et 66).

84      Dans ce contexte, il y a lieu de considérer que, dès lors que le refus du droit de séjour est fondé sur l’existence d’une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour l’ordre public ou la sécurité publique, compte tenu des infractions pénales commises par un ressortissant d’un État tiers ayant la garde exclusive d’enfants, citoyens de l’Union, un tel refus serait conforme au droit de l’Union.

85      En revanche, cette conclusion ne saurait être tirée de manière automatique sur la seule base des antécédents pénaux de l’intéressé. Elle ne saurait découler, le cas échéant, que d’une appréciation concrète, par la juridiction de renvoi, de l’ensemble des circonstances actuelles et pertinentes de l’espèce, à la lumière du principe de proportionnalité, de l’intérêt supérieur de l’enfant et des droits fondamentaux dont la Cour assure le respect.

86      Cette appréciation doit ainsi notamment prendre en considération le comportement personnel de l’individu concerné, la durée et le caractère légal du séjour de l’intéressé sur le territoire de l’État membre concerné, la nature et la gravité de l’infraction commise, le degré de dangerosité actuel de l’intéressé pour la société, l’âge des enfants en cause et leur état de santé, ainsi que leur situation familiale et économique.

87      Il s’ensuit que l’article 20 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique l’octroi d’un permis de séjour au ressortissant d’un État tiers, parent d’enfants mineurs citoyens de l’Union dont il assure la garde exclusive, au seul motif que l’intéressé a des antécédents pénaux, lorsque ledit refus a pour conséquence d’imposer à ces enfants de quitter le territoire de l’Union.

88      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée de la manière suivante :

–        l’article 21 TFUE et la directive 2004/38 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique l’octroi d’un permis de séjour au ressortissant d’un État tiers, parent d’un enfant mineur citoyen de l’Union, ressortissant d’un État membre autre que l’État membre d’accueil, qui est à sa charge et qui réside avec lui dans l’État membre d’accueil, au seul motif qu’il a des antécédents pénaux ;

–        l’article 20 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à cette même réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique l’octroi d’un permis de séjour au ressortissant d’un État tiers, parent d’enfants mineurs citoyens de l’Union et dont il assure la garde exclusive, au seul motif qu’il a des antécédents pénaux, lorsque ce refus a pour conséquence d’imposer à ces enfants de quitter le territoire de l’Union.

 Sur les dépens

89      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit :

L’article 21 TFUE et la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique l’octroi d’un permis de séjour au ressortissant d’un État tiers, parent d’un enfant mineur citoyen de l’Union, ressortissant d’un État membre autre que l’État membre d’accueil, qui est à sa charge et qui réside avec lui dans l’État membre d’accueil, au seul motif qu’il a des antécédents pénaux.

L’article 20 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à cette même réglementation nationale imposant de refuser de manière automatique l’octroi d’un permis de séjour au ressortissant d’un État tiers, parent d’enfants mineurs citoyens de l’Union et dont il assure la garde exclusive, au seul motif qu’il a des antécédents pénaux, lorsque ce refus a pour conséquence d’imposer à ces enfants de quitter le territoire de l’Union européenne.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.

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