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Communication de la Commission européenne du 7 mai 2002 : Vers une gestion intégrée des frontières extérieures des états membres de l'Union europénne, COM/2002/0233 final

 

Communication de la Commission européenne du 7 mai 2005 : Vers une gestion intégrée des frontières extérieures des états membres de l'Union europénne

 

COM/2002/0233 final


I. INTRODUCTION

 

L'environnement politique et institutionnel:

1. Aux termes des conclusions du Conseil européen de Laeken des 14 et 15 décembre 2001:

«Une meilleure gestion du contrôle aux frontières extérieures de l'Union contribuera à lutter contre le terrorisme, les filières d'immigration illégale et la traite des être humains. Le Conseil européen demande au Conseil et à la Commission de définir les mécanismes de coopération entre les services chargés du contrôle des frontières extérieures et d'étudier les conditions dans lesquelles pourrait être créé un mécanisme ou des services communs de contrôle des frontières extérieures (...)". [1]

[1] Conclusion n° 42 du Conseil européen de Laeken des 14 et 15 décembre 2001.

Cette conclusion du Conseil européen rappelle qu'une gestion cohérente, efficace et commune des frontières extérieures des Etats membres de l'Union renforcera la sécurité et le sentiment des citoyens d'appartenance à un espace et à une destinée partagés. Cette conclusion s'inscrit dans la continuité de l'action entreprise pour lutter contre le terrorisme, les filières d'immigration illégale et la traite des êtres humains [2]. Le Conseil européen souligne aussi à cette occasion la très forte complémentarité des diverses tâches qui sont exercées lors du contrôle et de la surveillance du franchissement des frontières extérieures alors même que du point de vue institutionnel de l'Union certaines de ces tâches sont réparties entre le premier et le troisième pilier.

[2] Communication de la Commission sur l'immigration illégale (COM)(2001) 672 du 15 novembre 2001.et discours du Présidence Prodi devant le Collège d'Europe a Bruges, en novembre 2001.

Il ne fait pas de doute par exemple que le franchissement des frontières extérieures par les personnes est une matière régie par le droit communautaire au titre IV du TCE. Il ne fait pas de doute non plus que l'arrestation d'une personne recherchée par la justice ou l'interpellation d'une personne menaçant l'ordre public sont des matières relevant du troisième pilier. Dans l'action quotidienne, il peut arriver cependant que les autorités de contrôle des frontières extérieures doivent exercer ces deux tâches simultanément: le contrôle d'entrée sur le territoire commence toujours par le contrôle des passeports et visas, tâches fixées par le droit communautaire, mais le contrôle d'entrée peut conduire à exercer une tâche de nature policière ou judiciaire s'il apparaît que la personne est recherchée ou constitue une menace pour la sécurité.

2. Les potentialités issues de l'Acte Unique Européen, du traité de Maastricht et du "laboratoire de Schengen" ont abouti au traité d'Amsterdam et aux protocoles y annexés. Le premier mai 1999, les réalisations juridiques et l'expérience opérationnelle de l'acquis de Schengen ont été incorporées dans le cadre institutionnel de l'Union Européenne. Les dispositifs essentiels de cet acquis relatif au franchissement des frontières extérieures par les personnes ont été intégrés au titre IV du TCE, alors que d'autres dispositions concernant les mesures compensatoires dans le domaine de la sécurité ont été intégrées au Titre VI du TUE. Qu'il s'agisse de mesures de sécurité du premier pilier, comme le renforcement des contrôles aux frontières extérieures communes [3], ou du troisième pilier, comme la coopération policière et judiciaire à l'intérieur de l'espace de libre circulation [4], elles sont complémentaires et doivent progresser ensemble. C'est la finalité même de l'espace de liberté, de sécurité et de justice instauré par le traité d'Amsterdam.

[3] Sur la base du titre IV du TCE et en premier lieu l'article 62.

[4] L'article 61 du TCE fait référence à des "mesures dans le domaine de la coopération policière et judiciaire (...) conformément aux dispositions du traité sur l'Union européenne". Par ailleurs, l'article 29 du TUE prévoit "un niveau élevé de protection dans un "espace de liberté, de sécurité et de justice", grâce notamment "à une coopération plus étroite entre les forces de police, les autorités douanières et les autres autorités compétentes dans les Etats membres (...)".

Intégré dans l'Union européenne, l'acquis législatif et opérationnel de Schengen n'a été ni modifié ni altéré, mais il a simplement reçu de nouvelles bases juridiques [5]. Cela signifie concrètement que:

[5] La Décision du Conseil n° 1999/435/CE du 20 mai 1999 relative à la définition de l'acquis de Schengen (publication au Journal officiel n° L 176 du 10 juillet 1999, pages 1 à 16), recense l'ensemble des dispositions considérées comme appartenant juridiquement à l'acquis de Schengen en vigueur.

- les dispositions de l'acquis ont à présent la valeur juridico-institutionnelle qui leur a été attribuée par la nouvelle base juridique au titre IV du TCE ou au titre VI du TUE;

- la répartition de l'acquis Schengen entre le titre IV du TCE et le titre VI du TUE détermine les procédures institutionnelles requises pour modifier ou développer l'acquis; mais cette répartition ne préjuge ni de la nature, ni du statut, ni de l'organisation des forces nationales que chaque Etat membre désigne pour appliquer telle ou telle disposition de l'acquis de Schengen en matière de contrôles aux frontières extérieures.

Pour lever des malentendus qui subsistent parfois, on doit insister sur la distinction entre ces deux notions: d'une part la source des normes juridiques et d'autre part l'organisation du travail des autorités nationales concernées.

3. L'acquis actuel de l'Union en matière de frontières extérieures s'est développé grandement dans le cadre de Schengen et sous le titre IV du TCE. En développant une stratégie globale pour les frontières extérieures de l'Union, il est à noter que le Royaume-Uni et l'Irlande ne participent pas automatiquement à l'acquis de Schengen ni au titre IV, et qu'ils sont autorisés à maintenir des contrôles sur les personnes entrant sur leur territoire en provenance des autres Etats membres. Réciproquement les autres Etats membres sont autorisés à maintenir des contrôles sur les personnes entrant sur leur territoire "en provenance du Royaume-Uni ou de tout territoire dont les relations extérieures relèvent de sa responsabilité", ainsi que sur les personnes en provenance d'Irlande.

Ces deux Etats membres participent toutefois à toute la coopération du titre VI du TUE et ils ont à présent choisi de participer aux aspects de coopération policière et judiciaire de l'acquis Schengen, y compris certaines mesures de lutte contre l'immigration illégale. Ces deux Etats membres ont également désiré participer dans ce domaine aux actions de la Communauté sous le titre IV, telles que la responsabilité des transporteurs, l'action contre l'aide à l'entrée, au transit ou au séjour illégal sur le territoire, des accords de réadmission avec des pays tiers et des mesures pour renforcer la sécurité des visas.

Nonobstant la position particulière du Royaume-Uni et de l'Irlande, il est admis que l'action pour renforcer les frontières extérieures de l'Union revêt un intérêt pour tous les Etats membres. Des frontières vulnérables, la nécessité de développer des infrastructures dans les pays candidats et dans des pays tiers pour traiter l'immigration illégale ainsi que les risques de criminalité organisée et de terrorisme ont une retombée sur tous les Etats membres, qu'ils appliquent ou non l'intégralité de l'acquis Schengen. A cet égard, l'accent doit être mis sur une coopération opérationnelle ne nécessitant pas dans un premier temps de base juridique formelle, dans des matières telles que la détection de la fraude documentaire et le renforcement des autorités dans les pays tiers. Ceci peut profiter de l'expérience et de la contribution de tous les Etats membres.

 

Les enjeux

 

4. La sécurité des frontières extérieures de l'Union européenne est un thème essentiel pour les citoyens européens. Parfois, les frontières extérieures de l'Union européenne apparaissent encore, à tort ou à raison, comme un maillon faible risquant d'affecter le niveau de sécurité intérieure des Etats membres, notamment dans un espace sans frontières intérieures. L'Union européenne possède déjà un acquis communautaire précis dans le domaine des frontières extérieures, mais la principale difficulté actuelle est de pouvoir organiser entre les Etats membres toutes les synergies opérationnelles qui permettraient d'avoir des actions mieux coordonnées et donc un niveau de sécurité plus homogène à toutes les frontières extérieures. De plus, dans la perspective de l'élargissement, des citoyens rappellent la nécessité de maintenir, voire d'accroître, le niveau de sécurité intérieure d'une Union européenne élargie. Face à une diversification des menaces qui touchent indistinctement le franchissement des frontières extérieures par des personnes ou par des marchandises, des synergies, des gains d'efficacité et une meilleure allocation des ressources seraient envisageables grâce à une gestion moins cloisonnée par les services nationaux, tout en respectant la réalité institutionnelle et géographique.

Les nouveaux défis à la sécurité intérieure pressent une Union européenne en cours d'élargissement de considérer les frontières extérieures comme une question prioritaire. Il faut en effet répondre à quatre exigences majeures:

- Assurer la confiance mutuelle entre les Etats membres qui ont aboli les contrôles des personnes et des marchandises [6] à leurs frontières intérieures et faciliter en conséquence le mouvement des personnes;

[6] Le territoire douanier communautaire couvre le territoire de tous les Etats membres de l'Union européenne. Il couvre notamment certaines portions ultra périphériques du territoire des Etats membres qui sont exclues du champ d'application de l'acquis de Schengen, conformément à l'article 138 de la Convention de Schengen, et aux déclarations faites au moment de la signature du traité d'Amsterdam. Le territoire douanier communautaire ne couvre pas en revanche la Norvège et l'Islande, ni certains territoires périphériques ou autonomes qui étaient inclus dans l'Union nordique des passeports et qui demeurent explicitement couverts pour l'application de l'acquis de Schengen.

- Accroître l'efficacité de la lutte contre l'immigration clandestine dans le respect des principes du droit d'asile, contre la traite des êtres humains et contre les trafics en tous genres liés à la criminalité organisée et à la drogue;

- Se donner les moyens de lutter contre toutes les formes de menaces intérieures et extérieures que le terrorisme fait peser sur les Etats membres et la sécurité des personnes;

- Garantir un niveau élevé de sécurité à l'intérieur de l'Union européenne après son élargissement, en particulier après que de nouveaux Etats membres auront été autorisés à appliquer l'acquis de Schengen [7], ce qui aura pour conséquence d'accroître considérablement les frontières extérieures terrestres dans un environnement régional souvent plus difficile.

[7] L'article 8 du Protocole intégrant l'acquis de Schengen dans le cadre de l'Union européenne dispose que "l'acquis de Schengen et les autres mesures prises par les institutions dans le champ d'application de celui-ci sont considérés comme un acquis qui doit être intégralement accepté par tous les Etats candidats à l'adhésion". Toutefois, l'acquis de Schengen ne s'appliquera pas aux nouveaux Etats membres dès leur adhésion à l'Union européenne, à la différence de l'acquis communautaire douanier.

On peut rappeler ici que la mise en application de l'acquis de Schengen se fera en deux étapes distinctes pour les nouveaux Etats membres, comme cela a également été le cas dans le passé pour tous les autres Etats membres [8]: l'adhésion à l'Union européenne ne signifie pas automatiquement pour un nouvel Etat membre qu'il est autorisé à appliquer l'intégralité de l'acquis de Schengen, car une décision spécifique du Conseil est nécessaire pour cela, après constatation que l'Etat membre a atteint notamment le degré requis de sécurité de ses frontières extérieures. Les pays candidats se préparent avec sérieux depuis plusieurs années aux exigences de l'acquis Justice et Affaires intérieures. Ils bénéficient pour cela de financements très importants et de l'expertise de l'Union européenne. L'adaptation de leur système institutionnel et juridique, de même que la modernisation des infrastructures et des équipements pour la gestion des frontières des pays candidats progressent de manière encourageante.

[8] Parmi les derniers exemples en date qui sont les plus comparables à la situation des actuels pays candidats figurent notamment l'Autriche, la Finlande et la Suède qui sont devenues membres de l'Union européenne le 1er janvier 1995. L'Autriche a adhéré à la Convention de Schengen le 28 avril 1996 mais n'a été autorisée à appliquer pleinement l'acquis de Schengen que le 31 mars 1998. La Finlande et la Suède ont adhéré à la Convention de Schengen le 19 décembre 1996 mais n'ont été autorisées à appliquer pleinement l'acquis de Schengen que le 26 mars 2001.

On peut aussi rappeler ici que l'amélioration de l'efficacité des procédures de contrôles aux frontières extérieures n'est pas seulement de nature à accroître la sécurité intérieure des Etats membres, mais qu'elle aussi de nature à accélérer la circulation des personnes, des biens et des marchandises entre l'Union européenne et les pays tiers. Les échanges économiques et culturels, notamment avec les pays tiers les plus proches géographiquement, devraient ainsi s'en trouver favorisés dans l'intérêt mutuel.

5. Les frontières extérieures de l'Union européenne sont aussi un lieu où s'affirme une identité commune de sécurité intérieure. L'absence d'une vision et d'une politique communes clairement affirmées en matière de frontières extérieures comporteraient des risques politiques et stratégiques majeurs. Ceux-ci pourraient à terme entraver l'affirmation d'une politique viable de l'Union européenne dans le domaine de la Justice et des Affaires Intérieures. On peut souligner plusieurs types de faiblesses:

- Une gestion des frontières extérieures à caractère purement national ou par des accords entre pays limitrophes: ce scénario serait peu propice au développement de la confiance mutuelle qui est indispensable au maintien de l'abolition des contrôles des personnes aux frontières intérieures;

- L'impossibilité de se doter d'un cadre budgétaire structuré, prévisible et garant d'une certaine continuité d'action: c'est l'une des conditions pour que l'Union européenne puisse atteindre des objectifs plus ambitieux que la simple succession d'opérations ponctuelles. L'enjeu porte ici sur la capacité des Etats membres et de l'Union à mettre en oeuvre un partage équitable du fardeau financier et la capacité à réaliser des synergies nouvelles génératrices d'économies d'échelle et de moyens;

- L'impossibilité de faire face d'une seule voix à la dimension extérieure de la politique de contrôle et de surveillance des frontières extérieures: la capacité de l'Union à affirmer sa propre politique est mise à l'épreuve lors de négociations ou discussions avec des pays tiers, ou lors de travaux techniques au sein d'organisations internationales dans des domaines touchant directement ou indirectement aux contrôles des frontières.

 

Les objectifs

 

6. L'une des ambitions de cette communication est de proposer des mécanismes de travail et de coopération au niveau de l'Union européenne pour permettre aux praticiens des contrôles des frontières extérieures de se mettre autour d'une même table pour coordonner leurs actions opérationnelles dans le cadre d'une stratégie intégrée prenant progressivement en compte la pluralité des dimensions de la gestion des frontières extérieures. Il s'agit d'arriver à un cadre cohérent pour une action en commun sur le moyen et le long terme. La présente communication est centrée sur les personnes et s'appuie donc sur l'acquis de Schengen qui est aujourd'hui la seule réalité de droit communautaire en la matière. Les orientations et mesures préconisées par cette communication ont un caractère dynamique dans le temps. Elles sont conçues pour se mettre en place dans un premier temps comme un développement de l'acquis Schengen, dans le cadre des traités tels qu'ils existent aujourd'hui. Il ne s'agit pas de nier la réalité institutionnelle des trois piliers de l'Union qui est incontournable pour créer des normes de droit. Il s'agit avant tout de lancer une dynamique d'actions opérationnelles bâtie à partir de la dimension Justice et Affaires Intérieures des frontières extérieures. Au fur et à mesure que cette dynamique se développera, elle révélera sans doute des besoins institutionnels nouveaux auxquels il est probable que la Convention sur l'avenir de l'Union européenne aura à s'intéresser. Quoi qu'il en soit, et pour compléter la réflexion sur les frontières extérieures dans le cadre existant, la présente communication sera suivie par une seconde communication, centrée sur les marchandises et biens de toute nature. En s'appuyant sur des expériences différentes, ces deux communications devraient contribuer ensemble à une stratégie globale visant une efficacité accrue de la gestion intégrée des frontières extérieures.En outre, l'élargissement lancera de nouveaux défis à la protection des frontières extérieures. Dans une large mesure les futurs Etats membres deviendront responsables de la sécurité intérieure de l'Union alors même qu'ils seront encore sous l'effet d'un processus de transition économique et sociale. La gestion de ces futures frontières extérieures jouera un rôle décisif pour les perspectives de développement de relations de l'Union avec ses futurs voisins, tels que la Biélorussie et l'Ukraine. Par conséquent, il convient d'adopter une approche cohérente en étroite coopération avec les futurs Etats membres, dans le prolongement des actions menées depuis plusieurs années par l'Union européenne.

7. La présente Communication commence par établir un constat (Partie II), qui décrit l'acquis communautaire et les pratiques opérationnelles existantes, de manière à aboutir à un diagnostic des besoins de l'Union européenne en voie d'élargissement. Sur la base de ce diagnostic, elle propose (Partie III) le développement d'une politique commune de gestion des frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne, intégrant les composantes qui sont considérées comme inséparables les unes des autres.

 

II. UN CONSTAT: L'ACQUIS COMMUNAUTAIRE EN MATIERE DE FRANCHISSEMENT DES FRONTIERES EXTERIEURES EST ENCORE DEPOURVU D'UNE VERITABLE COORDINATION OPERATIONNELLE.

 

Il importe tout d'abord de décrire brièvement le cadre juridique et institutionnel issu de l'acquis de Schengen et les pratiques opérationnelles actuelles, afin d'aboutir à un diagnostic des besoins.

II. a) Le cadre juridique et institutionnel pour la gestion des frontières extérieures

8. L'acquis communautaire et les sources du droit positif en vigueur.

Depuis la mise en application de la Convention de Schengen le 26 mars 1995 [9], les contrôles et la surveillance aux frontières extérieures des Etats membres participants sont régis par des principes communs et uniformes. Le contenu de ces principes communs et uniformes a été établi par le chapitre 2 du titre II de la Convention de Schengen. Les modalités d'application plus précises de ces principes ont été fixées et détaillées par le Manuel commun des frontières extérieures [10]. L'ensemble de ces dispositions a reçu une nouvelle base juridique au titre IV du traité instituant la Communauté européenne (TCE) [11].

[9] Par facilité de langage, on parle de la "Convention de Schengen", mais la référence correcte est "Convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990". Le texte intégral de cette Convention est publié au Journal Officiel L 239 du 22 septembre 2000 (pages 19 à 62)

[10] La décision du Comité exécutif Schengen du 28 avril 1999 qui a adopté ce Manuel a été publiée au Journal Officiel L 239 du 22 septembre 2000 (page 317). Elle a reçu une base juridique dans l'Union européenne, conformément à la décision du Conseil 1999/436/CE du 20 mai 1999.

[11] Voir la décision du Conseil 1999/436/CE du 20 mai 1999 publiée au Journal Officiel L 176 du 10 juillet 1999.

L'article 3 de la Convention de Schengen dispose que "les frontières extérieures ne peuvent en principe être franchies qu'aux points de passages frontaliers et durant les heures d'ouverture". L'article 5 de la Convention de Schengen fixe les principes d'une législation communautaire relative à l'entrée des étrangers pour un séjour n'excédant pas trois mois dans l'espace commun de libre circulation, ainsi que des dispositions législatives fixant des conduites à tenir par les garde frontières lorsque des personnes sont signalées aux fins de non-admission, sur la base de l'article 96 de la Convention de Schengen.

L'article 6 de la Convention de Schengen détermine les obligations des Etats membres dans le domaine du contrôle et de la surveillance des frontières extérieures [12]. Les contrôles sont effectués sur les personnes qui franchissent légalement les frontières extérieures. En matière de contrôle des personnes, les obligations des Etats membres sont relativement étendues. La vérification systématique de l'identité des personnes est obligatoire, y compris dans le cas des citoyens de l'Union européenne et des bénéficiaires du droit communautaire. La surveillance est quant à elle exercée dans les intervalles situés entre les points de passage autorisés afin de dissuader les personnes de franchir illégalement la frontière extérieure. Les Etats membres doivent veiller à ce que son niveau soit équivalent tout le long des frontières extérieures.

[12] Voir Annexe 1 pour la définition de la terminologie utilisée.

9. D'autres éléments de l'acquis de Schengen sont des éléments indissociables du contrôle et de la surveillance des frontières extérieures:

- les dispositions de l'acquis Schengen des articles 26 (responsabilité des transporteurs) et 27 (responsabilité en matière d'aide à l'immigration irrégulière à des fins lucratives) de la Convention, ainsi que les dispositions qui leur ont fait suite [13] pour prévenir l'immigration illégale;

[13] Directive n° 2001/51/CE du Conseil du 28 juin 2001 visant à compléter les dispositions de l'article 26 de la Convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 ( Journal Officiel L 187 du 10 juillet 2001, pages 45-46).

- les dispositions de l'article 71.3 relatives au renforcement des contrôles de la circulation des personnes, des marchandises et des transports aux frontières extérieures "en vue de lutter contre l'importation illicite de stupéfiants et de psychotropes..."

- des dispositions horizontales comme le Système d'information Schengen (SIS [14]), qui trouvent une application aussi aux frontières extérieures.

[14] Voir les articles 92 à 101 de la Convention de Schengen.

L'article 101.1 a) de la Convention de Schengen prévoit que les "instances qui sont compétentes pour les contrôles frontaliers" ont accès à la totalité des "données intégrées dans le SIS ainsi que le droit de les interroger directement". Cette disposition vise à ce que la frontière extérieure, à l'occasion des contrôles d'entrée et de sortie du territoire effectués sur les personnes, joue un rôle de barrage ou de filtre dans la perspective de la sécurité intérieure au sens large. Par ailleurs, les autorités consulaires ont accès aux signalements pris sur la base de l'article 96 de la Convention de Schengen aux fins de non-admission de certaines personnes étrangères sur le territoire. Elles doivent obligatoirement consulter le SIS avant de délivrer un visa à un étranger [15].

[15] Les citoyens de l'Union européenne, les ressortissants des pays de l'Espace Economique Européen, ainsi que les membres de la famille de ces bénéficiaires du droit communautaire quelle que soit leur nationalité ne peuvent pas être inscrits, en principe, au titre de l'article 96.

10. Comment est assurée la bonne application des règles communes pour le franchissement des frontières extérieures.

La coopération intergouvernementale Schengen avait instauré un dispositif de surveillance mutuelle intitulé Commission Permanente d'évaluation et d'application de Schengen dotée d'un mandat couvrant des matières précises [16]. Selon ce mandat, peuvent normalement être évalués, pour chaque Etat membre, les liens et interactions entre la manière d'effectuer les contrôles et la surveillance des frontières extérieures, la pratique de la délivrance des visas, la coopération policière et judiciaire aux frontières intérieures et l'utilisation du SIS. Ce dispositif d'évaluation a deux misions distinctes:

[16] Voir la décision du Comité exécutif Schengen SCH/Com-ex (98) 26 déf. du 16 septembre 1998, publiée au Journal Officiel L 239 du 22 septembre 2000 (page 138).

- évaluer de nouveaux Etats membres en vue de préparer la décision du Conseil qui les autorisera à mettre en application l'acquis de Schengen [17]

[17] La dernière évaluation de ce type a porté sur le groupe formé du Danemark, de la Finlande, la Suède, la Norvège et l'Islande du premier trimestre 2000 au premier trimestre 2001.

- vérifier par la suite que les Etats membres appliquent correctement l'acquis de Schengen [18]

[18] La dernière évaluation de ce type a porté sur la France au premier trimestre 2002.

Ce dispositif d'évaluation a reçu une double base juridique à l'article 66 du TCE ainsi qu'aux articles 30 et 31 du traité sur l'Union européenne (UE) [19].

[19] Voir la décision du Conseil 1999/436/CE du 20 mai 1999 publiée au Journal Officiel L 176 du 10 juillet 1999.

11. Actuellement, le dispositif d'évaluation ne permet pas de visite à l'improviste, et il ne donne pas aux visites le caractère de véritables inspections. Ainsi il ne permet pas d'observer des phénomènes ou dysfonctionnements qui affectent simultanément plusieurs Etats membres: par exemple certains types de frontières extérieures (maritimes, terrestres ou aériennes) ou encore les consulats de plusieurs Etats membres dans la même région du monde.

Dans le cas des Etats membres qui appliquent l'acquis de Schengen, la visite d'évaluation donne lieu à un rapport. Cependant, toutes les conséquences logiques de ce rapport ne peuvent pas être tirées, par exemple sous la forme de sanctions ou d'aides opérationnelles et financières à l'égard d'un ou plusieurs Etats membres. Ce dispositif issu de la Commission permanente d'évaluation et d'application de Schengen offre toutefois un point de départ précieux pour renforcer, dans une perspective de sécurité intérieure, la fonction d'évaluation des frontières extérieures. Il mérite d'être approfondi dans le respect de la déclaration qu'a faite la Commission au moment de l'intégration de l'acquis de Schengen dans l'Union européenne [20], et dans le respect de l'exercice institutionnel habituel prévu en cas de manquements à l'application correcte du droit communautaire par un Etat membre.

[20] " Conformément à l'article 1er du Protocole intégrant l'acquis de Schengen dans le cadre de l'Union européenne, la coopération renforcée Schengen "est conduite dans le cadre juridique et institutionnel de l'Union européenne et dans le respect des dispositions pertinentes du traité sur l'Union européenne et du traité instituant la Communauté européenne". Aussi, la Commission estime que l'intégration de la décision du Comité exécutif portant création d'une commission permanente d'évaluation et d'application de Schengen (SCH/Com-ex (98) 26 def du 16.9.1998) dans le cadre de l'Union n'affecte en rien les compétences qui lui sont dévolues par les traités et notamment sa responsabilité en tant que gardienne des traités" (Voir Journal Officiel L 176 du 10 juillet 1999, page 30).

II. b) Les pratiques opérationnelles actuelles

12. Qui sont aujourd'hui les garde-frontières des Etats membres de l'Union européenne

L'article 6 de la Convention de Schengen stipule que les procédures uniformes de contrôle sont effectuées "dans le cadre des compétences nationales et de la législation nationale en tenant compte des intérêts de toutes les Parties contractantes". Il en résulte que chaque Etat membre est libre de confier le contrôle et la surveillance des frontières extérieures aux autorités de son choix selon sa propre structure nationale interne. Ces missions sont confiées dans certains Etats à un seul corps et dans d'autres Etats à plusieurs corps dépendant de départements ministériels différents. La coordination entre ces différents services se fait soit à un échelon national central, soit à un échelon régional, comme cela est recommandé par le "Catalogue des bonnes pratiques Schengen" [21].

[21] UE Catalogue Schengen: Contrôles aux frontières extérieures, éloignement et réadmission: recommandations et meilleures pratiques (document adopté par le Conseil JAI le 28 février 2002 et publié par le Secrétariat général du Conseil de l'Union européenne)

13. La nature des missions confiées par les Etats membres aux diverses autorités nationales présentes sur les frontières extérieures comporte un grand éventail d'activités. Chaque service national d'un Etat membre ne trouve pas toujours dans un autre Etat membre son homologue exact, ayant les mêmes missions et les mêmes pouvoirs pour la répression, la prévention ou l'investigation. Cette diversité des organisations administratives nationales est certes légitime mais elle doit néanmoins pouvoir s'inscrire en pratique dans le cadre d'une stratégie commune de gestion des frontières extérieures au niveau de l'Union européenne. Il conviendrait donc pour cette raison de développer chez les responsables et les agents de ces différents services la conscience qu'ils sont de fait dès maintenant les garde-frontières des Etats membres de l'Union européenne. Il convient donc que ces services conçoivent leur action comme la contribution à un réseau européen de contrôle et de surveillance. Au total, l'addition des activités et missions de l'ensemble de ces services devrait assurer une application homogène de l'acquis de Schengen, du Code douanier communautaire et de toutes les autres dispositions de droit CE/UE susceptibles de trouver une application aux frontières extérieures. Il s'agit d'accroître la coordination entre les différentes administrations concernées, ce qui apporterait une valeur ajoutée, par exemple dans l'échange de leurs méthodes d'analyse de risque.

14. Sur le plan financier, le coût du personnel et des équipements est à la charge du budget national de chaque Etat membre, ce qui, en raison de la configuration géographique, peut créer une charge financière particulièrement lourde pour certains Etats membres, notamment pour la surveillance des frontières maritimes. Les méthodes de travail, l'utilisation du personnel et du matériel, ainsi que leurs règles de gestion, suivent essentiellement des considérations nationales, malgré les dispositions de l'article 6 de la Convention de Schengen [22]. On peut cependant noter qu'il en va différemment dans le domaine douanier. Les Etats membres retiennent 25% des ressources propres de la Communauté tirées du produit des droits de douanes pour les besoins des infrastructures de la frontière extérieure douanière [23]. Des aides communautaires sont à disposition pour des actions conjointes le long des frontières extérieures de l'Union, y compris aux frontières maritimes, dans le champ de la coopération policière, douanière et judiciaire. Du côté de l'Union, de telles actions sont éligibles à des aides de l'Initiative communautaire INTERREG qui soutient des coopérations transfrontalières, transnationales et inter-régionales. Ceci peut être mis en correspondance avec des actions de l'autre côté de la frontière en utilisant différents instruments selon l'environnement géographique (TACIS, PHARE, CARDS, MEDA). INTERREG va être étendu pour couvrir les nouveaux Etats membres après l'élargissement.

[22] "[les Etats membres] s'engagent à mettre en place des effectifs appropriés et en nombre suffisant en vue de l'exercice du contrôle et de la surveillance des frontières extérieures. (...) Un niveau équivalent de contrôle est exercé aux frontières extérieures".

[23] Conformément à la décision 2000/597/CE, Euratom, relative au système des ressources propres des Communautés Européennes, qui est entrée en vigueur le premier mars 2002, les Etats membres sont autorisés à retenir 25% à titre des frais liés à la perception des ressources propres traditionnelles.

15. Quelles sont les difficultés d'application de l'acquis communautaire en matière de franchissement des frontières extérieures par les personnes -

L'article 5 de la Convention de Schengen dispose que, pour être admis dans l'espace commun de libre circulation, l'étranger ne doit pas être "considéré comme pouvant compromettre l'ordre public, la sécurité nationale ou les relations internationales de [l'un des Etats membres]". Ce principe paraît délicat à mettre en oeuvre de manière homogène aux frontières extérieures, car la situation des personnes est appréciée en fonction de critères nationaux qui ne sont pas équivalents d'un Etat membre à l'autre. La même difficulté peut se poser pour l'application des dispositions de l'article 6 de la Convention de Schengen relatives à la recherche et la prévention des menaces [24].

[24] "Le contrôle des personnes comprend (...) encore la recherche et la prévention de menaces pour la sécurité nationale et l'ordre public [des Etats membres]. Ce contrôle porte aussi sur les véhicules et les objets en possession des personnes franchissant la frontière".

D'éventuelles différences de législations nationales et de pratiques administratives peuvent produire des différentiels de sécurité entre les portions de frontières extérieures contrôlées par différents Etats membres. L'interprétation des règles relatives au signalement au SIS peuvent varier d'un Etat membres à l'autre. Des différences existent aussi quant à l'accès au SIS qu'ont les divers services concernés par le contrôle et la surveillance des frontières extérieures. Ces facteurs affectent nécessairement l'homogénéité de la gestion des frontières extérieures dans une perspective de sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation.

Par ailleurs, l'article 6 de la Convention de Schengen prévoit le contrôle d'entrée et le contrôle de sortie sur toutes les personnes qui franchissent les frontières extérieures, mais sa rédaction [25] peut suggérer que les contrôles de sortie sont secondaires. Cette situation mérite un examen approfondi par rapport à la bonne application de mesures d'interdiction de sortie du territoire ou de surveillance discrète des personnes susceptibles de menacer la sécurité. Pour les contrôles de sortie du territoire notamment, la complémentarité paraît perfectible entre les services qui sont chargés du contrôle des personnes, et ceux qui sont chargés des contrôles de nature douanière ou fiscale.

[25] "(...) à la sortie, il est procédé au contrôle requis dans l'intérêt de toutes les Parties contractantes en vertu du droit des étrangers et pour les besoins de la recherche et de la prévention de menaces pour la sécurité nationale et l'ordre public des Parties contractantes. Ce contrôle est exercé dans tous les cas à l'égard des étrangers; si de tels contrôles ne peuvent être effectués en raison de circonstances particulières, des priorités devront être fixées. A cet égard, le contrôle de la circulation à l'entrée a, en principe, priorité sur le contrôle à la sortie. (...)".

16. Formes de coopération entre les Etats membres sur les lieux mêmes des frontières extérieures de l'Union européenne.

Dans le domaine du contrôle et de la surveillance des frontières extérieures, les Etats membres utilisent aujourd'hui deux types de cadre de coopération en application de l'acquis de Schengen:

- Les échanges d'officiers de liaison prévus à l'article 7 de la Convention de Schengen [26]: leurs finalités sont l'assistance et la coopération permanente entre les Etats membres "en vue d'une exécution efficace des contrôles et des surveillances" ainsi que la "promotion d'une formation et d'un recyclage uniformes du personnel affecté aux contrôles";

[26] L'article 7 de la Convention de Schengen a reçu une base juridique à l'article 66 du TCE "dans la mesure où ces dispositions ne constituent pas des formes de coopération policière au sens du titre III de la Convention de Schengen", conformément à la décision du Conseil 1999/436/CE du 20 mai 1999 publiée au Journal Officiel L 176 du 10 juillet 1999.

- Les accords bilatéraux de coopération policière conclus entre les Etats membres sur la base de l'article 47 de la Convention de Schengen [27]: leur utilisation aux frontières extérieures a pour objectif essentiel la lutte contre l'immigration illégale et la prévention de la criminalité organisée, selon les orientations fixées par le Comité exécutif Schengen [28].

[27] Cette disposition a reçu une base juridique aux articles 34 et 30 1 du traité sur l'Union européenne, conformément à la décision du Conseil 1999/436/CE du 20 mai 1999. L'article 47 de la Convention de Schengen figure sous le chapitre "Coopération policière" alors que l'article 7 mentionné ci-dessus figure sous le chapitre "Franchissement des frontières extérieures".

[28] Voir la Décision du Comité exécutif SCH/Com-ex (99) 7, rév.2 du 28 avril 1999 publiée au Journal Officiel L 239 du 22 septembre 2000.

17. Certains de ces accords bilatéraux de coopération policière sont parfois utilisés comme supports pour expérimenter des équipes mixtes binationales détachées aux frontières extérieures. Leur taille, leurs missions et leur capacité d'agir sont encore limitées. Elles semblent difficilement pouvoir sortir d'un cadre bilatéral pour atteindre réellement une dimension européenne. Pour l'instant, les fonctionnaires ainsi détachés sur le territoire d'un autre Etat membre ne peuvent pas exercer les prérogatives de puissance publique qui leur seraient nécessaires pour accomplir les missions de contrôle et de surveillance des frontières extérieures. De plus, ces formes de coopération bilatérales entre les Etats membres issues de l'acquis de Schengen ne paraissent pas coordonnées avec d'autres formes de coopération, telles que la gestion des frontières extérieures dans une perspective douanière.

II. c) Les principaux besoins identifiés

18. Les initiatives présentées par les Présidences successives et par les Etats membres semblent refléter la nécessité d'une Instance commune de coopération et de coordination plus opérationnelle pour les praticiens [29] des contrôles et de la surveillance des frontières extérieures. Elles semblent rechercher également une meilleure intégration entre les missions exercées aux frontières extérieures, et celles exercées par d'autres autorités situées à l'intérieur de l'espace commun de libre circulation. [30].

[29] Note de la présidence belge au Conseil en date du 27 novembre 2001 portant sur un "Border management concept" (document du Conseil 14570/01 FRONT 69)

[30] Voir "Workshop Police and Border Security" organisé à Neusiedl/See (Autriche) les 10 et 11 janvier 2002. et financé par le programme OISIN

19. La Commission rappelle plusieurs pôles de besoins à combler au niveau de l'Union européenne tels qu'ils se dégagent de la complexité des discussions de ces derniers mois dans le cadre du Conseil:

- Comment harmoniser davantage et améliorer les pratiques des unités nationales chargées d'effectuer les contrôles et d'assurer la surveillance aux frontières extérieures -

- Comment assurer une meilleure cohérence opérationnelle entre les actions menées aux frontières extérieures et les actions menées à l'intérieur du territoire de l'espace commun de libre circulation-

- Où et comment établir un suivi régulier entre les responsables de la gestion et de la prévision opérationnelle pour le déploiement des personnels et des équipements-

- Comment permettre aux responsables des services opérationnels de partager une analyse commune des menaces, afin de hiérarchiser et coordonner leurs objectifs opérationnels au niveau de l'Union européenne-

- Faut-il modifier certaines dispositions législatives existantes relatives au contrôle et à la surveillance des frontières extérieures-

- Comment organiser un partage financier et opérationnel du fardeau-

- Comment organiser un tronc commun de formation des garde frontières -

 

III. POUR UNE POLITIQUE COMMUNE DE GESTION DES FRONTIERES EXTERIEURES : VERS UN CORPS EUROPEEN DE GARDE FRONTIERES

 

20. Pour répondre de manière cohérente à l'ensemble des besoins qui ont été exprimés de manière éparse par les Etats membres et qui sont décrits plus haut, la Commission préconise de structurer les actions et d'assurer leur continuité dans le cadre d'une politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures. Cette politique commune devrait au minimum comprendre cinq composantes, qui paraissent liées les unes aux autres:

a) Un corpus commun de législation ;

b) Un mécanisme commun de concertation et de coopération opérationnelle;

c) Une évaluation commune et intégrée des risques;

d) Du personnel formé à la dimension européenne et des équipements inter-opérationnels;

e) Un partage du fardeau entre les Etats membres dans la perspective d'un Corps européen de gardes frontières.

Le contrôle démocratique et juridictionnel de l'ensemble de ces activités doit être assuré.

21. Pour chacune de ces composantes, il s'agit de préciser les orientations à suivre et les actions à réaliser.

Par souci de clarté, l'Annexe I donne une définition de la terminologie utilisée tout au long de la partie III, sans donner une valeur juridique à ces notions: contrôle des frontières extérieures, surveillance des frontières extérieures, sécurité de l'espace commun de libre circulation, sécurité des frontières extérieures, garde frontière, gestion des frontières extérieures.

 

III. a) Un corpus commun de législation

 

22. Le titre IV et notamment les articles 62 et 66 du TCE, offrent de riches potentialités juridiques pour structurer la stratégie ainsi que pour créer et faire fonctionner l'ensemble des composantes de la politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures.

23. La Commission préconise quatre mesures relatives au franchissement des frontières extérieures, qui peuvent être réalisées à court terme :

- Procéder à une refonte du Manuel Commun des frontières extérieures dans le but de clarifier la nature juridique de ses différentes dispositions et d'en faire une source de droit, en complément à d'autres instruments juridiques en place, comme ceux réglant la libre circulation des citoyens de l'Union, ceux visant à développer l'acquis de Schengen, ou encore des conventions de droit international public qui sont pertinentes pour les contrôles des frontières; à ce sujet la Commission entend prendre une initiative législative.

- Introduire dans le Manuel Commun certaines "bonnes pratiques", en s'inspirant du Catalogue des Bonnes Pratiques Schengen et les rendre ainsi obligatoires.

- Réaliser un mémento pratique utilisable par les garde frontières et disponible aussi sous un support électronique: l'objectif est de doter chaque agent des services de garde frontières d'un aide-mémoire maniable qui puisse être disponible pour consultation à tout instant. Ce mémento ne serait pas une source de droit, mais une compilation systématique et cohérente de toutes les règles de contrôle et de surveillance découlant des instruments juridiques pertinents.

- Dégager des principes et adopter des mesures communes en matière de "petit trafic frontalier" [31], en particulier en vue de l'élargissement. La Commission entend prendre une initiative, tendant à mieux définir les principes fondamentaux et les modalités d'un tel régime et, le cas échéant, d'envisager des accords entre la Communauté et des pays tiers limitrophes.

[31] L'article 3 de la Convention de Schengen dispose que " Des dispositions plus détaillées ainsi que les exceptions et les modalités du petit trafic frontalier (...) sont arrêtées par le Comité exécutif." Ni le Comité exécutif Schengen ni le Conseil qui lui a succédé après l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam n'ont fait usage de cette disposition.

24. La Commission préconise à moyen terme que "les mesures relatives au franchissement des frontières extérieures" soient complétées par de nouvelles "modalités auxquelles doivent se conformer les Etats membres pour effectuer les contrôles des personnes aux frontières extérieures" [32]:

[32] Formulation textuelle de l'article 62.2.a) du TCE.

- Dans le respect de l'article 64.1 du TCE, inclure parmi les "modalités auxquelles doivent se conformer les Etats membres pour effectuer les contrôles des personnes aux frontières extérieures, " un processus d'échange et de traitement d'information et de renseignements qui serait formalisé entre les autorités opérant aux frontières extérieures et celles opérant à l'intérieur du territoire de l'espace commun de libre circulation.

- Fixer les compétences qui pourraient le cas échéant être données à un Corps européen de garde frontières.

- Fixer les limites géographiques dans lesquelles un tel Corps européen de garde frontières serait habilité à exercer ses missions.

25. Pour garantir un niveau objectif de sécurité intérieure dans un espace sans frontières il paraît également nécessaire de prévoir un encadrement juridique pour l'exercice d'une véritable fonction d'inspection aux frontières extérieures. Un tel mécanisme d'inspection à caractère opérationnel devrait pouvoir agir, soit à la demande d'un Etat membre, soit de sa propre initiative, notamment lorsqu'à l'évidence l'ensemble des Etats membres devraient déployer des renforts à une frontière extérieure présentant temporairement et objectivement des difficultés à être contrôlée ou surveillée.

26. Il est aussi opportun de prévoir, au-delà de l'apport national, le financement de cette politique commune, en ayant recours notamment à l'article 66 du TCE, relatif à une coopération administrative entre les services des Etats membres et entre ces derniers et la Commission européenne.

 

III. b) Comment établir un mécanisme commun et opérationnel de concertation et de coopération

 

27. Un mécanisme commun de concertation et de coopération opérationnelle pourrait reposer sur deux instruments:

- une Instance commune de praticiens des frontières extérieures qu'il conviendrait de créer;

- un processus permanent d'échange et de traitement d'information et de renseignements qu'il conviendrait d'établir progressivement à moyen terme entre les autorités des différents Etats membres opérant aux frontières extérieures et celles opérant à l'intérieur du territoire de l'espace commun de libre circulation.

28. L'Instance commune de praticiens des frontières extérieures

La Commission préconise de créer une Instance commune de praticiens des frontières extérieures [33] chargée des fonctions suivantes:

[33] Au Conseil Européen extraordinaire du 21.09.01 et au Conseil JAI du 16.11.01 la Finlande avait déjà évoqué l'idée d'un « Forum pour les frontières extérieures »

- agir comme la "tête" de la politique commune de gestion des frontières extérieures pour effectuer l'évaluation commune et intégrée des risques;

- agir comme un "chef d'orchestre" coordonnant et pilotant des actions opérationnelles de terrain, notamment en situation de crise;

- agir en gestionnaire et en stratège pour assurer une plus grande convergence entre les politiques nationales dans le domaine des personnels et des équipements;

- exercer une forme de pouvoir d'inspection, notamment en cas de crise ou si l'évaluation des risques devait l'exiger.

 

29. L'Instance commune de praticiens des frontières extérieures créée principalement pour associer des responsables et praticiens du contrôle et de la surveillance des frontières extérieures ne serait pas strictement limitée aux domaines couverts par l'article 62.2 a) du TCE [34]. Il conviendrait que cette Instance commune joue pleinement un rôle pluridisciplinaire et horizontal pour associer responsables et praticiens, dont les missions peuvent avoir un lien avec la sécurité des frontières extérieures:

[34] "Les normes et les modalités auxquelles doivent se conformer les Etats membres pour effectuer les contrôles des personnes aux frontières extérieures".

- les autorités chargées de la délivrance des visas de court séjour et des visas de long séjour dont les missions sont couvertes respectivement par l'article 62.2 b) ii) [35] et l'article 63.3 a) [36] du TCE;

[35] "Les procédures et conditions de délivrance des visas par les Etats membres".

[36] "Conditions d'entrée et de séjour, ainsi que normes concernant les procédures de délivrance par les Etats membres de visas et de titres de séjour de longue durée, y compris aux fins du regroupement familial".

- les autorités chargées d'appliquer l'ensemble des mesures compensatoires visées à l'article 61e) [37] et 62.1 [38] du TCE, destinées à mettre en place un "espace de liberté, de sécurité et de justice": il peut s'agir concrètement des autorités de police, de justice, de douanes et d'EUROPOL au sens du traité sur l'Union européenne [39].

[37] "Des mesures dans le domaine de la coopération policière et judiciaire en matière pénale visant un niveau élevé de sécurité par la prévention de la criminalité et la lutte contre ce phénomène au sein de l'Union conformément aux dispositions du traité sur l'Union européenne".

[38] "Des mesures visant, conformément à l'article 14 [du TCE], à assurer l'absence de tout contrôle des personnes, qu'il s'agisse de citoyens de l'Union ou de ressortissants des pays tiers, lorsqu'elles franchissent les frontières intérieures"

[39] Les dispositions de l'article 61e) du TCE font référence à des dispositions du traité sur l'Union européenne, qui comporte notamment l'article 29 ainsi libellé: "Sans préjudice des compétences de la Communauté européenne, l'objectif de l'Union est d'offrir aux citoyens un niveau élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et de justice (...), grâce à une coopération plus étroite entre les forces de police, les autorités douanières et les autres autorités compétentes dans les Etats membres, à la fois directement et par l'intermédiaire de l'Office européen de police (Europol)...."

30. Les orientations politiques générales de l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures seraient fixées par le Conseil, dans la mesure où cette Instance commune devrait le plus probablement se développer à partir du groupe de travail SCIFA (Strategic Committee for Immigration, Frontiers and Asylum) réuni en formation des responsables des services des Etats membres assurant le contrôle des frontières extérieures. Dans cette première phase d'activité l'article 66 du TCE serait le cadre de travail de cette Instance puisque celle-ci réunirait les responsables hiérarchiques habilités à engager leurs administrations nationales dans des actions concrètes de coopération administrative pour le contrôle et la surveillance des frontières extérieures dans les domaines couverts par l'acquis de Schengen et par le titre IV du TCE. Il paraît cependant évident que le seul cadre du SCIFA, voire même de l'article 66 du TCE, se révélera assez rapidement insuffisant pour que cette Instance puisse véritablement être pluridisciplinaire en assurant les synergies utiles avec la coopération douanière et surtout avec la coopération policière du troisième pilier.

Il conviendra donc que, au moins pour l'exercice d'une partie de ses fonctions, l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures puisse progressivement élargir son activité au-delà de l'article 66 du TCE et si nécessaire en-dehors de la structure des groupes de travail du Conseil, en particulier si la création d'un Corps européen de garde frontières faisait naître le besoin d'une structure permanente d'état-major chargé de son commandement opérationnel, de la gestion de son personnel et de la gestion de son équipement.

Pour l'exercice de sa fonction d'inspection, l'Instance utiliserait comme point de départ le mandat de la Commission permanente d'application et d'évaluation Schengen, qui fait partie de l'acquis mais qu'il conviendrait peut-être d'améliorer et de renforcer sans dissocier le lien horizontal que ce mandat établit entre des activités régies par le premier pilier et par le troisième pilier. Cette manière de procéder paraît la plus pragmatique car actuellement ce mandat est exécuté par le groupe du Conseil Schengen-Evaluation (SCH/EVAL), qui est en fait placé sous l'autorité du SCIFA qui devrait être le cadre de naissance de l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures. Il n'y aurait donc pas de multiplication des structures: la fonction d'inspection en temps de crise serait en pratique effectuée par les supérieurs hiérarchiques des praticiens qui assurent aujourd'hui les visites d'évaluation "de routine" effectuées par le groupe de travail SCH/EVAL.

En tout état de cause, que ce soit à court terme ou à plus long terme, les fonctions exercées par l'Instance commune comporteraient des activités destinées à améliorer l'efficacité de l'application des règles de droit de l'Union, mais elles ne comporteraient en revanche aucune activité de proposition législative ou de mesure d'exécution au sens que prend ce dernier terme à l'article 202 du TCE.

La Commission participe à la formation de cette Instance commune et y exerce son rôle institutionnel d'initiative et de contrôle dévolu par le traité CE.

31. Le cadre des activités exercées par cette Instance commune de praticiens des frontières extérieures, à concevoir comme un développement de l'acquis de Schengen, serait aussi l'enceinte idéale pour accueillir progressivement les nouveaux Etats candidats à l'adhésion à l'Union. La pleine participation des nouveaux Etats membres aux différentes activités de l'Instance commune et à la politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures, devra suivre le même rythme que l'application par chaque Etat membre des dispositions de l'acquis de Schengen. Il serait cependant souhaitable de pouvoir anticiper sur ce calendrier en matière de convergence des politiques du personnel et des équipements, ainsi que pour d'éventuels exercices thématiques qui pourraient ponctuellement associer les nouveaux Etats membres ou les pays candidats.

32. Dans le cadre de sa fonction d'analyse des risques, il pourrait être demandé à l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures de conduire une analyse destinée à mettre au point le deuxième instrument du mécanisme commun de concertation et de coopération opérationnelle, à savoir le processus d'échange et de traitement permanent d'information et de renseignement qui fait l'objet des points suivants.

 

33. Un échange et un traitement permanent d'information et de renseignement

Le mécanisme d'échange et de traitement permanent d'informations et de renseignements que l'on envisage n'est pas une base de données ou un réseau informatique, ni la création d'une structure administrative. Il s'agit d'une procédure ou d'un code de conduite qui, selon la nature des informations et des risques identifiés, aurait pour finalité d'établir des liens et échanges directs entre les autorités concernées par la sécurité des frontières extérieures. Cette procédure de sécurité (PROSECUR [40]: "PROcédure de SECURité" ou "PROcedure of SECURity") reposerait sur une pluralité d'instruments et de modalités techniques d'échanges, dont certaines existent déjà, alors que d'autres seraient à créer progressivement. Pour donner une illustration concrète, PROSECUR pourrait disposer par exemple des outils suivants, qui seraient mis en complémentarité les uns avec les autres, de manière à couvrir si possible l'intégralité de la sécurité des frontières extérieures:

[40] Il est proposé de l'appeler ainsi par commodité dans la suite du texte.

- le SIS utilisé pour consulter des informations lors des contrôles aux frontières extérieures;

- les différentes banques de données électroniques en cours de développement (par ex. le réseau de visas délivrés et réfusés) pour consulter les informations mises à dispositions par d'autres autorités;

- les canaux d'échange d'information relatifs à la prévention des trafics de drogue;

- un Intranet crypté reliant des points de contacts nationaux pour échanger de manière interactive des informations ou pour se concerter sur des actions très précises à mener dans de très brefs délais à l'égard d'une personne franchissant la frontière extérieure;

- les moyens classiques de télécommunication par téléphone ou radio en passant si nécessaire par des points de contacts nationaux [41].

[41] Soit pour des commodités linguistiques, soit lorsqu'il s'agit de renseignements qui intéressent les services de sécurité nationale

34. Dans le cadre de PROSECUR, il pourrait aussi être demandé à un service de transmettre à un autre service les informations et pièces nécessaires pour assurer le traitement complet d'une infraction, d'un délit ou d'une menace constatés à la frontière extérieure. Ce pourrait être le cas lorsque, pour des raisons juridiques ou matérielles, un service ne pourrait pas assurer l'intégralité de ce traitement et de ce suivi. Le résultat espéré de PROSECUR dans une telle situation serait de surmonter les cloisonnements entre les services sans affecter les compétences et les pouvoirs qui leur sont confiés par la loi nationale. Des procédures d'alerte des services douaniers ainsi que des procédures de réquisition des services phytosanitaires ou de laboratoires scientifiques devraient également être prévues par PROSECUR. Réciproquement, les services de renseignement d'un Etat membre devraient pouvoir communiquer sans délai à tous les services de garde frontières et consulats des Etats membres des renseignements suffisamment pertinents et précis pour leur permettre d'exercer pendant une période donnée une vigilance ciblée sur certains types de profils d'individus, d'objets, de provenances géographiques, de modes de transport.

35. Pour pouvoir fonctionner correctement, PROSECUR devrait à terme être formalisé par un instrument juridique [42] précisant au niveau de l'Union les devoirs et les droits réciproques:

[42] Cet instrument juridique pourrait être adopté sur la base de l'article 62.1 et 62.2a) du TCE car il compléterait les modalités de contrôle des personnes aux frontières extérieures afin de pouvoir prendre en compte la sécurité de l'espace commun de libre circulation, dans l'esprit des dispositions de l'article 6 de la Convention de Schengen.

- entre les différents services de garde frontières compétents pour le contrôle et la surveillance du franchissement des frontières extérieures par les personnes ou les marchandises;

- entre ces services de garde frontières et d'autres services administratifs, policiers ou judiciaires situés à l'intérieur du territoire et qui participent à la sécurité de l'espace commun de libre circulation.

Dans la mesure du possible, l'échange d'informations et de renseignements couvert par le code de conduite PROSECUR devrait s'appliquer de la même manière entre autorités d'un même Etat membre, ou entre autorités d'Etats membres différents. Selon la nature des informations et des risques, selon les modalités techniques de l'échange et selon le degré d'urgence de l'information, PROSECUR devrait établir des liens privilégiés avec EUROPOL, ainsi que les autres mécanismes de coopération policière, douanière ou judiciaire existants.

 

III. c) Comment structurer l'évaluation commune et intégrée des risques

 

36. L'évaluation commune et intégrée des risques est également une composante essentielle pour traiter de manière conjointe trois lignes stratégiques de protection des frontières extérieures: les pays tiers, la frontière extérieure, l'intérieur de l'espace commun de libre circulation.

Deux étapes chronologiques successives devraient être distinguées:

- la détermination initiale des indicateurs considérés comme pertinents pour l'analyse et l'évolution des risques;

- après l'adoption des indicateurs communs, le suivi constant et continu de leur évolution pour en tirer les conséquences opérationnelles utiles sur le terrain.

Pour parvenir à cet objectif, il serait souhaitable que l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures soit chargée de structurer l'activité et d'évaluer les besoins opérationnels immédiats. Le caractère pluridisciplinaire de l'Instance commune devrait en outre lui permettre d'établir toutes les synergies nécessaires avec EUROPOL et les instances de coopération policière pour sélectionner les risques qui présentent un intérêt particulier pour les frontières extérieures.

37. Agir dans les pays tiers et avec les pays tiers afin d'identifier les risques en amont de la frontière extérieure.

Deux axes peuvent structurer l'analyse des risques dans des pays tiers pour assurer un haut niveau de sécurité des frontières extérieures de l'Union européenne: une action en direction des consulats des Etats membres [43] et une action en direction des officiers de liaison et attachés de police. La coopération consulaire locale établie par l'Instruction consulaire commune [44] et la politique des visas doivent contribuer à la protection des frontières extérieures des Etats membres de l'Union. L'envoi d'officiers de liaison dans des pays tiers pourrait être moins ponctuel dans le temps et dans l'espace. Le rôle des officiers de liaison et des attachés de police affectés auprès des ambassades de certains Etats membres pourrait être accru et agir dans l'intérêt de tous les Etats membres, afin que la coopération consulaire couvre des domaines plus larges et contribue mieux à la prévention du risque terroriste.

[43] Le cas échéant en direction des bureaux communs de délivrance des visas.

[44] La décision du Comité exécutif Schengen qui a adopté l'Instruction consulaire commune a été publiée au Journal Officiel L 239 du 22 septembre 2000 (page 317). Elle a reçu une base juridique dans l'Union européenne, conformément à la décision du Conseil 1999/436/CE du 20 mai 1999

38. Comment identifier les risques sur le lieu même de la frontière extérieure.

Plusieurs axes pourraient ici orienter le travail d'analyse des risques aux points de passages frontaliers:

a) L'optimisation des bonnes pratiques de contrôle et de surveillance: le Catalogue des bonnes pratiques Schengen devrait faciliter l'analyse des risques, notamment dans le domaine des frontières maritimes. Les différentes formes d'organisation du travail pourraient être analysées sous l'angle de leur fiabilité par rapport à la sécurité des frontières extérieures et leur souplesse d'adaptation aux fluctuations des besoins.

b) La veille technologique: l'analyse du risque devrait anticiper les conséquences des progrès technologiques sur le travail des garde frontières, par exemple pour l'utilisation des bases de données électroniques, des données biométriques numérisées ou des moyens de surveillance des frontières extérieures par télédétection. A l'instant où l'Union vient de choisir de développer un instrument tel que Galileo, ses possibilités d'utilisation pour la surveillance des flux traversant les frontières extérieures, sont à signaler.

c) Les questions pratiques de coopération quotidienne avec les pays tiers limitrophes aux frontières extérieures terrestres: l'analyse des risques pourrait rechercher une organisation des contrôles économe en temps et en infrastructures [45], favorable à la coopération transfrontalière. Sans déléguer de facto une partie de la surveillance ou du contrôle de la frontière extérieure à un pays tiers, il s'agirait d'identifier des flux à risque dès leur passage ou leur naissance dans des pays ou territoires tiers, souvent limitrophes, avec le concours de ces derniers;

[45] Les Bureaux à Contrôles Nationaux Juxtaposés (BCNJ) sont appréciés par les Etats membres qui les ont pratiqués entre eux pendant plusieurs décennies avant l'application de la Convention de Schengen et qui continuent à les développer aux frontières terrestres avec des pays tiers.

d) Les "distorsions de sécurité" liées à la topographie de la frontière et à l'environnement régional.

e) L'amélioration et le développement d'une fonction de collecte de renseignements : l'analyse des risques devrait ici déterminer comment optimiser l'utilisation de la frontière extérieure comme "capteur d'information" sur les mouvements de personnes, de biens, d'objets et de véhicules, y compris, le cas échéant, le risque de trafics de stupéfiants.

39. Comment identifier et traiter les risques qui demandent une continuité d'action entre les garde frontières et d'autres autorités à l'intérieur du territoire.

Lors de la phase initiale consistant à déterminer les indicateurs pertinents pour l'analyse des risques, la nouvelle Instance commune de praticiens des frontières extérieures devrait examiner le type de renseignements utiles à collecter aux frontières extérieures. Cette analyse devrait également porter sur l'exploitation qui devrait en être faite dans l'intérêt de la sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation. Il s'agirait de:

a) sélectionner les types de missions qui gagneraient à être mises en relation, et qui sont exercées respectivement par les services de garde frontières et par les services situés à l'intérieur du territoire;

b) déterminer des catégories de renseignements qui devraient être échangées entre les services de garde frontières et les services situés à l'intérieur du territoire en vue de mener une action de répression, de prévention ou d'investigation liée à un risque suffisamment précis et susceptible de se manifester aux frontières extérieures.

A l'issue de cette analyse, l' Instance commune de praticiens des frontières extérieures devrait être en mesure de préciser le contenu que pourrait avoir PROSECUR.

 

III. d) Comment doter la politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures en personnels et en équipements inter-opérationnels

 

40. Les personnels et les équipements opérationnels utilisés pour le contrôle et la surveillance représentent la composante la plus tangible de la politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures. Leur efficacité devrait être accrue en recherchant une plus grande convergence entre les politiques nationales dans ce domaine.

41. Comment développer la complémentarité entre les politiques nationales du personnel et de la formation de ce dernier.

La convergence des politiques nationales du personnel devrait avoir pour objectifs de réduire progressivement les disparités quantitatives et qualitatives susceptibles de créer aux frontières extérieures des "distorsions de sécurité" entre les Etats membres.

La mise au point d'un tronc commun pour la formation des garde frontières et de l'encadrement intermédiaire, et l'organisation régulière de stages de perfectionnement pourrait être envisagées à très court terme. La formation des garde frontières à la dimension européenne de leurs missions devrait bénéficier d'une attention toute particulière, notamment par l'apprentissage de langues, l'acquisition des notions essentielles sur les compétences et le statut des garde frontières des autres Etats membres, ainsi que le développement de stages d'immersion dans un service de garde frontières d'un autre Etat membre [46]. La formation des agents pourrait aussi renforcer le caractère intégré de la gestion des frontières extérieures, en les familiarisant avec les missions des services qui concourent à la sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation, et avec les missions des services consulaires et officiers de liaison en poste dans des pays tiers. Il est également important d'assurer une formation des garde frontières pour le respect des droits et de la protection des demandeurs d'asile.

[46] Le nouveau programme ARGO servira, sans doute, de support, dans un premier temps.

42. A ce propos il conviendrait de confier à l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures la tâche de concevoir un curriculum spécifique de formation des garde frontières, s'appuyant sur le réseau d'instituts de formation nationaux, pour parvenir, in fine, à un collège européen des garde frontières.

43. Comment développer la complémentarité entre les politiques nationales pour les équipements opérationnels

La convergence des politiques nationales devrait aussi être recherchée en matière d'équipements des services de garde frontières, d'infrastructures fixes, d'équipements mobiles et de télécommunication.

Le développement des points de passage autorisés aux frontières extérieures terrestres (postes routiers ou ferroviaires), dans les ports et les aéroports est surtout fonction de l'évolution des mouvements des personnes, des échanges économiques et des services. Une bonne concertation entre les pouvoirs publics et les agents économiques privés pour l'ouverture de nouveaux points de passage autorisés serait souhaitable, de même qu'une mise en cohérence avec les grandes politiques de transports décidées au niveau de l'Union européenne. A cet égard, à l'approche du moment où de nouveaux Etats membres seront autorisés à appliquer pleinement l'acquis de Schengen, les stratégies d'investissements des Etats membres et des pays candidats aux futures frontières intérieures terrestres, mériteront d'être infléchies et mises en cohérence avec la politique commune de gestion des frontières extérieures.

44. Une politique commune dans le domaine des infrastructures fixes pourrait également inclure le développement de nouvelles technologies susceptibles de faciliter les contrôles aux points de passage frontaliers et la surveillance entre les points de passage. La surveillance des côtes par radar ou satellites, mériteraient une politique mieux coordonnée entre les Etats membres afin d'assurer un niveau plus homogène de sécurité. La situation géographique de certains Etats membres mériterait un partage du fardeau pour un bon fonctionnement des infrastructures fixes et mobiles de contrôle ou de surveillance dont profiteront tous les Etats membres. Le système Galileo est un exemple d'outil européen de haute technologie susceptible de donner une nouvelle dimension à la politique commune de surveillance et de contrôle des frontières extérieures. [47]

[47] L'Union européenne se dote actuellement du système GALILEO de radionavigation par satellite, qui devrait être opérationnel à partir de 2008. Ce système, qui sera renforcé par des stations terrestres, disposera notamment d'un signal gouvernemental crypté et protégé.

La convergence des politiques nationales devrait également rechercher la plus grande inter-opérabilité entre les équipements mobiles des Etats membres [48]. Il s'agirait également de rechercher leur plus grande mobilité géographique, de manière à pouvoir les déplacer aisément d'un Etat membre à l'autre en fonction des fluctuations des besoins. Le cas échéant, des équipements particulièrement onéreux tels qu'un réseau de surveillance des frontières maritimes par satellite devraient être communs.

[48] Véhicules pour effectuer des patrouilles aux frontières terrestres, vedettes maritimes pour la surveillance des côtes, hélicoptères ou avions de surveillance capables de fournir des renseignements à des véhicules terrestres ou des vedettes maritimes.

 

III. e) D'un partage du fardeau financier entre les Etats membres à un Corps européen de garde frontières

 

45. La Commission est d'avis qu'il faudrait à terme établir un mécanisme de partage financier du fardeau entre les Etats membres mettant à contribution les moyens existants de financement nationaux et un support budgétaire de l'Union. Ce partage financier devrait aussi à terme être complété par un partage du fardeau en forces opérationnelles, grâce à la création d'un Corps européen de garde frontières, une fois surmontées les difficultés constitutionnelles des Etats membres. La Commission ne manquera pas de procéder à une première évaluation des incidences financières, lorsque des actions précises seront identifiées en fonction des options qui pourraient être retenues.

46. Support budgétaire pour un partage financier du fardeau.

La politique commune de gestion intégrée des frontières extérieures devrait également se fixer pour objectif un véritable partage du fardeau financier ainsi qu'un partage du fardeau en équipement et en ressources humaines. Actuellement ce fardeau n'est pas partagé de manière équilibrée entre les Etats membres. Certains d'entre eux doivent, en raison de leur situation géographique, contrôler et surveiller dans l'intérêt commun, des frontières extérieures maritimes ou terrestres très exposées et très longues, alors que d'autres Etats membres n'ont plus comme frontière extérieure que les aéroports. Il est également dans l'intérêt de ces derniers de participer à l'effort commun de protection de toutes les frontières extérieures, étant donné que la sécurité de l'ensemble de l'espace sans frontières intérieures en dépend. Un partage du fardeau ne devrait pas avoir pour finalité de financer l'intégralité des contrôles et de la surveillance des frontières extérieures par le budget communautaire. Les budgets nationaux resteraient les principales ressources affectées à cette dépense. Néanmoins, une option pourrait consister à utiliser le support budgétaire de la Communauté pour établir un mécanisme de redistribution financière entre Etats membres ainsi que pour financer à plus long terme des acquisitions de matériels communs, en particulier dans l'hypothèse de la création d'un Corps européen de garde frontières. A court terme, le programme ARGO devrait pouvoir financer les besoins les plus pressants de formation commune par exemple. Il est aussi à rappeler que les pays candidats bénéficient déjà de financement très substantiels dans le cadre des programmes PHARE pour se doter de moyens de contrôle et de surveillance des frontières extérieures efficaces et compatibles avec leur adhésion à l'Union européenne.

Dans tous les cas, quelles que soient les options pour l'utilisation du support budgétaire communautaire, celles-ci devraient sans doute avoir pour première finalité d'éviter les contributions financières fixées par accords bilatéraux entre Etats membres, rapidement complexes et peu équitables. Ce pourrait aussi être un gage de stabilité et de prévisibilité pour les Etats membres, de plus grande transparence pour le Parlement, et de gestion rationnelle grâce au contrôle de la Cour des Comptes. A terme, un partage du fardeau entre Etats pourrait permettre également d'envisager un partage du fardeau financier entre les services, en unifiant dans un même cadre budgétaire le financement de:

- les activités de contrôle et de surveillance du franchissement des frontières extérieures pour des personnes et des marchandises [49];

[49] Des synergies pourraient être examinées avec le financement du fonctionnement des frontières extérieures en matière douanière, bien qu'aucun financement explicite ne soit prévu dans le budget communautaire, étant donné que les Etats membres retiennent 25% des ressources propres perçues par leurs administrations douanières.

- les instruments utilisés pour l'échange et le traitement d'informations et de renseignements qui serait éventuellement établi entre les autorités opérant, d'une part, aux frontières extérieures et celles opérant, d'autre part, à l'intérieur du territoire de l'espace commun de libre circulation.

Le moment venu, la Commission examinera de manière approfondie tous les aspects budgétaires, juridiques et institutionnels pouvant découler des différentes options envisageables.

47. Vers un Corps européen de garde frontières

La Commission préconise que les services nationaux des Etats membres puissent recevoir l'appui d'un Corps européen de garde frontières. En un premier temps il pourrait exercer de réelles missions de surveillance aux frontières extérieures par des équipes mixtes composées de diverses nationalités, en commençant peut-être par les frontières maritimes. En effet, l'expérience commune semble pour l'instant la moins développée dans ce domaine, par comparaison avec certaines coopérations bilatérales qui existent entre Etats membres pour les frontières terrestres ou aériennes. Les tâches opérationnelles devront naturellement faire l'objet d'actes législatifs, car il en va de la clarté et de la sécurité juridique des missions de ce Corps européen, sans oublier le nécessaire contrôle juridictionnel et démocratique qui doit pouvoir entourer ses missions. En tout état de cause, dans l'immédiat, ce Corps ne pourra se substituer aux autorités nationales pour maintenir l'ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure de l'Etat d'accueil, dans le respect de l'article 64.1 du TCE.

48. En l'état actuel de la situation, on peut estimer qu'un Corps européen de garde frontières devrait être conçu et fonctionner dans le respect des principes élémentaires suivants [50]:

[50] L'étude de faisabilité, dont la responsabilité a été confiée à l'Italie, sur le thème d'une "Police européenne desfrontières" apportera une contribution à la réflexion sur ce que l''on pourrait appeler un "Corps européen de garde frontières". Cette terminologie permet de transcender les différences d'appellations, de statut et de compétences des agents qui exercent actuellement des missions de contrôle et de surveillance.

- assurer dans un premier temps des missions de surveillance aux frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne [51]; dans un deuxième temps, assurer des missions de contrôle aux points de passages frontaliers ;

[51] Il s'agirait dans un premier temps de surveiller ou contrôler les frontières extérieures des Etats membres autorisés à appliquer l'intégralité de l'acquis de Schengen. Dans une étape ultérieure, des formules de coopérations renforcées pourraient éventuellement permettre d'engager le Corps européen de garde frontières dans des missions de surveillances des frontières extérieures de l'espace douanier communautaire y compris sur le territoire d'Etats membres qui n'appliquent pas l'intégralité de l'acquis de Schengen.

- être composé d'agents possédant la plénitude des prérogatives de puissance publique nécessaires à l'accomplissement des missions mentionnées ci-dessus, indépendamment de leur nationalité et du lieu de leur affectation;

- être placé sous le commandement opérationnel de l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures;

- respecter la compétence des autorités nationales locales pour les matières qui ne sont pas couvertes par le titre IV [52]ou le titre X [53] du TCE, ni par aucune autre disposition de droit communautaire d'application directe;

[52] "Visa, asile, immigration et autres politiques liées à la libre circulation des personnes"

[53] "La coopération douanière"

- être ouvert à tous les niveaux hiérarchiques à tout ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne [54] , sous réserve de satisfaire aux exigences professionnelles et déontologiques requises.

[54] La Norvège et l'Islande devraient être également associées pour les missions du Corps européen de garde frontières résultant de l'application de l'acquis de Schengen.

49. La principale difficulté à surmonter pour créer un Corps européen de garde frontières semble liée à l'octroi de prérogatives de puissance publique à des agents du Corps européen qui ne possèdent pas la nationalité de l'Etat membre où ils sont affectés. Il s'agit d'une question fondamentale pour des raisons constitutionnelles. Un autre écueil pourrait être le mode de recrutement des agents ainsi que leurs conditions statutaires et disciplinaires. Sans doute doit-on envisager que l'essentiel des effectifs de ce Corps européen soient constitués par des personnels mis à disposition temporairement par les Etats membres pour une durée déterminée. En cas de crise, ce noyau stable d'effectifs pourrait être complété si nécessaire par un vivier d'agents nationaux qui aurait fait l'objet d'une présélection et seraient considérés comme des réservistes mobilisables dans de brefs délais par l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures.

L'équipement du Corps européen devrait être prévu par le budget de la Communauté afin que l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures n'ait pas à trancher des arbitrages délicats entre priorités nationales et priorités de l'Union pour l'utilisation de certains équipements mobiles.

50. Les tâches inséparables de l'accomplissement effectif de missions communes de surveillance devraient requérir l'autorisation de:

- contrôler les pièces d'identité, documents de voyage et visas de personnes qui franchissent légalement ou illégalement la frontière extérieure;

- interroger des étrangers sur les motifs de leur séjour dans l'espace commun de libre circulation, ou sur les raisons qui les ont conduits à franchir la frontière extérieure en dehors des points de passage autorisés;

- monter à bord d'un navire civil ou d'une embarcation dans les eaux territoriales d'un Etat membre pour interroger le capitaine sur son itinéraire et vérifier l'identité des passagers;

- notifier à une personne une admission ou un refus d'entrée dans l'espace commun de libre circulation;

- interpeller une personne pour la remettre aux autorités nationales compétentes pour prendre le cas échéant les mesures préventives ou répressives appropriées de nature administrative, policière, douanière ou judiciaire.

51. Ces compétences octroyées à des agents du Corps européen de garde frontières pourraient être limitées territorialement aux stricts besoins de la surveillance et des contrôles prévus à l'article 62 du TCE, sans préjudice des activités de coopération policière menées sur la base d'accords fondés sur les articles 7 et 47 de la Convention de Schengen. On pourrait envisager de les limiter, aux fins de la surveillance, à une bande de territoire de quelques centaines de mètres de large aux frontières extérieures terrestres, ainsi qu'à une portion des eaux territoriales. On pourrait éventuellement inclure quelques points de passage terrestres, maritimes et aériens, aux fins des contrôles. Ces portions de territoire dotées d'un statut dérogatoire devraient être exhaustivement énumérées et délimitées précisément par des cartes et plans, qui pourraient être annexés au Manuel commun des frontières extérieures.

 

IV. SOMMAIRE DES ACTIONS PRIORITAIRES

 

52. L'union européenne possède une législation communautaire relativement complète et détaillée dans le domaine du contrôle du franchissement des frontières extérieures par les personnes. Cet acquis communautaire est constitué essentiellement de l'acquis de Schengen qui a reçu à présent de nouvelles bases juridiques au titre IV du TCE. La difficulté actuelle réside plutôt dans le besoin d'une plus grande coordination opérationnelle et une plus grande complémentarité d'action entre les services nationaux qui sont chargés des frontières extérieures. On peut noter aussi qu'il existe un réel besoin de meilleure prise en compte des multiples dimensions de la sécurité des frontières extérieures susceptibles d'avoir un effet sur la sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation où les contrôles sur les personnes ont été supprimés entre les Etats membres.

Les actions envisagées s'inscrivent dans une évolution dynamique dans le temps, consistant à développer une politique commune de gestion des frontières extérieures. Certaines de ces actions peuvent commencer dans le cadre institutionnel actuel sans modification des traités. D'autres actions nécessiteront probablement une évolution des traités sur certaines points pour pouvoir être pleinement développées. Afin de donner une idée de l'horizon envisagé par la Commission pour les mesures ci-dessus, on peut considérer que le court terme désigne environ un an. Le moyen terme signifie qu'il serait souhaitable que la mesure puisse être opérationnelle avant que de nouveaux Etats membres soient autorisés à appliquer l'acquis de Schengen.

La Commission considère qu'il convient d'entreprendre à court et à moyen terme les actions suivantes :

 

a) Un corpus commun législatif

 

* A court terme et à traités inchangés, procéder à une refonte du Manuel Commun des frontières extérieures, suite à une proposition que la Commission entend soumettre dans un délai raisonnable.

* Rendre normatives certaines des recommandations du Catalogue des bonnes pratiques Schengen.

* Créer un mémento pratique à l'usage des garde frontières qui constituerait une compilation complète des règles de contrôle et de surveillance, découlant des instruments juridiques pertinents.

* Préciser le cadre juridique et les modalités pratiques en matière de « petit trafic frontalier », sur la base d'une initiative que la Commission entend soumettre à bref délai.

* A moyen terme et si nécessaire après modification des traités, préciser le cadre institutionnel et juridique des agents d'un futur Corps européen de garde frontières.

 

b) Un mécanisme commun et opérationnel de concertation et de coopération

 

* A court terme, créer une Instance commune de praticiens des frontières extérieures associant les responsables des services de garde frontières des Etats membres ainsi que, dans un esprit pluridisciplinaire, les représentants de divers services dont les missions contribuent également à la sécurité des frontières extérieures. A cette fin, l'Instance commune devrait avoir un rôle de « pilotage » pour effectuer l'évaluation intégrée des risques, coordonner des actions de terrain, favoriser une grande convergence dans le domaine du personnel et des équipements, exercer une fonction d'inspection et proposer des mesures opérationnelles d'urgence. La Commission évaluera, le moment venu, les aspects juridico-institutionnels de cette Instance commune en particulier pour déterminer les mesures qui nécessiteraient une modification des traités.

* A moyen terme et à traités inchangés, l'Instance commune de praticiens devrait explorer la faisabilité et la pertinence d'une procédure de sécurité des frontières extérieures, consistant à établir des échanges d'information et un traitement des renseignements entre les autorités concernées par la sécurité des frontières, éventuellement en établissant des points de contacts permanents.

 

c) Evaluation commune et intégrée des risques

 

* A court terme et à traités inchangés, l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures devrait établir la grille commune d'analyse des risques.

* A moyen terme et à traités inchangés, l'Instance commune devrait assurer le suivi permanent de l'évolution des risques en vue de tirer les conséquences pratiques pour le déploiement du personnel et des équipements aux frontières extérieures.

d) Des personnels et des équipements inter-opérationnels

* A court terme et à traités inchangés, l'Instance commune de praticiens des frontières extérieures devrait mettre au point un tronc commun de formation des garde frontières de l'Union européenne.

* Elle pourrait favoriser l'utilisation commune d'équipements mobiles de surveillance.

* A moyen terme et à traités inchangés, un réseau commun de surveillance des frontières extérieures par radar ou satellite (en particulier grâce au système Galileo) pourrait être créé, et une meilleure coordination au niveau de l'Union européenne pour les infrastructures fixes de contrôle aux frontières extérieures.

* De même, en s'appuyant sur les réseaux d'instituts de formation nationaux il conviendrait de concevoir la mise en place d'un collège européen des gardes frontières.

 

e) Le partage du fardeau entre les Etats membres et l'Union

 

* A court terme et à traités inchangés, organiser les fondations d'un financement communautaire des activités de la politique de gestion des frontières extérieures couvertes par le titre IV du TCE. La Commission ne manquera pas de procéder à une première évaluation des conséquences financières des mesures envisagées

* A moyen terme et probablement après modification des traités, créer un Corps européen de garde frontières, dont la première mission serait la « surveillance commune » des endroits les plus sensibles, notamment aux frontières maritimes, avant d'assurer des missions de contrôle aux points de passage frontaliers. La Commission évaluera, le moment venu, la nature juridique et institutionnelle de cette structure.

* Etablir à moyen terme une complémentarité d'action avec les services douaniers et instaurer des synergies pour créer des économies d'échelle en matière de financement communautaire de la gestion des frontières extérieures dans toute la mesure où les traités le permettent.

 

ANNEXE 1

 

TERMINOLOGIE UTILISEE POUR LA PRESENTE COMMUNICATION:

 

Contrôle aux frontières extérieures:

 

Ensemble des opérations effectuées par les autorités publiques des Etats membres aux points de passages frontaliers, afin de s'assurer en application de l'article 6 de la Convention de Schengen que les personnes, leur véhicule et les objets en leur possession, peuvent être autorisés à entrer dans l'espace commun de libre circulation ou autorisés à le quitter.

 

Surveillance des frontières extérieures:

 

Ensemble des activités et opérations effectuées par les autorités publiques des Etats membres aux frontières extérieures terrestres, maritimes et aériennes, afin d'empêcher, en application de l'article 6 de la Convention de Schengen, que des personnes contournent les points de passage frontaliers autorisés pour se soustraire aux contrôles et entrer illégalement dans l'espace commun de libre circulation.

 

Sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation:

 

Niveau de protection dont jouissent, dans l'espace commun de libre circulation, les personnes physiques et les personnes morales, les marchandises et les biens de toute nature, les capitaux, les prestations de service et toute transaction commerciale licite, ainsi que les droits de propriété intellectuelle ou artistique, contre les atteintes à leurs intérêts ou les menaces pour leur intégrité causées par:

- le non-respect des réglementations communautaires ou nationales;

- la criminalité, le terrorisme, la traite des êtres humains, les crimes contre les enfants, le trafic d'armes, la corruption et la fraude, telles que ces notions sont entendues à l'article 29 du TUE, ainsi que les trafics de stupéfiants.

 

Sécurité des frontières extérieures:

 

Capacité des frontières extérieures à constituer pour les Etats membres un barrage, ou du moins un filtre fiable, contre les menaces susceptibles d'affecter:

- l'efficacité des contrôles et de la surveillance;

- le respect des réglementations communautaires ou nationales;

- le niveau de sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation;

- l'ordre public ou la sécurité nationale des Etats membres, à l'exclusion de la défense militaire des frontières extérieures de l'Union européenne contre une agression menée ouvertement ou revendiquée par un ou plusieurs pays tiers.

 

Garde frontière:

 

Agent public affecté, soit à un point de passage frontalier terrestre, maritime ou aérien, soit le long de la frontière extérieure terrestre ou maritime ou à proximité immédiate de cette dernière, et qui est investi des prérogatives de puissance publique pour exercer une ou plusieurs des missions suivantes:

- effectuer les contrôles ou la surveillance des frontières extérieures;

- prendre à la frontière extérieure les mesures préventives ou repressives nécessaires pour le respect des réglementations communautaires, pour la sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation, pour l'ordre public ou pour la sécurité nationale;

- mener les enquêtes dont le fait générateur a été constaté au moment de l'exercice des contrôles ou de la surveillance des frontières extérieures.

 

Gestion des frontières extérieures:

 

Ensemble des activités exercées par les autorités publiques des Etats membres ayant pour objectif de:

- effectuer les contrôles et la surveillance des frontières extérieures prévus aux articles 5 et 6 de la Convention de Schengen;

- recueillir, analyser et échanger tout renseignement particulier ou toute information générale devant permettre aux garde frontières d'évaluer le risque qu'une personne, un objet ou un bien représentent pour la sécurité intérieure de l'espace commun de libre circulation, pour l'ordre public ou la sécurité nationale des Etats membres, et pour le respect général des réglementations communautaires;

- analyser l'évolution des menaces susceptibles d'affecter la sécurité des frontières extérieures et fixer en conséquence les priorités d'action des garde frontières;

- anticiper les besoins en personnels et en équipements pour assurer la sécurité des frontières extérieure.

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