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CJUE, 21 janvier 2016, aff. C-521/14, SOVAG c/ If Vahinkovakuutusyhtiö Oy

 

 

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

21 janvier 2016 (*)

 

 

«Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Règlement (CE) n° 44/2001 – Article 6, point 2 – Compétence judiciaire – Action en garantie ou en intervention intentée par un tiers contre une partie à un procès devant le tribunal saisi de la demande originaire»

Dans l’affaire C-521/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Korkein oikeus (Cour suprême, Finlande), par décision du 14 novembre 2014, parvenue à la Cour le 18 novembre 2014, dans la procédure

SOVAG – Schwarzmeer und Ostsee Versicherungs-Aktiengesellschaft

contre

If Vahinkovakuutusyhtiö Oy,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de la troisième chambre, faisant fonction de président de la quatrième chambre, MM. J. Malenovský, M. Safjan (rapporteur), Mmes A. Prechal et K. Jürimäe, juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. I. Illéssy, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 septembre 2015,

considérant les observations présentées:

–        pour SOVAG Schwarzmeer und Ostsee Versicherungs-Aktiengesellschaft, par Me R. Heß, Rechtsanwalt, et Me E. Salonen, asianajaja, ainsi que par M. A. Staudinger,

–        pour If Vahinkovakuutusyhtiö Oy, par M. J. Tanhuanpää,

–        pour le gouvernement finlandais, par M. J. Heliskoski, en qualité d’agent,

–        pour la Commission européenne, par MM. M. Wilderspin et E. Paasivirta, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale (JO 2001, L 12, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant SOVAG – Schwarzmeer und Ostsee Versicherungs-Aktiengesellschaft (ci-après «SOVAG»), compagnie d’assurances établie en Allemagne, à If Vahinkovakuutusyhtiö Oy (ci-après «If»), compagnie d’assurances établie en Finlande, au sujet d’une demande de remboursement d’une somme d’argent payée au titre de l’indemnisation de la victime d’un accident de la circulation.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3        Il ressort du considérant 2 du règlement n° 44/2001 que celui-ci vise, dans l’intérêt du bon fonctionnement du marché intérieur, à mettre en œuvre «[d]es dispositions permettant d’unifier les règles de conflit de juridictions en matière civile et commerciale ainsi que de simplifier les formalités en vue de la reconnaissance et de l’exécution rapides et simples des décisions émanant des États membres liés par le présent règlement».

4        Les considérants 11 à 13 et 15 de ce règlement énoncent:

«(11) Les règles de compétence doivent présenter un haut degré de prévisibilité et s’articuler autour de la compétence de principe du domicile du défendeur et cette compétence doit toujours être disponible, sauf dans quelques cas bien déterminés où la matière en litige ou l’autonomie des parties justifie un autre critère de rattachement. S’agissant des personnes morales, le domicile doit être défini de façon autonome de manière à accroître la transparence des règles communes et à éviter les conflits de juridictions.

(12)      Le for du domicile du défendeur doit être complété par d’autres fors autorisés en raison du lien étroit entre la juridiction et le litige ou en vue de faciliter une bonne administration de la justice.

(13)      S’agissant des contrats d’assurance, de consommation et de travail, il est opportun de protéger la partie la plus faible au moyen de règles de compétence plus favorables à ses intérêts que ne le sont les règles générales.

[...]

(15)      Le fonctionnement harmonieux de la justice commande de réduire au maximum la possibilité de procédures concurrentes et d’éviter que des décisions inconciliables ne soient rendues dans deux États membres. [...]»

5        Les règles de compétence figurent au chapitre II dudit règlement.

6        L’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 44/2001, figurant à la section 1 du chapitre II de celui-ci, intitulée «Dispositions générales», est libellé comme suit:

«Sous réserve des dispositions du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre.»

7        L’article 3, paragraphe 1, de ce règlement, qui figure à ladite section 1, dispose:

«Les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre ne peuvent être attraites devant les tribunaux d’un autre État membre qu’en vertu des règles énoncées aux sections 2 à 7 du présent chapitre.»

8        L’article 4 dudit règlement, figurant à cette même section, dispose:

«1.      Si le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, la compétence est, dans chaque État membre, réglée par la loi de cet État membre, sous réserve de l’application des dispositions des articles 22 et 23.

2.      Toute personne, quelle que soit sa nationalité, domiciliée sur le territoire d’un État membre, peut, comme les nationaux, y invoquer contre ce défendeur les règles de compétence qui y sont en vigueur et notamment celles prévues à l’annexe I.»

9        En vertu de l’article 5, point 5, du règlement n° 44/2001, figurant à la section 2 du chapitre II de celui-ci, intitulée «Compétences spéciales», une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut être attraite, dans un autre État membre s’il s’agit d’une contestation relative à l’exploitation d’une succursale, d’une agence ou de tout autre établissement, devant le tribunal du lieu de leur situation.

10      L’article 6 de ce règlement, figurant à ladite section 2, prévoit ce qui suit:

«[Une] personne [domiciliée sur le territoire d’un État membre] peut aussi être attraite:

1)      s’il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l’un d’eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément;

2)      s’il s’agit d’une demande en garantie ou d’une demande en intervention, devant le tribunal saisi de la demande originaire, à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé;

[...]»

11      L’article 8 dudit règlement, qui figure à la section 3 du chapitre II de celui-ci, intitulée «Compétence en matière d’assurances», énonce:

«En matière d’assurances, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice des dispositions de l’article 4 et de l’article 5, point 5.»

12      L’article 11 de ce même règlement, qui figure à ladite section 3, dispose:

«1.      En matière d’assurance de responsabilité, l’assureur peut également être appelé devant le tribunal saisi de l’action de la personne lésée contre l’assuré, si la loi de ce tribunal le permet.

2.      Les dispositions des articles 8, 9 et 10 sont applicables en cas d’action directe intentée par la victime contre l’assureur, lorsque l’action directe est possible.

3.      Si la loi relative à cette action directe prévoit la mise en cause du preneur d’assurance ou de l’assuré, le même tribunal sera aussi compétent à leur égard.»

 Le droit finlandais

13      L’article 5 du chapitre 18 du code de procédure judiciaire (Suomen oikeudenkäymiskaari) dispose:

«Lorsqu’une partie à une procédure juridictionnelle souhaite, pour le cas où elle succombe, présenter contre un tiers une demande en garantie, ou une demande de dommages et intérêts, ou toute autre demande équivalente, elle peut introduire l’action afférente à cette demande dans le cadre de la même procédure.

Toute personne qui, eu égard au résultat auquel la procédure est susceptible d’aboutir entre les parties à une procédure juridictionnelle, souhaite introduire une action afférente à une demande au sens [du premier alinéa] ci-dessus, à l’encontre des parties, ou de l’une d’entre elles, peut le faire dans le cadre de la même procédure.»

14      L’article 61 de la loi sur l’assurance accident [Tapaturmavakuutuslaki (1948/608)], du 20 août 1948 (ci-après la «loi sur l’assurance accident»), est libellé comme suit:

«Le bénéficiaire d’une indemnisation en application de la présente loi conserve le droit de percevoir, sur le fondement d’une autre loi, une indemnisation au titre des conséquences de la lésion subie, de la part de la personne qui l’a occasionnée ou d’une autre personne tenue de verser une indemnisation. Les sommes octroyées à ce titre ne peuvent toutefois pas être supérieures au montant correspondant à la différence entre l’indemnisation totale du préjudice et l’indemnisation consentie en application de la présente loi.

L’organisme assureur qui a dû indemniser le préjudice en application de la présente loi a le droit de récupérer le montant des indemnités auprès d’une personne tenue à indemnisation au sens [du premier alinéa] ci-dessus, sauf, toutefois, auprès des personnes ayant déjà satisfait de bonne foi à leur obligation d’indemnisation, ainsi qu’auprès des personnes tenues à l’indemnisation d’un préjudice sur le fondement de la loi relative à la responsabilité du fait des produits défectueux.

L’indemnisation bénéficiant ainsi à l’organisme assureur ne peut cependant pas être supérieure à celle à laquelle la personne lésée ou les proches de celles-ci auraient pu prétendre.»

 Le litige au principal et la question préjudicielle

15      Il ressort de la décision de renvoi que A, qui a été victime d’un accident de la circulation en Allemagne, a introduit une action contre SOVAG, auprès de laquelle était assuré le véhicule responsable du dommage, devant le Länsi-Uudenmaan käräjäoikeus (tribunal de première instance de l’Uusimaa occidental). A y concluait, notamment, à ce qu’il soit constaté qu’il avait subi un grave traumatisme crânien et cervical et qu’il présentait, à la suite de cet accident, une incapacité de travail permanente.

16      Cet accident de la circulation constituant également un accident de travail, au sens de la loi sur l’assurance accident, If, qui est établie en Finlande, a versé à A, sur le fondement de cette loi, des indemnités au titre dudit accident.

17      Après l’introduction de l’action de A contre SOVAG, If a elle-même introduit une action contre cette société devant la même juridiction de première instance. Elle concluait à ce qu’il soit constaté que A avait subi, en plus d’autres préjudices, un grave traumatisme crânien et cervical, en conséquence duquel il souffrait d’une incapacité de travail permanente. Par ailleurs, If a demandé, en se fondant sur l’article 61, paragraphe 2, de la loi sur l’assurance accident, que soit constatée l’obligation de SOVAG de lui rembourser toutes les indemnités, avec les intérêts y afférents, qu’elle avait versées ou verserait à A au titre de l’accident en question.

18      If a également conclu à ce que sa demande soit traitée dans le cadre de la même procédure que celle introduite par A contre SOVAG. De son côté, SOVAG a soulevé l’incompétence des juridictions finlandaises pour connaître de la demande introduite par If.

19      Par ordonnance du 20 décembre 2012, le Länsi-Uudenmaan käräjäoikeus (tribunal de première instance de l’Uusimaa occidental) a, sur le fondement des dispositions de la section 3 du chapitre II du règlement n° 44/2001, déclaré irrecevable l’action introduite par If contre SOVAG, en raison de l’incompétence des juridictions finlandaises.

20      Cette juridiction a considéré que, en vertu de l’article 8 de ce règlement, la compétence judiciaire ne peut, en matière d’assurances, être déterminée que par les dispositions de la section 3 du chapitre II dudit règlement, sans préjudice des articles 4 et 5, point 5, de ce même règlement.

21      Par un arrêt du 24 avril 2013, le Turun hovioikeus (cour d’appel de Turku), auprès duquel If avait interjeté appel de ladite ordonnance, a annulé cette dernière.

22      Selon cette juridiction, l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001, et non les dispositions de la section 3 du chapitre II de ce règlement, était applicable à l’affaire au principal, puisque l’action introduite par If contre SOVAG avait un lien direct avec le litige opposant A et SOVAG.

23      SOVAG a formé un pourvoi contre cet arrêt devant le Korkein oikeus (Cour suprême).

24      Selon la juridiction de renvoi, la question est posée de savoir si l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 couvre une situation telle que celle au principal, dans laquelle un tiers introduit une action contre une personne qui est partie à une procédure juridictionnelle originaire.

25      Dans ces conditions, le Korkein oikeus (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«L’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 doit-il être interprété en ce sens que son champ d’application s’étend à une action ayant pour objet une demande en garantie ou toute autre demande équivalente, étroitement liée à la demande originaire, et qu’un tiers introduit, conformément aux dispositions de la législation nationale, à l’encontre de l’une des parties pour qu’elle soit jugée dans le cadre de la même procédure?»

 Sur la question préjudicielle

26      Par sa question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens que son champ d’application s’étend à une action qu’un tiers a introduite, conformément aux dispositions nationales, contre le défendeur à la procédure originaire et ayant pour objet une demande étroitement liée à cette demande originaire, visant à obtenir le remboursement d’indemnités versées par ce tiers au demandeur à ladite procédure originaire.

27      À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 8 du règlement n° 44/2001, selon lequel la compétence en matière d’assurances est déterminée par les dispositions des articles 8 à 14 de celui-ci, sans préjudice des dispositions des articles 4 et 5, point 5, dudit règlement, ne mentionne pas l’article 6, point 2, de ce même règlement.

28      Selon SOVAG, cette dernière disposition n’est pas applicable en raison du fait que la section 3 du chapitre II du règlement n° 44/2001 établit, en matière d’assurances, un système autonome de répartition des compétences juridictionnelles.

29      Il y a néanmoins lieu de rappeler que l’objectif de cette section est, selon le considérant 13 du règlement n° 44/2001, de protéger la partie la plus faible, à savoir l’assuré, le bénéficiaire ou le souscripteur, au moyen de règles de compétence plus favorables à ses intérêts que ne le sont les règles générales.

30      Or, la demande en cause au principal s’inscrit dans des rapports entre professionnels du secteur des assurances et n’est pas susceptible d’affecter la situation procédurale d’une partie réputée plus faible. L’objectif de protéger cette dernière étant acquis une fois établie la compétence en vertu de la section 3 du chapitre II du règlement n° 44/2001, des développements procéduraux ultérieurs concernant les seuls rapports entre professionnels ne sauraient relever du champ d’application de cette section (voir, en ce sens, arrêts GIE Réunion européenne e.a., C‑77/04, EU:C:2005:327, points 20 et 23, ainsi que Vorarlberger Gebietskrankenkasse, C‑347/08, EU:C:2009:561, point 42).

31      Dès lors, une demande qui, comme celle en cause au principal, est introduite par un assureur contre un autre assureur n’étant pas couverte par ladite section, l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 trouvera à s’appliquer à une telle demande pour autant que cette dernière relève des hypothèses visées à ladite disposition.

32      À cet égard, il convient de tenir compte, dans un premier temps, des termes de l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001.

33      Le libellé de plusieurs des versions linguistiques de cette disposition, notamment celles en langue allemande, française, finnoise et suédoise, n’exclut pas que la juridiction saisie de la demande originaire puisse être compétente pour connaître du recours introduit par un tiers contre l’une des parties à cette demande originaire.

34      D’autres versions linguistiques de cette disposition, notamment celle en langue anglaise, semblent, en revanche, en limiter la portée à l’action introduite à l’encontre d’un tiers («a person domiciled in a Member State may also be sued: [...] as a third party»).

35      Selon une jurisprudence constante de la Cour, en cas de disparité entre les diverses versions linguistiques d’un texte du droit de l’Union, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (arrêt Jakutis et Kretingalės kooperatinė ŽŪB, C-103/14, EU:C:2015:752, point 103).

36      Il y a donc lieu, dans un second temps, de prendre en considération l’économie générale et la finalité du règlement n° 44/2001.

37      À cet égard, il convient de relever que, même si les règles de compétence spéciale sont d’interprétation stricte, ne permettant pas une interprétation allant au-delà des hypothèses envisagées de manière explicite par le règlement n° 44/2001 (voir, en ce sens, arrêt CDC Hydrogen Peroxide, C‑352/13, EU:C:2015:335, point 18), plusieurs objectifs de celui-ci plaident en faveur de l’interprétation selon laquelle un recours introduit par un tiers contre l’une des parties à la procédure originaire relève également du champ d’application de l’article 6, point 2, de ce règlement.

38      Ainsi, le considérant 15 dudit règlement souligne que le fonctionnement harmonieux de la justice commande de réduire au maximum la possibilité de procédures concurrentes et d’éviter que des décisions inconciliables ne soient rendues dans deux États membres, tandis que le considérant 12 de ce même règlement rappelle la nécessité de compléter le for du domicile du défendeur par d’autres fors autorisés en raison du lien étroit entre la juridiction et le litige ou en vue de faciliter une bonne administration de la justice.

39      Or, le traitement, dans le cadre de la même procédure, de la demande originaire et d’une demande introduite par un tiers contre l’une des parties à cette procédure et étroitement liée à la première demande, est de nature &agravagrave; favoriser les objectifs susvisés dans une situation où une action a été introduite par la personne lésée contre l’assureur du responsable des dommages et où un autre assureur, qui a déjà indemnisé partiellement cette personne de ces dommages, cherche à obtenir du premier assureur le remboursement de cette indemnisation.

40      En effet, en l’absence de cette possibilité, il existerait le risque que deux juridictions parviennent, dans une même affaire, à des solutions divergentes, dont la reconnaissance et l’exécution seraient alors incertaines.

41      Par ailleurs, la Cour a déjà eu l’occasion de relever, dans le cadre de la convention concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, signée à Bruxelles le 27 septembre 1968 (JO 1972, L 299, p. 32), que l’action introduite par l’assuré à l’encontre de l’assureur pour le dédommagement des conséquences de l’accident et l’action par laquelle ledit assureur attrait à la cause, à des fins de dédommagement, un autre assureur réputé avoir couvert le même événement devaient être considérées, respectivement, comme une demande originaire et une demande en garantie au sens de l’article 6, point 2, de la même convention (voir, en ce sens, arrêt GIE Réunion européenne e.a., C‑77/04, EU:C:2005:327, point 27).

42      La Cour s’est appuyée à cet égard sur le rapport sur cette convention, élaboré par M. Jenard (JO 1979, C 59, p. 1, en particulier p. 27).

43      L’interprétation fournie par la Cour en ce qui concerne les dispositions de ladite convention valant également pour celles du règlement n° 44/2001, lorsque les dispositions de ces instruments peuvent être qualifiées d’équivalentes (arrêt CDC Hydrogen Peroxide, C‑352/13, EU:C:2015:335, point 60), il convient de relever que tel est le cas en ce qui concerne l’article 6, point 2, de cette même convention et l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001.

44      Au regard de l’interprétation énoncée au point 41 du présent arrêt et des objectifs rappelés aux points 38 et 39 de celui-ci, il y a lieu de considérer que l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 s’applique à une demande telle que celle en cause au principal, ce que confirme, par ailleurs, la constatation, figurant dans ledit rapport élaboré par M. Jenard, selon laquelle la demande en intervention peut également couvrir les situations dans lesquelles un tiers devient partie à la procédure pour sauvegarder ses propres intérêts.

45      L’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 exigeant un lien entre, d’une part, la demande originaire et, d’autre part, la demande en intervention ou la demande en garantie qui y sont visées, il appartient au juge national saisi de la demande originaire de vérifier l’existence d’un tel lien, en ce sens qu’il doit s’assurer que la demande en intervention ou la demande en garantie ne visent pas qu’à traduire le défendeur hors de son tribunal (voir, en ce sens, arrêt GIE Réunion européenne e.a., C‑77/04, EU:C:2005:327, points 30 et 32).

46      À cet égard, le fait qu’une disposition nationale, telle que l’article 5, deuxième alinéa, du chapitre 18 du code de procédure judiciaire, soumette la faculté pour un tiers d’introduire une action dans la cadre d’une procédure juridictionnelle déjà ouverte à la condition que cette action entretienne un lien avec la demande originaire constitue, assurément, un élément de nature à éviter un détournement de l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001.

47      Il y a donc lieu de répondre à la question posée que l’article 6, point 2, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens que son champ d’application s’étend à une action qu’un tiers a introduite, conformément aux dispositions de la législation nationale, contre le défendeur à la procédure originaire et ayant pour objet une demande étroitement liée à cette demande originaire, visant à obtenir le remboursement d’indemnités versées par ce tiers au demandeur à ladite procédure originaire, à la condition que cette action n’ait pas été formée que pour traduire ledit défendeur hors de son tribunal.

 Sur les dépens

48      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

L’article 6, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, doit être interprété en ce sens que son champ d’application s’étend à une action qu’un tiers a introduite, conformément aux dispositions de la législation nationale, contre le défendeur à la procédure originaire et ayant pour objet une demande étroitement liée à cette demande originaire, visant à obtenir le remboursement d’indemnités versées par ce tiers au demandeur à ladite procédure originaire, à la condition que cette action n’ait pas été formée que pour traduire ledit défendeur hors de son tribunal.

Signatures


* Langue de procédure: le finnois.

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