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Communication de la Commission européenne du 16 avril 2004 sur la prévention et la lutte contre la criminalité organisée dans le secteur financier - COM/2004/0262 fina

 

Communication de la Commission européenne du 16 avril 2004 sur la prévention et la lutte contre la criminalité organisée dans le secteur financier

 

COM/2004/0262 final


SOMMAIRE

 

RÉSUMÉ

1. CADRAGE DU PROBLÈME

2. RÉCAPITULATIF DES MESURES DÉJÀ PRISES ET DES FUTURES ACTIONS POSSIBLES POUR LUTTER CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE ORGANISÉE

2.1. Blanchiment de capitaux

2.2. Législation communautaire existante contre le blanchissage de capitaux - Les première et deuxième directives antiblanchiment

2.3. La troisième directive antiblanchiment et les autres actions possibles

2.4. Autres dispositifs antiblanchiment existants et futures mesures possibles

2.5. Cellules de renseignement financier

2.6. Fraude (autre que portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés)

2.7. Protection des intérêts financiers de la Communauté

2.8. Protection de l'euro

3. OUTILS TRANSVERSAUX VISANT À RENFORCER LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE ORGANISÉE

3.1. Transparence de certaines entités juridiques

3.2. Coopération entre les secteurs privé et public

3.3. Enquêtes financières

3.4. Statistiques et données comparatives

3.5. Évaluation et analyse du risque criminel («crime proofing»)

3.6. Évaluation des politiques et suivi

3.7. Programmes de formation, ateliers et études

4. POLITIQUES D'APPUI À LA MISE EN bUVRE DE MESURES DE PRÉVENTION ET DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE ORGANISÉE

4.1. Mesures de financement pour lutter contre la criminalité financière organisée

4.2. Renforcer l'action extérieure dans la lutte contre la criminalité financière organisée

5. CONCLUSION

 

RÉSUMÉ

 

- L'objet de la présente communication est de passer en revue les actions entreprises pour prévenir et combattre la criminalité organisée dans le secteur financier («criminalité financière organisée»), ainsi que d'examiner les mesures susceptibles de renforcer la lutte contre ce type de criminalité. Aux fins de la présente communication, on entend par «criminalité financière organisée» les activités des groupes de criminalité organisée utilisant abusivement les systèmes financiers et de paiement en vue d'en tirer un gain financier, une définition assez large pour englober les scandales récents qui ont éclaboussé certaines sociétés.

- L'importance de la lutte contre la criminalité financière organisée ne réside pas simplement dans la répression d'une criminalité particulière, mais tient au fait qu'en cas de succès, elle s'attaque au fondement même des réseaux de criminalité organisée, à savoir la maximisation des profits par des moyens illicites. Le fait de priver les organisations criminelles des moyens de blanchir leurs capitaux ou de financer leurs agissements portera un coup sérieux à leur motivation et à leur fonctionnement.

- Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001, il apparaît de plus en plus clairement que les réseaux terroristes recourent aux méthodes de la criminalité organisée pour acquérir, transférer et blanchir des fonds. La pertinence de la présente communication s'étend donc aussi à la lutte contre le financement du terrorisme. Les questions spécifiquement liées au financement du terrorisme sont abordées de manière plus détaillée dans la communication de la Commission sur le terrorisme et d'autres formes graves de criminalité [1].

[1] Communication de la Commission sur les mesures à prendre pour lutter contre le terrorisme et d'autres formes graves de criminalité, et notamment pour améliorer l'échange d'informations, adoptée par la Commission le 29.3.2004 - COM(2004)221.

- Les enquêtes sur la criminalité financière organisée requièrent généralement une approche pluridisciplinaire, et en particulier l'intervention d'experts en comptabilité, audit, droit, fiscalité et questions bancaires. Une coopération entre secteurs public et privé, basée sur l'objectif commun d'une réduction des préjudices causés par la criminalité financière organisée, pourrait faciliter l'intervention des experts compétents et accroître la confiance de chacun dans la capacité et la détermination de l'autre à s'attaquer à cette criminalité.

- Les autorités répressives doivent être encouragées à entreprendre systématiquement des enquêtes financières qui ne se limitent pas au seul crime concerné, mais s'intéressent aussi aux réseaux criminels environnants, et notamment au dépistage des produits du crime, à la collecte de renseignements sur les faits et gestes des suspects, dans le respect de la législation sur la protection des données, et à l'identification des bénéficiaires réels de la criminalité financière organisée. Cela garantira aussi la mise en oeuvre de stratégies d'enquête fondées sur le renseignement.

- La criminalité financière organisée s'appuie sur des mécanismes de blanchiment complexes, profitant de la facilité avec laquelle il est possible de créer des entités légales, utilisant des prête-noms et recourant à divers procédés qui permettent d'empêcher l'identification du véritable bénéficiaire. La question de la transparence, qui englobe l'utilisation de paradis financiers et de structures ad hoc, comme l'a montré récemment le scandale Parmalat, doit donc être considérée comme un aspect important de la lutte contre la criminalité financière organisée.

- Pour mesurer l'ampleur de la criminalité financière organisée, évaluer l'efficacité des politiques et discerner les tendances et les menaces éventuelles, il convient de mettre en place un appareil statistique cohérent permettant la production de statistiques fiables et comparables sur cette forme de criminalité. Il faudrait également renforcer les systèmes qui permettent d'assurer le suivi des mesures de répression et des autres suites données aux informations remises aux cellules de renseignement financier conformément aux règles anti-blanchiment, de façon à mieux évaluer l'impact de ces règles.

- L'objectif premier des groupes de criminalité organisée est le profit. Il s'ensuit que la confiscation des produits et des instruments du crime est probablement la manière la plus efficace de combattre cette criminalité. Disposer de systèmes efficaces de saisie et de confiscation des actifs est manifestement une nécessité. Dans ce contexte, le recours à des organismes de recouvrement des avoirs dûment habilités, qui pourraient le cas échant, comme c'est le cas dans certains États membres, engager une procédure civile, est une idée à creuser.

- Sans méconnaître qu'il existe déjà des systèmes très poussés de lutte contre le blanchiment, la Commission pense qu'une évaluation de la criminalité financière organisée est absolument essentielle pour identifier les meilleures pratiques et savoir si des initiatives législatives ou autres s'imposent dans ce domaine. Il conviendrait donc de procéder en 2005 à une évaluation exhaustive des politiques et des mesures destinées à lutter contre la criminalité financière organisée dans l'UE.

 

1. CADRAGE DU PROBLÈME

 

La présente communication traite du problème de la criminalité organisée dans le secteur financier. Elle se focalise donc sur des délits non violents qui reposent généralement sur une utilisation abusive des systèmes financiers et/ou de paiement et génèrent des gains financiers illicites. Aux fins de la présente communication, la criminalité organisée dans le secteur financier («criminalité financière organisée») couvre donc tout un éventail d'activités illégales, en particulier le blanchiment d'argent, la fraude financière et la contrefaçon de l'euro, dès lors qu'elles sont le fait d'organisations criminelles. Ces dernières sont définies dans l'action commune du 21 décembre 1998 [2].

[2] Article 1er de l'action commune du Conseil du 21 décembre 1998 (98/733/JAI): «Aux fins de la présente action commune, on entend par «organisation criminelle»: l'association structurée, de plus de deux personnes, établie dans le temps, et agissant de façon concertée en vue de commettre des infractions punissables d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'un maximum d'au moins quatre ans ou d'une peine plus grave, que ces infractions constituent une fin en soi ou un moyen pour obtenir des avantages patrimoniaux, et, le cas échéant, influencer indûment le fonctionnement d'autorités publiques»

La présente communication, en se concentrant sur les mesures prises depuis le Conseil européen de Tampere en 1999 pour assurer un engagement plus déterminé dans la lutte contre le crime organisé au niveau de l'UE, poursuit un double objectif:

- en premier lieu, dresser un bilan des actions entreprises à ce jour, qu'elles visent spécifiquement la criminalité financière organisée ou qu'elles contribuent à la lutte globale contre ce type de criminalité; et

- en second lieu, identifier à partir de ce bilan les domaines où de nouvelles initiatives pourraient être nécessaires pour renforcer la lutte contre la criminalité financière organisée.

La criminalité financière est souvent perçue, à tort, comme une activité criminelle «sans victimes». Pourtant, la criminalité financière organisée, même si elle n'a pas toujours d'impact direct sur les individus (encore qu'il existe maints exemples de préjudice direct causé à des particuliers), n'en a pas moins un impact considérable sur la société, par les manques à gagner, la perte de confiance et la dégradation des comportements qu'elle entraîne. Si cette criminalité est importante, elle peut décourager la création de nouvelles entreprises, dissuader les investisseurs potentiels et fausser la concurrence.

Dans ce contexte, l'importance de la lutte contre la criminalité financière organisée ne tient pas seulement à la répression de l'acte criminel en tant que tel. Lorsqu'un tel acte ouvre la voie à d'autres agissements, peut-être plus graves encore, l'ouverture d'une enquête financière à son sujet devient un élément central de la stratégie de l'UE contre la criminalité organisée, car celle-ci ne peut survivre sans accès à l'argent ou à d'autres avoirs financiers. Si la répression du crime en tant que tel a un impact sur les activités des organisations criminelles, une répression ciblée sur sa finalité première, le profit, peut contribuer tout aussi efficacement, voire plus, à l'éradication de ces activités.

À cet égard, les considérations suivantes méritent une attention particulière:

- Aucune tentative n'a encore été faite au niveau communautaire pour définir précisément la «criminalité financière», qui recouvre un assez large éventail de types particuliers ou sous-catégories d'activités criminelles. Si l'on veut combattre efficacement la criminalité financière organisée, aux niveaux européen et international, il serait certainement très utile d'adopter un langage commun dans ce domaine. Cela pourrait faciliter une convergence de vues sur la stratégie à suivre et sur les meilleurs moyens de prévenir et de combattre cette criminalité.

- Le droit civil et les règles, procédures et sanctions administratives doivent devenir des composantes à part entière d'une stratégie efficace de prévention et de poursuite de la criminalité. Leur rôle est de compléter les dispositions du droit pénal, en particulier dans les cas où la poursuite effective des infractions criminelles ou civiles est impossible ou rendue difficile par l'inefficacité de la coopération judiciaire. Le fait que les autorités de régulation et de surveillance compétentes coopèrent pleinement les unes avec les autres sur le plan administratif et pour l'échange d'informations peut être un élément essentiel de la prévention et de la répression de la criminalité financière. Pour assurer l'efficacité de la lutte contre la criminalité financière organisée, il convient de définir, au niveau de l'UE, des politiques globales s'appuyant sur des dispositions de fond en droit pénal et en droit privé et prévoyant un dialogue réglementaire, dans le cadre d'une approche intégrée de la prévention et de la répression du crime.

 

2. RÉCAPITULATIF DES MESURES DÉJÀ PRISES ET DES FUTURES ACTIONS POSSIBLES POUR LUTTER CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE ORGANISÉE

 

2.1. Blanchiment de capitaux

 

La lutte contre le blanchiment de capitaux est depuis longtemps une priorité politique essentielle de l'Union européenne, qui découle de la nécessité de protéger le système financier de la contagion et des détournements et de soutenir les efforts de lutte contre la criminalité organisée dans le secteur financier. Le Conseil européen a déclaré dans les conclusions du sommet de Tampere que le blanchiment de capitaux était au coeur même de la criminalité organisée, qu'il devait être éradiqué partout où il existe, et que des mesures concrètes devaient être prises pour dépister, geler, saisir et confisquer les produits du crime [3].

[3] Conclusion 51 du Conseil européen de Tampere, 15 et 16 octobre 1999.

Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis, les instruments de protection contre le blanchiment de capitaux ont été étendus à un large éventail d'infractions graves, dont le financement du terrorisme [4].

[4] Une déclaration commune du Conseil et de la Commission modifiant le procès-verbal de la 2386ème session du Conseil Affaires générales du 19 novembre 2001 indique que les délits liés au financement du terrorisme constituent une infraction grave aux fins de la directive 91/308/CEE.

Le produit du crime n'est pas seulement une menace pour la stabilité sociale et politique; il compromet aussi la réputation et la stabilité des établissements financiers et du système bancaire et financier en général. C'est pourquoi la Commission a pris des mesures énergiques pour protéger le système financier des tentatives de détournement des blanchisseurs de capitaux. La Commission est déterminée à poursuivre cette tâche et à mettre au point une législation antiblanchiment adaptée à un système financier international toujours plus sophistiqué. Pour pouvoir être le plus efficaces possible, il est important que ces initiatives communautaires soient complétées par des mesures prises dans le cadre de la coopération entre États membres.

 

2.2. Législation communautaire existante contre le blanchissage de capitaux - Les première et deuxième directives anti-blanchiment

 

C'est la nécessité de protéger le système financier contre les détournements, et la crainte que l'application de mesures totalement divergentes dans ce domaine ne compromette le bon fonctionnement du marché intérieur, qui ont fourni à la Commission européenne les bases juridiques lui permettant de proposer une législation communautaire dans le cadre du traité. Deux directives communautaires ont été adoptées dans ce domaine, en 1991 et en 2001.

La directive de 1991 sur le blanchiment de capitaux [5] est le principal instrument de lutte contre le blanchiment. Parmi les Quarante recommandations du GAFI [6], elle a inscrit dans le droit européen celles qui traitaient spécifiquement du secteur financier. Ces recommandations du GAFI sont considérées comme la norme internationale de fait pour la lutte contre le blanchiment. Sur un point important, toutefois, la directive a une longueur d'avance sur le GAFI. Alors que les Quarante recommandations initiales considéraient le signalement des opérations de blanchiment comme une option, la directive en faisait déjà une obligation. Concrètement, elle impose aux établissements financiers d'identifier et de connaître leurs clients, de tenir des registres appropriés et d'organiser des programmes de formation à la lutte anti-blanchiment; le secret bancaire doit être levé lorsque cela s'avère nécessaire, et tout soupçon de blanchiment doit être signalé.

[5] Directive 91/308/CEE du Conseil, du 10 juin 1991, relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux. Cette première directive met en place un cadre de lutte contre le blanchiment au niveau des établissements de crédit et des institutions financières. Elle s'inspire des Quarante recommandations initiales du Groupe d'action financière (GAFI). Elle crée également un comité de contact (présidé par la Commission) chargé de veiller à sa transposition harmonieuse et de faciliter les consultations entre États membres.

[6] Le GAFI (Groupe d'Action Financière sur le blanchiment des capitaux), organisme intergouvernemental créé par le G-7 en 1989, est le principal organe international de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Il s'agit d'un «organe directeur», dont la tâche est d'impulser la volonté politique nécessaire à la mise en oeuvre de réformes législatives et réglementaires nationales dans ces domaines. Au fil des ans, le GAFI a obtenu des résultats concrets qui lui ont valu une véritable reconnaissance internationale. La Commission en est membre à part entière, au côté de tous les États membres. Pour de plus amples informations, voir le site: http:// www.fatf-gafi.org.

La directive impose aussi aux entités soumises à ces obligations de déclaration d'adopter une approche fondée sur le risque, en accordant une attention particulière aux transactions qu'elles jugent susceptibles, par leur nature, d'avoir un rapport avec le blanchiment de capitaux. Ces entités sont encouragées à détecter les aspects les plus vulnérables de leurs activités et à doser en conséquence leurs efforts de lutte contre le blanchiment, dans le cadre de leurs obligations légales.

Par rapport à cette première directive, la directive de 2001 sur le blanchiment de capitaux [7], que les États membres devaient transposer en droit interne pour le 15 juin 2003 [8], étend la notion de criminalité à un plus large éventail d'infractions graves, et les obligations de lutte anti-blanchiment à d'autres professions et activités. Outre le secteur financier, elle s'applique aux contrôleurs des comptes, aux services de comptabilité externes, aux notaires et avocats, aux casinos et aux agents immobiliers. Les professions juridiques ne sont cependant concernées que pour certaines activités à haut risque (transfert de biens, transactions financières et transactions pour le compte de sociétés). La Commission n'ignore pas que la mise en oeuvre de mesures anti-blanchiment a dans une certaine mesure conduit à l'abandon des formes traditionnelles de blanchiment au profit de nouvelles méthodes, dont les paiements en espèces. Cette forme de blanchiment anonyme connaît un succès croissant. Le recours aux paiements en espèces de gros montants est donc également pris en considération dans la directive, qui impose aux États membres d'étendre les obligations qu'elle prévoit à certains marchands d'articles de grande valeur, pour tous les paiements effectués en espèces et portant sur une somme égale ou supérieure à 15 000 euros. La question de savoir s'il faut modifier les directives existantes en renforçant les mesures anti-blanchiment pour les paiements en espèces de gros montant est actuellement à l'étude.

[7] Directive 97/2001/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive 91/308/CEE du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux.

[8] Fin janvier 2004, neuf États membres seulement avaient transposé en droit interne cette deuxième directive antiblanchiment. Ces États membres sont: le Danemark, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Irlande, le Royaume-Uni, l'Espagne, la Belgique, l'Autriche et la Finlande.

La directive vise aussi un retour d'information approprié et l'échange d'informations sur le blanchiment entre les secteurs public et privé, en imposant aux États membres de veiller à ce que les établissements et les personnes relevant de la directive puissent obtenir des pouvoirs publics des informations à jour sur les pratiques de blanchiment et sur les indices permettant d'identifier les transactions suspectes. La Commission réfléchira à la nécessité de prendre d'autres mesures en la matière. Les acteurs du secteur privé ne resteront vigilants et déterminés que s'ils voient que les frais qui leur sont imposés donnent des résultats valables.

 

2.3. La troisième directive anti-blanchiment et les autres actions possibles

 

La Commission, comme la plupart des États membres, jugeait nécessaire d'attendre les résultats des négociations sur la révision des Quarante recommandations du GAFI avant d'envisager de nouvelles mesures législatives dans ce domaine. Le GAFI a adopté ses recommandations révisées lors de sa réunion plénière de juin 2003 [9].

[9] La version révisée des Quarante recommandations du GAFI est disponible à l'adresse www.fatf-gafi.org. La dernière révision en date renforce considérablement le principe d'identification de la clientèle («connaissez vos clients»), élargit le champ d'application de l'infraction de blanchiment de capitaux et va dans le sens d'un renforcement de la coopération internationale contre le blanchiment. En outre, ces Quarante recommandations révisées étoffent considérablement la liste des personnes et établissements qui doivent participer activement à la lutte contre le blanchiment.

La directive de 2001 prévoit une troisième directive visant les infractions principales. La Commission vient d'annoncer son intention de soumettre une proposition en ce sens d'ici à juin 2004. Sur ce point, la Commission prône un alignement total sur la définition des infractions graves figurant dans l'action commune 98/699/JAI [10]. En outre, les États membres se sont engagés à mettre en oeuvre les Quarante recommandations révisées du GAFI. Cette proposition de troisième directive devrait définir les modifications à apporter à la directive actuelle pour garantir que les exigences de l'UE ne soient jamais en deçà des normes internationales du GAFI, notamment en ce qui concerne le devoir de vigilance vis-à-vis de la clientèle, devoir qui, au vu du récent scandale Parmalat, devrait continuer d'être considéré comme un instrument essentiel de la lutte contre le blanchiment de capitaux.

[10] «Infractions punies d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté d'une durée maximale c'est-à-dire supérieure à un an, ou, dans les États dont le système juridique prévoit pour les infractions un seuil minimal, les infractions punies d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté d'une durée minimale supérieure à six mois» (JO L 333 du 9.12.1998) (définition remplacée par la décision-cadre 2001/500/JAI du Conseil, JO L 182 du 5.7.2001).

La Commission réfléchit à l'opportunité d'étendre l'interdiction de blanchiment édictée par la deuxième directive de manière à ce qu'elle vise spécifiquement le financement du terrorisme. L'obligation de signaler les opérations de blanchiment et les autres obligations imposées par la directive s'appliqueraient alors à toute transaction pouvant être l'indice d'un financement du terrorisme. La définition actuelle du blanchiment de capitaux ne tient pas suffisamment compte des cas où des fonds ou biens légitimement acquis sont en fait destinés à financer des activités terroristes, ou détournés à cette fin.

La Commission envisage également d'inscrire dans sa proposition de directive le principe général selon lequel une protection appropriée doit être accordée aux salariés des établissements de crédit et établissements financiers qui font des déclarations de transactions suspectes (DTS). Elle craint en effet que les menaces que pourraient recevoir ces salariés n'aient un effet contreproductif sur la lutte contre le blanchiment.

Le GAFI a adopté le 14 février 2003 des notes d'interprétation sur deux de ses Huit recommandations spéciales concernant le financement du terrorisme [11] (il s'agit des recommandations spéciales VI, sur les systèmes alternatifs de transfert de fonds, et VII, sur les virements électroniques), toutes deux relatives aux paiements [12]. La Commission envisage la mise en place d'un espace unique de paiement pour tous les types de paiements et est donc favorable à l'inclusion de ces exigences dans le droit communautaire [13]. Le secteur des paiements réclame des règles communautaires totalement harmonisées sur ces questions, afin de garantir des conditions de concurrence égales (notamment en ce qui concerne les prestataires de services de paiement, l'accès, le coût de mise en conformité) et pour des raisons d'efficacité (mêmes exigences d'information sur les donneurs d'ordres, ce qui permettrait un traitement de bout en bout des opérations).

[11] Ces Huit recommandations spéciales, définies d'un commun accord et adoptées par le GAFI en octobre 2003, constituent la nouvelle norme internationale de lutte contre le financement du terrorisme. Leur mise en oeuvre devrait empêcher les terroristes et ceux qui les soutiennent d'accéder au système financier international.

[12] L'objectif de la recommandation spéciale VI est d'accroître la transparence des flux de paiement, en faisant en sorte que des mesures cohérentes contre le blanchiment et le financement du terrorisme soient appliquées dans les différentes juridictions à tous les systèmes de transfert de fonds ou de valeurs, et plus particulièrement aux systèmes traditionnellement en marge du secteur financier classique.

[13] Voir à ce propos la communication de la Commission relative à un nouveau cadre juridique pour les paiements dans le marché intérieur, COM(2003) 718 final, disponible à l'adresse http://europa.eu.int/comm/internal_market/ payments/framework/index_fr.htm

La Commission continuera de réfléchir en 2004 au partage des données relatives à la lutte contre le blanchiment (retour d'information) entre secteur public et secteur privé, et au risque que représentent les paiements en espèces de gros montant. En ce qui concerne le partage d'informations, elle suivra les mesures prises par les secteurs public et privé, afin d'établir si de nouvelles initiatives communautaires sont nécessaires dans ce domaine.

La Commission proposera également une amélioration des procédures d'identification des titulaires et des bénéficiaires de comptes bancaires. Le protocole (non encore ratifié) de 2001 à la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l'Union européenne [14] contient des dispositions traitant des demandes d'information sur les comptes et transactions bancaires, ainsi que des demandes de suivi de telles transactions, mais il est clair que les renseignements nécessaires ne sont pas toujours faciles à obtenir. Les banques devraient donc être tenues de répondre rapidement aux demandes de renseignement des autorités compétentes.

[14] JO C 326 du 21.11.2001.

Outre les deux directives communautaires anti-blanchiment mentionnées au point 2.2, la Commission a présenté le 2 juillet 2002 une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la prévention du blanchiment de capitaux par la coopération douanière (JO C 227 du 24.9.2002, p. 574). Les directives anti-blanchiment prévoient notamment le contrôle des fonds qui transitent par les établissements financiers. Or, ce mécanisme risque d'être pris en défaut par l'utilisation d'importants transferts en espèces, qui ne sont pas soumis à un contrôle uniforme dans toute la Communauté. Cette proposition prévoit donc une stratégie uniforme de contrôle des transferts d'espèces, basée sur un système de déclaration des montants de plus de 15 000 euros. Cette mesure, conjuguée aux directives en question, devrait faciliter la lutte contre le blanchiment de capitaux.

La Commission continuera également de contrôler et d'évaluer les risques de détournement d'Internet et des nouvelles technologies de communication à des fins de blanchiment. Le recours croissant à Internet pour toutes sortes de transactions financières fait craindre que certains transferts n'échappent aux contrôles et aux mécanismes de surveillance institués par les dispositions anti-blanchiment de l'UE.

 

2.4. Autres dispositifs anti-blanchiment existants et futures mesures possibles

 

L'action commune du 3 décembre 1998 concernant l'identification, le dépistage, le gel ou la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime [15] complète les directives anti-blanchiment en répondant à un besoin d'amélioration de la coopération entre États membres dans ce domaine. Elle a été partiellement remplacée par la décision-cadre du Conseil, du 26 juin 2001, concernant le blanchiment d'argent, l'identification, le dépistage, le gel ou la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime [16]. Cette décision-cadre impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour qu'aucune réserve ne soit formulée ou maintenue à l'encontre de certains articles de la convention de Strasbourg de 1990 [17], qui les obligent à prévoir des mesures de confiscation et à sanctionner pénalement le blanchiment du produit d'infractions graves. Elle leur impose également de veiller à ce que leur législation nationale permette la confiscation de biens d'une valeur correspondant à celle du produit du crime.

[15] Action commune 98/699/JAI, JO L 333 du 9.12.1998.

[16] 2001/500/JAI, JO L 182 du 5.7.2001. La Commission présentera avant la fin 2003 un rapport sur la mise en oeuvre de cette décision-cadre, afin de permettre au Conseil d'apprécier si les mesures nécessaires pour se conformer à la décision-cadre ont bien été prises.

[17] Convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, novembre 1990.

Un acte du Conseil du 30 novembre 2000 [18] étend la compétence d'Europol au blanchiment de capitaux en général, quel que soit le type d'infraction à l'origine des capitaux blanchis. À ce jour, six États membres seulement [19] ont ratifié le protocole; les autres États membres devraient être encouragés à le faire dès que possible.

[18] Acte du Conseil du 30 novembre 2000, JO C 358 du 13.12. 2000.

[19] En février 2004, le protocole avait été ratifié par l'Allemagne, l'Espagne, la France, la Grèce, le Portugal et la Suède.

Le protocole à la convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale établi par l'acte du Conseil du 16 octobre 2001 [20] impose aux autorités des États membres de fournir des renseignements sur les comptes en banque et les opérations bancaires des personnes signalées. Les États membres ne peuvent pas invoquer le secret bancaire pour refuser de coopérer dans ce contexte. Ce protocole est un instrument potentiellement important pour la lutte contre la criminalité financière organisée, mais il doit encore être ratifié; les États membres devraient donc accélérer leurs efforts pour lui donner pleinement effet [21].

[20] JO C 326 du 21.11.2001.

[21] Au 1er novembre 2003, aucun État membre ne l'avait encore ratifié.

Le projet de décision-cadre du Conseil relative à la confiscation des produits, des instruments et des biens du crime [22] a fait l'objet d'un accord politique lors du Conseil Justice et affaires intérieures du 19 décembre 2002. Cette proposition vise la mise en place de règles efficaces pour la confiscation des produits du crime, notamment pour la charge de la preuve concernant l'origine d'avoirs détenus par des personnes convaincues d'infractions liées à la criminalité organisée. La décision-cadre relative à l'exécution des décisions de gel de biens ou d'éléments de preuve [23] instaure des règles pour la reconnaissance et l'exécution des décisions de gel prises par les autorités judiciaires des États membres dans le cadre de procédures pénales. Un projet de décision-cadre prévoit une approche similaire pour l'exécution dans l'UE des décisions de confiscation [24].

[22] JO C 184 du 2.8.2002, p. 3.

[23] Décision-cadre 2003/577/JAI du Conseil, du 22 juillet 2003, JO L 196 du 2.8.2003, p. 45.

[24] JO C 184 du 2.8.2002, p. 8.

Futures mesures possibles:

* Suivi actif des dossiers («case tracking»): les États membres sont encouragés à mettre en place des systèmes cohérents permettant le suivi des renseignements fournis par les entités soumises à des obligations de déclaration aux fins de la lutte anti-blanchiment, de manière à pouvoir faire état des mesures répressives ou autres suites données aux déclarations de transactions suspectes («DTS»). Cela permettrait la production de données précises et fiables au niveau national sur le nombre de poursuites et de condamnations relatives aux délits de blanchiment ou aux infractions principales, sur les confiscations d'avoirs, sur les enquêtes ouvertes et sur les arrestations effectuées grâce au signalement d'opérations de blanchiment. Ces systèmes de suivi devraient aussi permettre de retrouver les renseignements transmis d'une CRF à l'autre, ainsi que ceux utilisés pour des actions de répression connexes. Cela suppose que tous les acteurs intervenant dans la chaîne de collecte des informations anti-blanchiment («IABA») - CRF, instances de répression, tribunaux, etc.- se dotent d'un appareil statistique capable non seulement de recueillir toutes les données pertinentes, mais aussi de remonter de celles-ci jusqu'à la déclaration IABA d'origine (ou inversement) [25].

[25] Cf. dans ce contexte la recommandation 32 des 40 recommandations du GAFI.

* Pouvoirs de confiscation: La recommandation 3 des Quarante recommandations du GAFI encourage les pays à envisager des mesures de confiscation «sans condamnation pénale préalable, ou [...] faisant obligation à l'auteur présumé de l'infraction d'établir la preuve de l'origine licite des biens présumés passibles de confiscation». L'exemple de certains États membres montre que la constitution d'organismes spécialisés dans le recouvrement des avoirs [26] peut devenir un atout précieux pour priver les auteurs de crimes des profits et avoirs qu'ils ont illégalement acquis, par tous les moyens légaux offerts par le droit pénal et/ou civil [27]. Ces moyens incluent notamment le pouvoir de confisquer des avoirs sans condamnation pénale préalable et l'obligation, pour un délinquant, de prouver l'origine licite d'un bien présumé être le produit d'un crime [28]. Il conviendrait donc d'envisager la création d'instances de recouvrement des avoirs au niveau national. La Commission soutient les efforts d'Europol pour créer un «centre d'information sur les saisies» [29], destiné à faciliter l'identification des avoirs d'origine criminelle dans le cadre des grandes enquêtes pénales menées par les États membres. Eurojust doit aussi être associé à ces efforts.

[26] Selon la recommandation 17 (b) de la «stratégie pour le prochain millénaire», «les États membres devraient envisager la création d'unités spécifiquement chargées des procédures de dépistage, de saisie et de confiscation des avoirs» et ils devraient en outre s'assurer que ces unités «disposent du personnel et des ressources opérationnelles et techniques suffisants pour lutter contre le blanchiment de capitaux».

[27] Ces exemples se sont révélés particulièrement efficaces dans la confiscation des produits du crime. Il s'agit d'une procédure «in rem» engagée contre le bien, indépendamment d'une éventuelle condamnation au pénal du prévenu. Cela permet aux autorités répressives de concentrer leur action sur les avoirs résultant d'activités criminelles. Dès que l'origine criminelle des avoirs a pu être établie sur la base de la notion de preuve en droit civil, moins stricte, la charge de la preuve échoit au défendeur, qui doit prouver l'origine légitime des actifs. Des informations. sur l'organisme de recouvrement des avoirs du Royaume-Uni sont disponibles sur le site http://www.homeoffice.gov.uk/ .

[28] Voir dans ce contexte la recommandation 19 de la «stratégie pour le prochain millénaire».

[29] Ce centre mettra à la disposition des utilisateurs une liste exhaustive de tous les outils d'identification des avoirs qui existent dans les États membres et ailleurs, une description des procédures applicables et une liste de points de contact nationaux, afin de faciliter la coopération internationale.

* Obligations de déclaration: la recommandation 17 des Quarante recommandations du GAFI appelle à la mise en place de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives pour les personnes physiques ou morales qui ne se conforment pas aux règles anti-blanchiment. Les directives anti-blanchiment imposent en effet d'importantes obligations de déclaration ou autres à certaines catégories de personnes. Il est légitime de se demander si l'on ne pourrait pas renforcer l'efficacité de ce dispositif en criminalisant les négligences graves entraînant le non-respect du devoir de déclaration ou d'autres obligations, comme la vérification adéquate des identités, l'enregistrement des transactions et la coopération avec les CRF, voire en prévoyant une responsabilité des entreprises dans certains cas.

* Base de données sur les transactions en espèces: il convient d'examiner la faisabilité et l'utilité de la mise en place, par les États membres, d'une base de données informatique sur les transactions en espèces supérieures à un certain montant, qui pourrait être consultée par les autorités policières et judiciaires dans le cadre d'enquêtes sur le blanchiment, dans le respect de la législation sur la protection des données [30].

[30] La recommandation 19 b) des 40 recommandations du GAFI invite les pays à envisager la création de bases de données similaires placées sous la responsabilité d'agences nationales.

* Paradis financiers: La recommandation 14 du document de «stratégie pour le prochain millénaire» préconise l'adoption d'un instrument relatif aux mesures que les États membres devraient prendre en ce qui concerne les centres financiers offshore et onshore et les paradis fiscaux situés sur leur territoire ou celui de leurs dépendances, ainsi qu'à une politique commune de l'Union européenne à l'égard des centres financiers et paradis fiscaux situés hors de son territoire. Les États membres devraient veiller à ce que les Quarante recommandations du GAFI et les directives communautaires anti-blanchiment soient correctement appliquées dans les centres financiers offshore et onshore et les paradis fiscaux situés dans des dépendances. Pour les paradis financiers qui ne relèvent pas de la juridiction des États membres [31], il conviendrait de réfléchir à un mécanisme qui permettrait de réagir au niveau de toute l'UE lorsque ces paradis financiers constituent une menace importante en termes de blanchiment [32]. Pour empêcher et démasquer les délits financiers des sociétés, l'implication de centres financiers et de structures ad hoc impose une coordination particulièrement étroite entre les instances de réglementation des sociétés, les autorités des marchés de valeurs mobilières, les contrôleurs des comptes et les autorités de surveillance comptable.

[31] Le Conseil conjoint JAI-Ecofin a adopté en octobre 2000 des conclusions sur la question des risques de blanchiment liés aux centres financiers offshore et onshore et aux paradis fiscaux.

[32] Sur ce sujet, voir la déclaration du Treasury Department du 19 novembre 2003, annonçant qu'il avait décidé de fermer au Myanmar l'accès au système financier américain, en le désignant comme une plate-forme de blanchiment.

* Pour faire passer des fonds illégaux d'un pays à l'autre, les terroristes et autres criminels ont souvent recours à des opérations bancaires clandestines ou à d'autres systèmes de transfert alternatifs, qui ne laissent généralement aucune trace écrite. Pour assurer une surveillance adéquate de ces systèmes et, le cas échéant, leur démantèlement, il est nécessaire de promouvoir l'échange rapide d'informations, au cas par cas, entre les instances de répression, les CRF et les autres organismes concernés. Ceci devrait, par ricochet, encourager les autorités nationales et étrangères à engager une action concertée pour dissuader ceux qui le voudraient d'utiliser ces systèmes pour transférer des fonds illégaux. À cet effet, la Commission apporte son soutien et participe à la mise en place d'un système d'alerte rapide pour promouvoir l'échange d'informations et la coordination des actions visant à mettre un terme au transfert international de fonds illégaux.

* SUSTRANS: la Commission soutient et encourage Europol dans sa volonté de renforcer son dispositif antiblanchiment, grâce au traitement informatisé des déclarations de transactions suspectes envoyées à son système d'analyse (SUSTRANS), et à une transmission plus systématique des renseignements d'ordre financier par les États membres.

En matière de lutte contre le blanchiment, le secteur privé a consenti des efforts significatifs pour mettre en place des systèmes de détection et de déclaration des transactions suspectes. Il est maintenant nécessaire de compléter ces mesures par de nouvelles initiatives du secteur public. Une efficacité accrue des mesures complémentaires prises par le secteur public contre le blanchiment permettrait, en retour, d'envisager une extension des obligations imposées aux établissements financiers et autres dans le cadre des directives antiblanchiment. La définition du blanchiment de capitaux pourrait par exemple s'étendre aux situations où une personne aurait dû connaître l'origine criminelle de certains biens.

 

2.5. Cellules de renseignement financier

 

Coopération et échange d'informations entre CRF

Conformément aux directives anti-blanchiment, les États membres doivent désigner une autorité pour recevoir les déclarations de transactions suspectes émanant du secteur financier ou de certaines autres activités et professions. Ces autorités sont maintenant généralement dénommées «cellules de renseignement financier» (CRF). Tous les États membres ont créé une CRF sur leur territoire. Ces cellules ont pour tâche de collecter et d'analyser les informations transmises conformément à la directive. Ces informations sont utilisées à des fins de renseignement, dans le but de mettre au jour les liens qui existent entre transactions financières suspectes et activités criminelles sous-jacentes.

Actuellement, la coopération et l'échange d'informations entre les CRF nationales prennent souvent du temps, ont un caractère limité et ne sont généralement pas informatisés. Or, étant donné l'ampleur souvent internationale des opérations de blanchiment, il serait possible, en exploitant au maximum les renseignements financiers disponibles, de renforcer considérablement les mesures de lutte contre ce phénomène et d'obtenir de meilleurs résultats. Pour promouvoir un véritable échange d'informations entre les CRF des différents États membres, une décision du Conseil d'octobre 2000 [33] invitait ces derniers à faire en sorte que les CRF coopèrent pour recueillir, analyser et vérifier les informations pertinentes, et notamment échangent des informations.

[33] Décision du Conseil du 17 octobre 2000 relative aux modalités de coopération entre les cellules de renseignement financier des États membres en ce qui concerne l'échange d'informations, 2000/642/JAI, JO L 271 du 24.10.2000, p. 4. Conformément à cette décision, les États membres doivent aussi prévoir et adopter d'un commun accord des circuits appropriés et protégés pour la communication entre les CRF.

La Commission, le Parlement européen, le Conseil et le Conseil européen s'accordent tous sur la nécessité d'une meilleure coopération entre CRF. Le Conseil conjoint Ecofin/JAI d'octobre 2001 a invité la Commission à étudier les possibilités de financement communautaire pour un projet dans ce domaine. Un réseau informatique pilote comprenant actuellement sept CRF a été mis en place sous l'égide des Pays-Bas. Bien que modestes, les premiers résultats de ce projet, baptisé CRF-NET, sont encourageants. Il est cependant clair que la conception et la mise en place d'un réseau parfaitement opérationnel entre les CRF de tous les États membres demanderont un investissement important, et sur plusieurs années.

La Commission est persuadée qu'il s'agit là d'un projet valable, qui devrait grandement contribuer aux efforts de l'UE contre le blanchiment. C'est pourquoi il a été proposé que la Commission conclue avec le ministère néerlandais de la Justice une convention de financement, qui permettrait de lancer un projet de création et d'exploitation d'un réseau informatique pleinement opérationnel, réunissant toutes les CRF des États membres, pour le traitement et l'échange de renseignements financiers.

Le réseau CRF-NET permettra aux CRF de tous les États membres d'échanger des renseignements financiers grâce à un réseau informatique décentralisé; toutes devraient être connectées au réseau pilote actuel (CRF-NET). Compte tenu des liens évidents qui existent entre ce projet et ses propres attributions, Europol y serait étroitement associé.

Le 22 décembre 2003, la Commission a formellement décidé d'accorder des fonds au ministère néerlandais de la Justice pour la réalisation du projet CRF-NET. La convention de financement qui doit être conclue à cet effet entre la Commission et ce ministère est en cours de finalisation.

Il convient de noter qu'un réseau parallèle est actuellement en voie de constitution entre les CRF des États adhérents, avec le soutien du programme de financement PHARE. Ces deux réseaux sont conçus pour être parfaitement compatibles entre eux et pour pouvoir être fusionnés, de manière à donner naissance, le moment venu, à un réseau unique pour toute l'UE.

 

2.6. Fraude (autre que portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés)

 

La fraude et la contrefaçon portant sur les moyens de paiement autres que les espèces (principalement les cartes de crédit et de débit et les chèques) représente une source importante de revenus illicites pour les groupes criminels organisés. Une décision-cadre [34] a donc été adoptée en 2001, afin que la fraude et la contrefaçon de moyens de paiement autres que les espèces soient dorénavant considérées comme des infractions pénales et fassent l'objet de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives.

[34] Décision-cadre du Conseil du 28 mai 2001concernant la lutte contre la fraude et la contrefaçon des moyens de paiement autres que les espèces (2001/413/JAI), JO L 149 du 02/06/2001, p. 1. Cette décision-cadre vise le vol, la contrefaçon ou falsification, la réception ou l'obtention et l'usage frauduleux d'instruments de paiement ou d'instruments censés être des instruments de paiement. L'usage d'un ordinateur en vue de se procurer un avantage financier illégal est également visé. La décision-cadre aborde aussi la question de la coopération et des échanges d'information entre États membres pour la répression de ces infractions.

Pour compléter cette décision-cadre, la Commission a adopté, en février 2001, un plan d'action triennal sur la prévention de la fraude et la contrefaçon de moyens de paiement autres que les espèces [35], qui vise à promouvoir une approche plus cohérente de la prévention dans ce domaine. Ce plan d'action s'appuie sur une étroite coopération des pouvoirs publics compétents et des acteurs privés. Il propose un arsenal complet de mesures non législatives de sensibilisation, d'échange d'expériences et d'informations, de formation, d'élaboration et de mise en commun de matériel didactique [36]. Il a reçu tout le soutien de l'ensemble des parties prenantes, tant publiques que privées.

[35] Communication de la Commission du 9 février 2001 sur la prévention de la fraude et de la contrefaçon d'instruments de paiement autres que les espèces, COM(2001) 11 final.

[36] Pour de plus amples informations sur toutes les mesures du plan d'action 2001-2003 et leur mise en oeuvre, voir le site: http://europa.eu.int/http://europa.eu.int/ comm/internal_market/payments/index_fr.htm

La Commission publiera en 2004 un rapport sur les progrès accomplis dans le cadre de ce plan d'action, et proposera de nouvelles initiatives. Les priorités resteront la sécurisation des services et des systèmes de paiement, l'échange concret d'informations et le renforcement de la coopération entre les instances publiques compétentes, de même qu'entre ces dernières et le secteur privé. Le développement de l'échange transfrontalier d'informations passe par une clarification des conséquences des mesures actuelles de protection des données sur les actions de prévention de la fraude. L'intégration des pays en cours d'adhésion aux dispositifs communautaires de prévention, et l'intensification des relations avec les pouvoirs publics des pays tiers, demeureront également des priorités. Les nouvelles menaces seront aussi prises en considération. C'est ainsi que dans le cadre du forum de l'UE sur la prévention de la criminalité organisée qui s'est tenu en février 2004, un atelier a été consacré à l'usurpation d'identité en vue de couvrir des activités criminelles.

Pour que la lutte contre la fraude soit efficace, il faut renforcer la coopération à tous les niveaux. Les systèmes permettant d'assurer un échange d'informations rapide et approprié doivent être rendus pleinement opérationnels. Pour sa part, la Commission, dans le cadre du forum de l'UE sur la prévention de la criminalité organisée et d'autres enceintes [37], examinera la possibilité d'élaborer des lignes directrices précisant clairement selon quelles modalités les organismes publics et privés peuvent collaborer pour mieux combattre la fraude. L'absence d'une législation harmonisée en matière de lutte contre la fraude constitue un sérieux frein à la coopération policière et judiciaire dans ce domaine.

[37] Par exemple, le groupe d'experts de l'Union sur la prévention de la fraude et de la contrefaçon des moyens de paiement autres que les espèces.

 

2.7. Protection des intérêts financiers de la Communauté

 

Les ressources propres de la Communauté subissent des pertes énormes à cause de la fraude, qui permet de se procurer des revenus illicites sans trop de risque et n'entraîne que de faibles peines en cas de condamnation.

L'article 280 du traité CE permet à la Communauté et aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour combattre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté. Dans le droit fil de la convention de 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés (en vigueur depuis le 17 octobre 2002), le deuxième protocole à cette convention [38] invite les États membres à prendre des mesures et à échanger des informations avec la Commission afin que les personnes morales puissent être tenues pour responsables d'un fait de fraude, de corruption ou de blanchiment de capitaux. Ce deuxième protocole n'est pas encore entré en vigueur et les deux États membres qui doivent encore le ratifier devraient redoubler d'efforts pour le faire, afin de permettre une répression plus efficace des actes de fraude qui lèsent les intérêts financiers de la Communauté.

[38] Deuxième protocole, établi sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, à la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes; JO C 221 du 19.07.1997, p.12.

L'OLAF joue un rôle fondamental d'enquêteur et/ou de coordinateur dans tous les domaines relatifs à la protection des intérêts financiers de la Communauté. La détection et la prévention du blanchiment du produit de la fraude aux fonds communautaires sont un aspect essentiel de la protection de ces intérêts. Le renforcement de la coopération et de l'échange d'informations avec les CRF aura donc d'importantes retombées sur les efforts de l'OLAF en la matière.

L'entraide administrative et l'échange d'informations dans un cadre coordonné sont essentiels pour lutter contre la fraude. La Commission prépare actuellement une initiative sur l'entraide administrative pour la protection des intérêts financiers de la Communauté contre la fraude et d'autres activités illégales. Cette initiative prévoit une entraide administrative et un échange d'informations, selon des axes verticaux et/ou horizontaux, sur la fraude à la TVA, le blanchiment du produit de la fraude aux fonds communautaires, la fraude aux fonds structurels et d'autres types de fraude qui ne sont pas encore visés par le droit communautaire dérivé.

En matière de criminalité financière, le but de cette initiative est que les informations transmises conformément aux dispositions anti-blanchiment des instruments juridiques relevant des premier et troisième piliers puissent être utilisées pour protéger les intérêts financiers de la Communauté. Il s'agirait, notamment, d'utiliser les informations relatives aux transactions financières suspectes pour traquer les fraudes aux fonds communautaires. La fraude à la TVA est une autre préoccupation majeure des États membres et de la Communauté européenne. La TVA est en effet la première source de recettes budgétaires pour certains États membres, et la ressource propre TVA peut représenter jusqu'à 25 % du budget communautaire. Outre ce manque à gagner, ce type de fraude porte préjudice aux activités commerciales légales de certains secteurs économiques et entrave le bon fonctionnement du marché intérieur.

C'est pourquoi la Commission a présenté en juin 2001 une proposition de règlement [39] visant à renforcer la coopération entre les autorités fiscales des États membres en matière de lutte contre la fraude à la TVA. Le Conseil ayant adopté cette proposition le 8 octobre 2003, un nouveau règlement (règlement (CE) n°1798/2003) concernant la coopération administrative dans le domaine de la TVA [40] est entré en vigueur le 1er janvier 2004. Il améliore considérablement le cadre juridique de la coopération administrative et doit, à ce titre, être considéré comme un instrument essentiel de lutte contre la fraude à la TVA.

[39] COM(2001) 294 final du 18.6.2001.

[40] Règlement (CE) n° 1798/2003 du Conseil, JO L 264 du 15.10.2003.

Même si ce nouveau règlement sur la coopération administrative était un préalable indispensable à une meilleure coopération entre États membres dans leur lutte contre ce type de fraude, il était nécessaire d'accompagner cette initiative législative par des mesures concrètes renforçant la coopération entre les administrations fiscales et les agents du fisc. Le Conseil et le Parlement européen ont donc adopté le programme FISCALIS 2003-2007, qui prévoit une coopération plus étroite, au quotidien, des fonctionnaires.

En parallèle, la Commission, en collaboration avec les États membres, s'est livrée à une étude approfondie de la fraude intracommunautaire à la TVA et a notamment recensé les diverses mesures nationales qui s'étaient avérées les plus efficaces pour lutter contre la fraude de type «carrousel». Depuis, plusieurs États membres ont entrepris d'adapter leurs systèmes de contrôle nationaux en s'inspirant de ces «meilleures pratiques», afin de prévenir et de démanteler ces réseaux.

Grâce à l'initiative législative de la Commission en vue d'un règlement sur l'entraide administrative et l'échange d'informations, le rôle de coordination indispensable de la Commission (OLAF) en matière de fraude internationale à la TVA s'inscrira dans un cadre juridique plus précis. Cette initiative complète la législation en vigueur, notamment le règlement (CE) nº 515/97 relatif à l'assistance mutuelle sur les questions douanières et agricoles et le règlement (CE) n° 1798/2003 concernant la coopération administrative dans le domaine de la fraude à la TVA.

Néanmoins, outre les mesures prises récemment dans ce domaine, il est nécessaire de réfléchir au niveau communautaire à une définition commune et exhaustive de la fraude fiscale et à l'harmonisation des sanctions pénales. La Commission a l'intention de lancer une étude comparative des différentes définitions de la fraude fiscale et de leurs conséquences pénales. Il convient de renforcer la coopération entre les États membres, la Commission (OLAF), Eurojust et éventuellement Europol, en exploitant mieux les systèmes de coordination déjà en place au niveau de l'OLAF et d'Eurojust, et de prévoir à cet effet des ressources suffisantes pour que toutes les possibilités de partenariat puissent se concrétiser [41].

[41] Voir la deuxième déclaration relative à la décision du Conseil étendant le mandat d'Europol à la lutte contre les formes graves de criminalité internationale énumérées à l'annexe de la convention Europol, JO C 362 du 18.12.2001, p. 2.

Enfin, la désignation d'un procureur européen indépendant, chargé de détecter et de poursuivre les infractions commises à l'encontre les intérêts financiers de la Communauté, ne peut que renforcer la lutte contre la criminalité financière organisée.

 

2.8. Protection de l'euro

 

L'introduction de l'euro a rendu nécessaire une coopération plus étroite entre les États membres de l'UE et l'adoption de règles et de procédures communes. Elle a également imposé des mesures particulières pour empêcher le faux monnayage. Ces mesures comprennent un règlement prévoyant des mesures spécifiques pour protéger l'euro [42] et une décision-cadre sur les sanctions pénales [43]. Le Conseil a également étendu le mandat d'Europol au faux monnayage [44] et confié à la Commission la coordination des formations et de l'assistance technique, par une décision instituant un programme financier spécifique [45].

[42] Règlement (CE) n° 1338/2001 du Conseil du 28 juin 2001 définissant des mesures nécessaires à la protection de l'euro contre le faux monnayage, JO L 181 du 4.7.2001, p. 6.

[43] Décision-cadre du Conseil du 29 mai 2000 visant à renforcer par des sanctions pénales et autres la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro, (2000/383/JAI), JO L 140 du 14.6.2000, p. 1.

[44] Décision du Conseil du 29 avril 1999 étendant le mandat d'Europol à la lutte contre le faux monnayage et la falsification des moyens de paiement (1999/ C 149/02), JO C 149 du 28.5.1999, p. 16.

[45] Décision du Conseil du 17 décembre 2001 établissant un programme d'action en matière d'échanges, d'assistance et de formation pour la protection de l'euro contre le faux monnayage (programme «Pericles») (2001/923/CE), JO L 339 du 21.12.2001, p. 50.

La Banque centrale européenne (BCE) a créé et gère le SSFM [46], une base de données sur le faux monnayage, et analyse au fur et à mesure les nouveaux types de faux billets. Europol, chargé de la transmission et de l'analyse d'informations, a créé une base de données sur les infractions à l'usage des instances de répression et est en train de renforcer ses compétences en la matière. La Commission (OLAF) contrôle la mise en oeuvre de la législation, prépare des initiatives législatives, gère le programme de formation et d'assistance technique «Pericles» et analyse les nouveaux types de fausses pièces en euros.

[46] Système de surveillance de la fausse monnaie.

Les États membres ont tous mis en oeuvre les dispositions communautaires relatives aux sanctions pénales [47]. Ils ont créé des offices centraux nationaux de protection contre le faux monnayage et chargé des organismes de l'analyse technique des faux. Ils ont également adopté des dispositions obligeant les établissements de crédit à retirer la fausse monnaie de la circulation et à la remettre aux autorités compétentes. Enfin, ils assurent des actions de formation et d'assistance technique pour la protection de l'euro, qui sont coordonnées par la Commission.

[47] Rapports de la Commission basés sur l'article 11 de la décision-cadre du Conseil, du 29 mai 2000, visant à renforcer par des sanctions pénales et autres la protection contre le faux monnayage en vue de la mise en circulation de l'euro, COM(2001) 771 final du 13 décembre 2001 et COM(2003) 532 final du 3 septembre 2003.

La BCE et la Commission se penchent actuellement sur l'utilisation croissante d'équipements numériques modernes permettant de reproduire relativement facilement les billets de banque. Elles envisagent de légiférer au niveau communautaire sur l'utilisation des sécurités spéciales, reconnaissables par les ordinateurs, qui sont intégrées aux billets en euros [48]. Enfin, des méthodes communes sont actuellement à l'étude pour la détection des faux au niveau des établissements de crédit et autres établissements concernés.

[48] CONFORMEMENT A CES DISPOSITIONS COMMUNAUTAIRES, TOUS LES FABRICANTS OU IMPORTATEURS D'IMPRIMANTES, DE SCANNERS ET DE LOGICIELS DE TRAITEMENT DE L'IMAGE BASES DANS L'UE DEVRAIENT INTEGRER DES DETECTEURS APPROPRIES DANS LEURS PRODUITS, PAR EXEMPLE SUR LE MODELE DU SYSTEME DE DISSUASION DU FAUX MONNAYAGE (COUNTERFEIT DETERRENCE SYSTEM OU CDS) MIS AU POINT PAR LA BCE ET D'AUTRES BANQUES CENTRALES.

 

3. OUTILS TRANSVERSAUX VISANT À RENFORCER LA LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE ORGANISÉE

 

La Commission européenne entend développer et renforcer toute une série de mesures transversales destinées à prévenir et à combattre le crime organisé en général, mais qui ont aussi leur utilité pour lutter contre la criminalité financière organisée.

 

3.1. Transparence de certaines entités juridiques

 

Les normes de transparence et d'intégrité des administrations publiques et des entités privées doivent globalement être renforcées de manière à prévenir et à décourager la criminalité financière en général, ce qui contribuera aussi à un meilleur dépistage de la criminalité financière organisée. Le GAFI a souligné la nécessité de faciliter l'accès à l'information sur les bénéficiaires effectifs et le contrôle des personnes morales, en se penchant plus particulièrement sur les actions au porteur et les fiducies [49]. Le Conseil de Tampere d'octobre 1999 a aussi reconnu dans ses conclusions qu'une plus grande transparence s'imposait en ce qui concerne les bénéficiaires effectifs [50].

[49] Voir en particulier les recommandations 33 et 34 des Quarante recommandations du GAFI.

[50] La conclusion 54 débute ainsi: «Dans le respect des dispositions en matière de protection des données, il convient d'améliorer la transparence des transactions financières et de la provenance du capital des sociétés...».

Un rapport commandé par la Commission [51] a conclu que le manque de transparence, notamment en ce qui concerne l'identification du bénéficiaire effectif, l'utilisation de fiducies ou d'instruments équivalents et l'utilisation de prête-noms sont autant d'obstacles à la coopération internationale contre le blanchiment de capitaux. Les recommandations 33 et 34 des Quarante recommandations du GAFI soulignent aussi les risques de détournement des actions au porteur et des fiducies à des fins de blanchiment.

[51] Étude de la réglementation et des pratiques des États membres de l'UE qui font obstacle à la coopération internationale en matière de lutte contre le blanchiment, Transcrime Research Institute, rapport final d'octobre 2001, disponible sur le site de l'institut, à l'adresse suivante: http:// www.transcrime.unitn.it.

L'affaire Parmalat, et d'autres scandales du même ordre, ont mis en évidence de nombreuses lacunes. La Commission a entrepris d'appliquer son programme sur la gestion des entreprises et le droit des sociétés, qui vise un certain nombre de domaines dans lesquels des points faibles ont été détectés. La Commission a récemment adopté une proposition pour une directive révisant la 8ème directive du droit des sociétés sur le contrôle légal des comptes. Elle traite de questions comme la surveillance des contrôleurs, confiée à des organismes indépendants. Parmi les autres questions figurent notamment: l'imposition aux contrôleurs des comptes de groupes de l'entière responsabilité des comptes consolidés des sociétés cotées; la nécessité de comités de contrôle fonctionnels, indépendants et puissants dans toutes les sociétés cotées; le renforcement des sanctions; enfin, le renforcement éventuel de la coopération de tous les organes de surveillance au niveau européen. Un modèle de coopération avec les régulateurs des pays tiers y est inclus.

En outre, il faudra accélérer les travaux sur le rôle des administrateurs indépendants qui n'ont pas de rôle exécutif ou de surveillance, sur la responsabilité conjointe de tous les administrateurs pour les comptes de la société, et sur la garantie d'une information et d'une publicité complètes concernant la structure et les relations intragroupe des groupes de sociétés. En ce qui concerne le recours aux paradis fiscaux et aux structures ad hoc, la réflexion se poursuit sur la question de savoir si ces opérations spéciales doivent figurer dans les comptes des sociétés, s'il convient d'en expliquer la finalité et si le contrôleur des comptes du groupe doit être tenu de vérifier que cette description correspond bien à la réalité.

La nécessité d'accroître la transparence afin d'empêcher l'infiltration des secteurs public et privé par la criminalité organisée est également évoquée dans la «stratégie pour le prochain millénaire» [52]. La Commission a récemment financé une étude qui analyse les mesures prises par les États membres pour empêcher l'infiltration des entités légales par la criminalité organisée et les groupes terroristes [53]. On trouvera un examen plus détaillé des conclusions de cette étude dans la communication de la Commission sur la lutte contre le terrorisme et d'autres formes graves de criminalité [54].

[52] «Prévention et contrôle de la criminalité organisée: une stratégie de l'Union européenne pour le début du prochain millénaire», JO C 124 du 3.5.2000. Voir notamment la recommandation 3.

[53] Étude comparative des mesures prises par les États membres afin de prévenir l'infiltration des entités juridiques par le crime organisé et les groupes terroristes, Institute of Advanced Legal Studies, septembre 2003.

[54] Communication de la Commission sur les mesures à prendre pour lutter contre le terrorisme et d'autres formes graves de criminalité, et notamment pour améliorer l'échange d'informations, adoptée par la Commission le 29.3.2004 - COM(2004)221.

La Commission estime qu'une amélioration des règles de transparence peut aider à combattre la criminalité financière organisée, mais que ces nouvelles dispositions doivent être élaborées en étroite coopération avec les représentants du secteur privé. Une obligation de transparence accrue de la part des sociétés risque en effet d'avoir un impact en termes d'efficience, et un coût économique, en imposant par exemple une vérification plus poussée de l'identité des administrateurs ou des actionnaires. Suite au document de travail des services de la Commission sur la transparence des entités juridiques [55], la Commission propose d'effectuer des analyses coûts-bénéfices sur le renforcement des mesures de transparence aux fins de la lutte contre la criminalité financière organisée.

[55] Document de travail des services de la Commission intitulé: «La transparence des entités juridiques et des mesures destinées à accroître la transparence dans le domaine bancaire et financier dans le contexte de la lutte contre le blanchiment de capitaux», SEC(2001) 1645 du 16.10.2001.

En outre, la Commission reconnaît qu'une amélioration de la transparence et de l'échange d'informations ne serait pas seulement utile pour combattre la criminalité financière organisée, mais qu'elle peut aussi jouer un rôle décisif dans d'autres domaines d'intérêt commun pour l'UE. Il conviendrait de réfléchir à de nouveaux moyens de prévenir et de combattre les malversations financières, en visant notamment l'utilisation par les sociétés de structures complexes et opaques (dont certains instruments dérivés), de filiales ou d'autres structures ad hoc, pour commettre et dissimuler des manipulations fiscales et financières. Cette réflexion pourrait déboucher sur la recommandation d'une stratégie globale et cohérente de l'UE pour mettre fin à ce type d'agissements.

3.2. Coopération entre les secteurs privé et public

La coopération à l'échelle de l'Union entre le secteur financier et les autres milieux d'affaires privés, d'une part, et les instances de répression, d'autre part, devrait jouer un rôle majeur dans la prévention et la détection du blanchiment de capitaux et d'autres formes de criminalité financière. Elle peut en effet faciliter le repérage des meilleures pratiques au sein des entreprises, encourager des échanges d'idées fructueux et favoriser le renforcement des contrôles sectoriels internes. Il semble qu'un volume important d'infractions financières organisées continue de passer inaperçu. Promouvoir une coopération plus étroite entre la police (ou les autres instances de répression) et le secteur privé pourrait encourager le signalement de ce type de délits.

En matière de blanchiment de capitaux, une coopération plus intensive entre les organes de répression, les administrations, le secteur financier et les autres secteurs d'activité devrait faciliter la détection et l'élimination des failles que la criminalité organisée cherche à exploiter au sein des systèmes financiers [56].

[56] En juillet 2003, le ministère américain de la sécurité intérieure (Department of Homeland Security), a annoncé la mise en place d'un nouveau programme permettant de partager avec le secteur privé des informations sur les failles des dispositifs de sécurité et du système financier révélées par les enquêtes, afin d'aider les sociétés à mieux se prémunir contre le blanchiment ou d'autres infractions financières.

C'est pourquoi la Commission entend promouvoir le développement de la coopération entre secteur public et secteur privé, non seulement dans le cadre du forum de l'UE sur la prévention de la criminalité organisée, mais aussi en encourageant les travaux de recherche dans ce domaine. S'appuyant sur les résultats de la conférence de Dublin «Tackling Organised Crime in Partnership» [57], elle élaborera, en concertation avec les autres organes compétents, un plan d'action pour organiser cette coopération au niveau de l'UE.

[57] La conférence de Dublin «Tackling Organised Crime in Partnership» a eu lieu les 20 et 21 novembre 2003. Elle a été financée par le programme AGIS de la Commission européenne et soutenue par le ministère irlandais de la justice (Irish Department of Justice, Equality and Law Reform) ainsi que par le centre néerlandais pour la coopération policière internationale. La «déclaration de Dublin» adoptée en conclusion contient un certain nombre de recommandations sur l'établissement de partenariats contre la criminalité organisée.

La Commission examinera les possibilités de coordination entre, d'une part, les fonctionnaires des instances de répression et de l'administration en général, d'autre part, les représentants des milieux financiers et d'affaires concernés par la criminalité financière organisée.

 

3.3. Enquêtes financières

 

Les enquêtes financières sont un moyen d'en savoir plus sur les activités et les schémas de comportement des réseaux de criminalité organisée apportant une véritable valeur ajoutée. Pour lutter sérieusement contre la criminalité financière organisée, il est impératif de faire de cette lutte une priorité pour les responsables des hauts fonctionnaires de police, et de faire en sorte que les instances policières et judiciaires disposent des ressources et des moyens de formation nécessaires.

Les enquêtes financières peuvent jouer un rôle déterminant dans le renforcement des stratégies de démantèlement de la criminalité organisée. Cette technique d'investigation doit être encouragée au niveau national et, chaque fois que cela est opportun, au niveau européen [58]. Pour lutter contre le crime organisé et son financement, les concepts traditionnels d'action demandent d'etre repensés. En matière de criminalité financière, les enquêteurs doivent en effet adopter une stratégie «globale» en enquêtant à la fois sur le crime lui-même et sur les autres activités qui s'y rattachent. La définition d'une politique commune de généralisation des enquêtes financières en tant que technique d'investigation permettrait de renforcer la lutte contre la criminalité financière organisée. Il conviendrait aussi d'envisager l'adoption de normes applicables aux organes d'enquête financière de toute l'UE, notamment en ce qui concerne leur financement, leurs besoins de formation et leurs mécanismes de coopération.

[58] Voir en particulier la recommandation 27 des Quarante recommandations du GAFI.

Les États membres devraient renforcer les capacités d'Europol pour répondre à l'évolution des besoins en matière d'enquête financière. Europol devrait être habilité à lancer des enquêtes financières, parallèlement aux enquêtes sectorielles sur la criminalité organisée.

La Commission propose de créer un groupe de travail, composé de représentants de ses propres services (dont l'OLAF), ainsi que d'Europol et Eurojust, qui serait chargé d'élaborer des normes minimales pour les systèmes nationaux de renseignement sur la criminalité, afin de faciliter les analyses tactiques et stratégiques, la planification et les opérations, et de contribuer ce faisant à la mise en place dans l'UE d'un dispositif répressif efficace fondé sur le renseignement.

 

3.4. Statistiques et données comparatives

 

La lutte contre la criminalité financière organisée aurait tout à gagner à l'adoption d'une définition commune de cette notion. Cela permettrait aussi de progresser vers l'établissement de statistiques fiables et comparables, reflétant les tendances en matière de criminalité financière. La recommandation 32 des Quarante recommandations du GAFI préconise la mise en place de dispositifs statistiques complets pour accroître l'efficacité et l'efficience des systèmes de lutte anti-blanchiment. Un système commun de mesure du volume de DTS, de poursuites et condamnations pour blanchiment et des autres mesures de répression prises suite à des DTS serait très utile pour se doter de systèmes de détection rapide et évaluer l'efficacité de ces politiques. L'article 30, paragraphe 2, point d), du traité sur l'Union européenne stipule que l'action conjointe, en matière de coopération policière, inclut l'instauration d'un réseau de recherche, de documentation et de statistiques sur la criminalité transfrontière. La recommandation n°1 de la «stratégie pour le prochain millénaire» prône l'adoption d'une conception uniforme, à l'échelle de l'Union, des problèmes et des phénomènes de criminalité organisée, ainsi que la détection des tendances émergentes [59].

[59] «Prévention et contrôle de la criminalité organisée: une stratégie de l'Union européenne pour le début du prochain millénaire», JO C 124 du 3.5.2000; la recommandation n°1 répond implicitement à la nécessité de disposer d'un appareil statistique cohérent, qui aide à mesurer l'étendue de la criminalité organisée, à déterminer les tendances en Europe et à évaluer l'efficacité des politiques adoptées et mises en oeuvre.

La Commission, en concertation avec l'ensemble des intéressés, entend promouvoir la collecte d'informations et l'élaboration de mécanismes statistiques plus particulièrement axés sur la criminalité financière organisée. Elle apporte aussi son soutien à la réalisation d'évaluations du risque économique lié aux diverses formes de criminalité organisée, afin de mettre au point une méthode européenne d'évaluation des risques et préjudices économiques.

 

3.5. Évaluation et analyse du risque criminel («crime proofing»)

 

Les services de la Commission travaillent actuellement à la mise au point d'un mécanisme permettant de repérer les propositions législatives qui, par inadvertance, pourraient ouvrir la porte à des agissements criminels. Dans une étape ultérieure, il sera peut-être possible d'étendre ce mode d'évaluation du risque criminel, au-delà du processus législatif, aux procédures applicables dans des domaines tels que les demandes de remboursement de sinistres ou les demandes de cartes de crédit, de manière à réduire les possibilités de fraude. En ce qui concerne la fraude contre le budget communautaire, la Commission (OLAF) a lancé une initiative pour détecter et supprimer tout ce qui, dans les propositions d'actes législatifs et autres de la Communauté, pourrait constituer une occasion de frauder [60].

[60] Communication de la Commission du 7.11.2001, SEC(2001) 2029 final.

 

3.6. Évaluation des politiques et suivi

 

La Commission européenne attache une importance particulière au mécanisme d'évaluation mutuelle, tel qu'il fonctionne par exemple dans le cadre du groupe pluridisciplinaire du Conseil. Elle prévoit pour 2005 une évaluation complète de l'efficacité et de l'impact des politiques et mesures de lutte contre la criminalité financière organisée dans l'UE. L'objectif sera d'identifier les meilleures pratiques et les domaines dans lesquels des mesures additionnelles pourraient être prises contre ce type de criminalité.

 

3.7. Programmes de formation, ateliers et études

 

La formation joue un rôle capital dans la lutte contre la criminalité financière organisée. Les instances de répression, les autorités judiciaires et les acteurs privés concernés doivent posséder les compétences et le savoir-faire nécessaires. Les actions de formation doivent s'efforcer de motiver le personnel et, dans la mesure du possible, la société civile, en expliquant les impératifs économiques et sociaux qui sous-tendent cette lutte.

La Commission européenne continuera d'organiser et de financer des séminaires, ateliers et études grâce à son programme de financement AGIS; on trouvera des précisions à ce sujet sur les pages du site d'Europa consacrées à la création d'un espace de liberté, de sécurité et de justice (www.europa.eu.int).

 

4. POLITIQUES D'APPUI À LA MISE EN bUVRE DE MESURES DE PRÉVENTION ET DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ FINANCIÈRE ORGANISÉE

 

4.1. Mesures de financement pour lutter contre la criminalité financière organisée

 

Le 10 février 2004, la Commission a publié une communication sur les perspectives financières de l'après-2006, sous le titre «Construire notre avenir commun - Défis politiques et moyens budgétaires de l'Union élargie - 2007-2013» (COM(2004) 101 final). Cette communication désigne la constitution d'un espace de liberté, de sécurité et de justice comme une priorité de cadre politique global et comme le «nouvel horizon de l'intégration». Parmi les priorités en matière de sécurité, elle préconise de faire une plus grande place aux actions de prévention de la criminalité, «notamment les nouvelles formes graves de criminalité organisée, ainsi que les moyens nouveaux dont elle dispose». Cet engagement à créer de nouveaux mécanismes de financement contribuera à élargir le débat et aidera à mettre au point une politique efficace de lutte contre la criminalité financière organisée au niveau de l'UE. La Commission européenne jouera donc un rôle essentiel dans le soutien aux initiatives d'ordre législatif ou autres qui seront prises dans ce domaine, ainsi que dans le suivi et le développement ultérieur de ces initiatives.

 

4.2. Renforcer l'action extérieure dans la lutte contre la criminalité financière organisée

 

Les programmes d'assistance technique de l'UE visent à aider les pays tiers à améliorer leur capacité à respecter les normes européennes ou internationales. Il est de plus en plus fréquent d'inclure les questions de justice et affaires intérieures dans ces programmes, particulièrement pour ce qui est du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. L'Union européenne a aussi passé un certain nombre d'accords avec des pays tiers; elle a ainsi conclu le 25 juin 2003 un accord d'entraide judiciaire en matière pénale avec les États-Unis [61]. La Commission européenne a l'intention d'étudier les possibilités d'accords du même type entre l'Union européenne et d'autres pays. Elle rappelle aussi la nécessité d'améliorer la cohérence des politiques communautaires à l'égard des paradis financiers et fiscaux [62], en tant que moyen de promouvoir l'adoption des meilleures pratiques européennes ou internationales.

[61] OUTRE L'ENTRAIDE JUDICIAIRE EN MATIERE PENALE, L'ACCORD ENTRE L'UE ET LES ÉTATS-UNIS TRAITE AUSSI DE QUESTIONS AYANT PLUS SPECIFIQUEMENT TRAIT A LA CRIMINALITE FINANCIERE, NOTAMMENT L'ECHANGE D'INFORMATIONS CONCERNANT LES PERSONNES PHYSIQUES OU MORALES QUI SONT SOUPÇONNEES OU ACCUSEES D'ACTIVITES CRIMINELLES.

[62] COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPEEN ET AU COMITE ÉCONOMIQUE ET SOCIAL: «POLITIQUE FISCALE DE L'UNION EUROPEENNE - PRIORITES POUR LES PROCHAINES ANNEES»; COM(2001) 260 FINAL DU 23.5.2001.

 

5. CONCLUSION

 

La criminalité financière organisée nuit aux acteurs économiques légitimes et renforce l'économie souterraine, amputant d'autant la croissance économique et les ressources publiques. La lutte contre ce phénomène est d'autant plus pertinente qu'elle joue un rôle, plus largement, dans le combat mené contre la criminalité organisée en général. L'argent étant le ressort même de cette criminalité, le fait d'en barrer l'accès aux groupes criminels organisés ne peut que les affaiblir.

La lutte contre le blanchiment de capitaux est depuis longtemps une priorité politique essentielle de l'Union européenne, qui découle de la nécessité de protéger le système financier et de soutenir les efforts de lutte contre la criminalité organisée. Suite aux événements tragiques du 11 septembre 2001 et au consensus international sur la nécessité de cibler le financement du terrorisme, l'importance de cette tâche est devenue encore plus notoire.

Tout en reconnaissant qu'il existe déjà des systèmes très poussés de lutte contre le blanchiment de capitaux, la Commission est déterminée à poursuivre la lutte anti-blanchiment et à mettre au point une législation anti-blanchiment adaptée à un système financier international toujours plus sophistiqué.

Les première et deuxième directives sur le blanchiment ont mis en place d'importantes procédures de contrôles destinées à faciliter la détection du blanchiment d'argent et d'autres avoirs issus d'activités criminelles. Ce travail se poursuivra. La proposition de troisième directive sur le blanchiment, que la Commission compte présenter en juin 2004, s'efforcera de consolider et de renforcer cette approche. Cette proposition détaillera les modifications à apporter aux directives existantes pour tenir compte des Quarante recommandations révisées du GAFI et renforcer les mécanismes de protection contre le blanchiment.

La lutte contre la criminalité financière organisée doit associer pleinement toutes les parties concernées dans un effort commun pour détecter, surveiller et combattre ces agissements. La mise en place d'une coopération accrue entre les secteurs public et privé joue un rôle essentiel de ce point de vue. De même, le renforcement de la coopération et des échanges d'information à tous les niveaux entre les instances de répression, sur le plan intérieur comme sur le plan international, sera déterminant dans ce contexte. Il convient de mettre davantage l'accent sur le rôle stratégique qu'Europol et Eurojust devraient jouer dans les enquêtes conjointes et parallèles, et sur la coordination entre Europol et les instances répressives et judiciaires nationales.

Les enquêtes financières devraient faire partie intégrante de l'action répressive, dans le cadre d'une approche «globale» du phénomène criminel, fondée sur la collecte de renseignements concernant les réseaux et les bénéficiaires de la criminalité organisée. Il convient de réfléchir plus avant à des outils efficaces qui permettraient l'identification, le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime, en recourant éventuellement à des organismes de recouvrement spécialisés et à des procédures civiles.

Les criminels profitent des possibilités de préservation de l'anonymat des bénéficiaires effectifs de ces avoirs et de la facilité avec laquelle il est possible de constituer une société ou d'utiliser un prête-nom. La question de la transparence reste donc un aspect essentiel de la lutte contre la criminalité financière organisée, et demandera que l'on y consacre un surcroît d'efforts.

D'autres formes de soutien sont également nécessaires pour optimiser la lutte contre la criminalité financière organisée. Il convient de développer les outils utilisés pour mesurer l'étendue des différentes formes de cette criminalité, surveiller les tendances naissantes et évaluer l'efficacité de la politique menée. L'évaluation des mesures mises en oeuvre est essentielle pour lutter contre la criminalité financière organisée. La Commission proposera donc une évaluation complète de l'efficacité des mesures prises en la matière, afin de faciliter l'identification des meilleures pratiques et des domaines où un effort supplémentaire serait nécessaire.

La Commission européenne voit dans la lutte contre la criminalité financière organisée une priorité fondamentale pour les années à venir, et est déterminée à jouer pleinement son rôle dans l'adoption de mesures efficaces et efficientes dans ce domaine, telles qu'évoquées dans la présente communication.

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